La pauvreté, nouvelle maladie contagieuse

Les Restos du cœur ont lancé leur 32e campagne d’hiver. La première date du 21 décembre 1985, à l’initiative de Coluche, deux ans après le tournant de la rigueur, en 1983, au temps où François Mitterrand était président de la République et Laurent Fabius, Premier ministre. A l’époque, on avait installé la première tente dans un terrain vague du XIXe arrondissement de la capitale, où furent distribués 60.000 repas. Aujourd’hui, on en est à 2.112 antennes et 132 millions de repas distribués.

A l’origine, tout le monde croyait qu’il s’agissait d’une initiative provisoire, d’un mauvais moment à passer, à l’instar des camps de réfugiés qui apparaissent dans les régions frappées par des conflits. Au fil des ans, le provisoire est devenu durable, car la pauvreté a gagné la guerre. Au même titre que d’autres associations humanitaires, les Restos du cœur sont maintenant une institution nationale, comme le marché de Noël sur les Champs-Elysées.

Aussi respectables que soient les bénévoles, on devrait souhaiter leur disparition – je veux dire leur recyclage dans des activités mieux adaptées à un pays comme la France. Certes, il y aura toujours besoin de veiller sur les plus faibles. Nul n’imagine un monde où chacun naîtrait avec une cuillère d’argent dans la bouche. Mais la réalité d’aujourd’hui, c’est l’explosion du nombre de ceux qui font leurs premiers pas avec la fourchette du besoin à la main, et la quasi-certitude de devoir un jour ou l’autre aller frapper à une porte d’assistance pour ne pas sombrer, comme dans un film de Ken Loach.

Au moment où l’on nous vante les charmes cachés de la mondialisation, la révolution technologique, l’économie dite collaborative et les start-up, voilà qui nous ramène sur terre.

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