Dans la nuit de jeudi à ce vendredi, les deux chefs de file du HDP, le parti prokurde turc, également députés, ont été placés en garde à vue. Depuis le mois de juillet dernier, le président Recep Erdogan fait preuve de toujours plus d’autoritarisme.
C’est un pays qui s’enfonce un peu plus dans l’arbitraire et l’autoritarisme. Dans la nuit de jeudi à ce vendredi 4 novembre, Selahattin Demirtas et Figen Yüksekdag, les deux co-présidents du HDP, le principal parti prokurde turc, également députés, ont été arrêtés à leur domicile par la police. Ils ont été placés en garde à vue dans le cadre d’une opération « antiterroriste ». Le parquet de Diyarbakir, ville du sud-est agitée par des combats quotidiens entre les forces de sécurité et des membres du parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), reproche aux deux responsables politiques leurs liens présumés avec le PKK, selon l’agence de presse progouvernementale Anadolu.
Juste avant d’être arrêté, Selahattin Demirtas écrivait sur son compte Twitter : « Les policiers sont devant ma porte, ils ont l’autorisation de m’arrêter par la force ».
Diyarbakırda evimde zorla gözaltına alınma kararı ile emniyet yetkilileri kapımdalar
— Selahattin Demirtaş (@hdpdemirtas) 3 novembre 2016
Neuf autres députés du HDP auraient été arrêtés. D’après les chaînes d’information NTV et CNN-Türk, d’autres parlementaires seraient également visés par un mandat d’arrêt. Le quartier général du HDP à Ankara a été perquisitionné, selon des images de la chaîne NTV. En mai dernier, le Parlement turc, sur ordre du gouvernement, avait fait voter la levée de l’immunité des députés menacés de poursuites judiciaires. Une mesure visant à préparer la répression du HDP.
C’est un nouveau coup de force contre la démocratie, déjà mal en point depuis la tentative de coup d’Etat en juillet dernier et la mise en place de l’état d’urgence. Déjà, deux maires de Diyarbakir avaient été placés en détention, une ville à majorité kurde. Toujours dans le sud-est du pays, 28 mairies HDP sont passées sous tutelle administrative.
Recep Erdogan, le président de la Turquie, s’est donc lancé dans une véritable chasse aux sorcières. Depuis le 15 juillet, les autorités turques ont déjà arrêté plus de 35.000 personnes soupçonnées de sympathie pour Fethullah Gülen, ancien proche d’Erdogan passé dans l’opposition qui est suspecté par le « Sultan » d’avoir organisé le putsch depuis son exil aux Etats-Unis.
Erdogan redoute que les Kurdes de Turquie ne revendiquent eux aussi leur autonomieMais la répression de s’arrête pas qu’aux gulenistes. Avec la création de fait, en Syrie, d’un territoire autonome kurde dans le nord du pays, grâce aux victoires répétées sur Daech des YPG, la branche armée du Parti kurde de l’union démocratique (PYD), Erdogan redoute plus que tout que les Kurdes de Turquie ne revendiquent eux aussi leur autonomie. Le président turc s’acharne donc sur cette minorité.
Un décret d’urgence a ainsi ordonné la fermeture de 10 journaux, deux agences de presse et trois magazines prokurdes. Le lundi 31 octobre, 16 mandats d’arrêt ont été lancés contre le quotidien d’opposition kémalistes Cumhuriyet. Murat Sabuncu, le rédacteur en chef, ainsi que le dessinateur Musa Kart, l’avocat du titre et plusieurs éditorialistes ont été arrêtés. Ils sont suspectés d’entretenir des liens avec le PKK.
Le 17 août dernier, la romancière Asli Erdoğan était elle aussi emprisonnée pour son soutien à la minorité kurde. Dans une lettre écrite depuis sa geôle, et publiée par Le Monde, elle écrit :
« Me voilà aujourd’hui en prison pour avoir cru à des mots tels que vérité et paix »
Le temps où Recep Erdogan, dans une volonté de rapprochement avec l’Union européenne, prônait la démocratisation de la Turquie, est définitivement révolu.
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