Après les magistrats et les footballeurs, la longue liste d'excuses que pourrait présenter Hollande

Le chef de l’Etat a dû écrire aux magistrats pour éteindre l’incendie déclenché par ses confidences aux auteurs du livre « Un président ne devrait pas dire ça… » et s’apprêterait à rencontrer le patron du foot français pour rattraper ses propos polémiques sur l’équipe de France. Mais s’il compte s’excuser auprès de tous ceux qu’il met en cause dans cet ouvrage, il y a de quoi remplir l’agenda présidentiel pour un bout de temps…

Un président ne devrait pas dire ça… sinon il devra s’excuser ! Le séisme déclenché par le livre rempli d’imprudentes confidences de François Hollande connaît des répliques qui n’en finissent pas. Sa petite phrase sur la justice, « une institution de lâcheté », l’a obligé à envoyer la semaine dernière une piteuse lettre d’excuses aux magistrats. Selon RTL, son entourage a demandé une rencontre à Noël Le Graët, le patron de la Fédération française de football (FFF), pour calmer le jeu après ses propos sur l’équipe de France et les footballeurs qui devraient prendre des cours de « musculation du cerveau »… François Hollande va-t-il donc tenter de rattraper chacune de ses petites phrases au vitriol ? Si l’on fait l’inventaire de tous ceux dont il dit du mal ou qu’il met dans l’embarras dans l’explosif ouvrage, il y a encore du boulot…

► Ayrault, « tellement loyal qu’il est inaudible ». Dans le livre, François Hollande raconte aux journalistes Gérard David et Fabrice Lhomme comment il a prémédité, dès l’automne 2013, le remplacement de Jean-Marc Ayrault par Manuel Valls à Matignon. « Il faut utiliser Ayrault jusqu’au bout, puis après en changer », assume-t-il cyniquement, en le jugeant « tellement loyal qu’il est inaudible ». « Il lui manque la part de rondeur, de légèreté, au sens de la capacité à faire un compliment, entraîner l’autre. Mais s’il avait tout ça, il serait président, il ne serait pas Premier ministre ! Si un Premier ministre est meilleur que le président, c’est un problème ! » s’esclaffe aussi le chef de l’Etat. Réponse glaciale de Jean-Marc Ayrault, cité par le Canard enchaîné : « Cela laissera des traces. On ne parle pas comme ça de ses ministres. »

► Bartolone, qui n’a « pas l’envergure » pour Matignon. Candidat pour remplacer Jean-Marc Ayrault en 2014, le président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone, a été écarté par Hollande. « Il n’a pas l’envergure », tranche-t-il devant les deux auteurs. Et puis, « il n’est pas très connu, et le jour où il le deviendrait, il n’a pas un charisme considérable ». La réaction de l’intéressé à ces amabilités a également filtré dans le Canard : « Si je n’ai pas la carrure, qu’il ne me demande plus rien. »

► Tsipras, l’homme qui aurait menti à son peuple. Le 9 juillet 2015, en pleine crise politico-financière grecque, François Hollande raconte aux auteurs un étonnant coup de fil de Vladimir Poutine trois jours plus tôt. « La Grèce nous a fait une demande d’imprimer les drachmes en Russie, car ils n’ont plus d’imprimerie pour le faire », lui a affirmé le président russe. Le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, aurait donc bien préparé un plan B de sortie de la Grèce de la zone euro, contrairement à ce qu’il a toujours soutenu. La confidence hollandaise a fait les gros titres en Grèce et plongé dans l’embarras Alexis Tsipras, qui a dû démentir.

► La Commission européenne et ses petits arrangements. De même, Hollande a-t-il vraiment bien fait de raconter sa négociation en coulisses avec la Commission européenne pour demander un report du fameux objectif de 3% de déficit public ? Car le chef de l’Etat le dit sans détour : en 2014 il a conclu avec Bruxelles « un contrat secret », selon ses termes, pour sauver les apparences. « La vérité, c’est qu’on est à un déficit plus élevé, et qu’ils savent très bien qu’on n’atteindra pas 3% en 2015 ! explique Hollande. Mais ils disent : “Nous on préfère que vous affichiez 3%, parce que ça nous permet de tenir avec les autres pays…” » Le président de la Commission d’alors, José Manuel Barroso, sera sans doute ravi de voir ses petites manœuvres ainsi révélées au grand jour.

► Les services de renseignement, dont Hollande raconte les petits secrets. Devant les deux journalistes, Hollande raconte par le menu certaines opérations menées par les services secrets, comme la libération ratée de l’agent Denis Allex, otage en Somalie, en janvier 2013. Surtout, il déclare avoir commandité des assassinats ciblés, ces fameuses « opérations Homo » couvertes par le plus grand secret. « J’en ai décidé quatre au moins », admet-il en octobre 2015, « mais d’autres présidents en ont fait davantage ». Se rend-il compte qu’il en a trop dit ? Un mois plus tard, Hollande relativise ses propos en affirmant que les opérations Homo, « c’est totalement fantasmé ». Trop tard. Interrogé sur ces confidences mardi, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, a eu cette réponse lapidaire : « Un président ne devrait pas dire ça… La réponse est dans le titre, c’est la seule chose intéressante du livre. »

► Obama le « lent » et ces Américains « arrogants ». « Obama, il est lent à prendre ses décisions », lâche François Hollande, amer après que son homologue américain a renoncé à le suivre pour frapper en Syrie à l’été 2013. Le président se demande aussi à haute voix « pourquoi les Etats-Unis n’ont pas envoyé une personnalité de plus grande envergure que le simple ministre de la justice » pour le défilé post-Charlie, en janvier 2015. Et il se fait encore moins diplomate lorsqu’il estime que « les Américains, quoi qu’ils fassent, ils sont arrogants. Toujours. Même dans leurs erreurs, finalement. » Elle sort quand, la traduction américaine du livre ?

► Nuit debout, qui est « un symptôme, pas un mouvement ». François Hollande trouve Nuit debout « sympathique », mais regarde de haut les manifestants qui ont occupé la place de la République au printemps 2016. « Cela reste des effectifs peu nombreux, 1.000 à 1.500 personnes chaque soir. Au théâtre, ils en font autant ! s’amuse-t-il. Donc c’est un symptôme, mais ce n’est pas un mouvement. » Pour lui, l’économiste Frédéric Lordon, l’un des gourous de Nuit debout, « a compris qu’avec peu de chose on pouvait faire trembler la planète médiatique. Très peu de chose… » De toute façon, Hollande n’a « jamais été tenté par les mouvements pseudo-spontanés »

► Morano, cette « Le Pen en plus maigre ». On avait dit pas le physique ! Pourtant, François Hollande ne peut pas s’en empêcher quand il parle de Nadine Morano : « Elle a un côté vulgaire, provoc. C’est une Le Pen en plus maigre ! » Evoquant les déclarations de l’eurodéputée sur la « race blanche », il poursuit : « Morano, je pense que c’est quelqu’un qui, comme un enfant, écoute les conversations des parents et les répète. » L’intéressée n’a pas réclamé d’excuses, sans doute trop heureuse de faire partie des cibles du chef de l’Etat.

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