Il faudra bien, un jour, se poser la question taboue de l’élection du président de la République au suffrage universel. Grâce à un statut de monarque républicain, ce dernier est doté de pouvoirs exorbitants qui écrasent tous les autres. Or ce n’est pas parce que les partis ne jouent plus leur rôle qu’il faut idéaliser la pratique du sauveur suprême. La démocratie, c’est le pouvoir du peuple, non le pouvoir d’un homme sur le peuple.
Quand Alain Juppé veut taper du poing sur la table, il prévient qu’il va le faire, histoire de s’assurer que la chose n’échappe pas aux électeurs fascinés par le coup de menton permanent cher à Sarkozy. Via une interview au Journal du dimanche, on a ainsi appris que le maire de Bordeaux se «lâchait», bref qu’il rechaussait les bottes dans lesquelles il se sentait droit, jadis. Il était déjà ministre (du Budget), à l’époque où l’Union soviétique était encore de ce monde, ce qui en dit long sur le renouvellement des élites.
Quel exemple de sa poigne décomplexée met donc en avant Alain Juppé ? Le gouvernement par ordonnances, afin de passer par-dessus la tête des députés, au cas où ces derniers prétendraient avoir quelque avis sur les sujets concernés. En digne descendant de Vercingétorix (quoi qu’en dise Sarkozix), il annonce qu’il foncera comme un Gaulois à l’assaut d’une légion romaine : «J’élaborerai une série de textes, une loi d’habilitation autorisant le gouvernement à légiférer par ordonnances, avec cinq ou six ordonnances sur des sujets essentiels et urgents.» Et toc. Après le 49.3 du gouvernement Valls pour imposer la loi Travail, voilà le recours aux ordonnances prôné par un candidat qui s’inspire de la méthode Poutine. A ce compte, autant aller au bout de la logique et dissoudre le Parlement.
On en est là, avec la bonne conscience en prime et le sentiment que le peuple veut des dirigeants qui en aient (du courage) pour gouverner à la schlague. On va amuser la galerie avec des propositions de Bonaparte de sous-préfecture, alors que les Français ont de tout autres attentes, notamment en matière de démocratie.
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