Dans un livre à paraître le 12 octobre, l’essayiste et collaboratrice de « Marianne » Caroline Fourest défend notre modèle laïque trop souvent attaqué. Après les attentats de janvier 2015, Barack Obama vantait la supériorité de l’intégration « à l’américaine ». Autre front, en France, où certains groupes, sous couvert d’antiracisme, tentent aussi de saper ce fondement républicain. Extraits.
C’est une scène devenue récurrente sur nos plateaux de télévision. Une jeune femme présentée comme «musulmane apolitique», en réalité très militante et radicale, se lève face à un intellectuel, si possible juif, comme Alain Finkielkraut, pour dénoncer une forme de racisme spécifiquement français. A l’entendre, les musulmans de France seraient «quatre fois plus discriminés que les Noirs le sont aux Etats-Unis». Une statistique qui ne repose sur rien, sauf peut-être sur les chiffres délirants du CCIF. Et encore… Même en feignant de croire que toute mesure antiterroriste est en soi antimusulmane, on ne voit pas comment la France pourrait atteindre le degré de violence raciste envers les Noirs américains. C’est pourtant le refrain préféré des communautaristes – que la presse appelle parfois les «nouveaux antiracistes» pour les distinguer des antiracistes universalistes et laïques, qu’ils détestent et combattent.
Ces «nouveaux antiracistes» sont plutôt pro-islamistes, partisans de la concurrence victimaire entre les juifs et les Arabes ou les Noirs, parfois même racistes envers les juifs et méprisants envers les homosexuels. La plupart ont participé à la Marche de la dignité, ce grand rendez-vous des «nouveaux antiracistes». Aveuglée par la présence d’Angela Davis, la presse l’a couverte avec une incroyable complaisance. Il s’agissait en fait d’une marche très radicale, où l’on a fait siffler Charlie Hebdo et des intellectuels engagés contre l’intégrisme, le tout en brandissant une banderole plus que douteuse… Elle était censée montrer les visages des victimes de violences policières racistes. Sauf que parmi ces visages se trouvait celui d’un certain Bilal Bertrand Nzohabonayo. L’homme qui aurait crié «Allahou akbar» avant de blesser trois agents à Joué-lès-Tours en décembre 2014. La police l’a abattu en pensant éviter un carnage. Quelques jours avant son attaque, il avait affiché le drapeau noir de l’Etat islamique sur sa page Facebook. Mais pour la Marche de la dignité, pas de doute, c’est une bavure raciste. […].
Les «nouveaux antiracistes» sont surtout… les nouveaux racistes.Radicalement antilaïque et pro-islamiste, le mouvement des Indigènes de la République est né en réaction à la loi sur les signes religieux. Il considère que la France doit «interroger ses Lumières» et lutte, selon ses mots, «contre toutes les formes de domination impériale, coloniale et sioniste qui fondent la suprématie blanche à l’échelle internationale». […] Ils ont tweeté une étrange photo prise à Molenbeek le 19 mars 2016. Elle montre un jeune homme défiant d’un air menaçant un cordon de policiers… lequel tente alors de sécuriser l’arrestation de Salah Abdeslam, l’un des terroristes du 13 novembre. En dessous de la photo du jour, en soutien à ce jeune homme menaçant, le Parti des indigènes de la République a écrit : #Resistance. […] Les «nouveaux antiracistes» sont surtout… les nouveaux racistes.
Tenant fièrement la banderole de tête de la Marche de la dignité, la leader des Indigènes de la République, la sulfureuse Houria Bouteldja, s’est définitivement décrédibilisée en signant un livre accablant les Blancs, les juifs et nous. […] On y trouve ce passage gênant où l’auteur raconte son exultation en entendant Ahmadinejad déclarer à la tribune des Nations unies : «Il n’y a pas d’homosexuels en Iran.» «Je suis pétrifiée, explique-t-elle. Il y a des gens qui restent fascinés longtemps devant une œuvre d’art. Là, ça m’a fait pareil. Ahmadinejad, mon héros.» […] Mais la cible prioritaire d’Houria Bouteldja reste les féministes «blanches», entendez universalistes, dont elle se différencie en clamant : «Mon corps ne m’appartient pas. Aucun magistère ne me fera endosser un mot d’ordre conçu par et pour des féministes blanches.» […]
Ce livre, ahurissant de bout en bout, ne serait qu’une poussée vert-brun de plus, isolée et prêtant à sourire, s’il n’était pas signé d’une activiste ayant ses relais au sein de l’extrême gauche et de l’université, qui remercie en préambule plusieurs chercheurs du «réseau décolonial euro-américain», comme une «source d’espoir». Parmi eux, on trouve un dénommé Nordine Saïdi, l’un des agresseurs venus empêcher, avec une soixantaine de militants pro-islamistes, ma conférence-débat contre l’extrême droite à l’Université libre de Bruxelles, le 7 février 2012. Des consignes circulaient depuis plusieurs jours chez les Indigènes du Royaume, l’équivalent belge des Indigènes de la République, pour appeler à venir me «lapider» symboliquement afin de me faire payer mes positions critiques envers la burqa. Le clientélisme dangereux des élus locaux.
>> Génie de la laïcité, de Caroline Fourest, Grasset, 336 p., 20 €.
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