François Bayrou: "Les peuples ne rejettent pas l'UE en soi mais l'UE qui ne leur dit rien"

S’il ne reste qu’un Européen fervent, ce sera lui ! Dans une longue interview accordée à « Marianne » en kiosques cette semaine, François Bayrou fustige la « haute trahison » de Barroso recruté par Goldman Sachs. Il constate la coupure entre Bruxelles et les peuples mais elle ne lui semble pas inéluctable si les chefs d’Etat et de gouvernement font preuve de courage et non de démagogie. Extrait.

Marianne : En 2012, François Hollande a renoncé à renégocier le traité budgétaire européen. C’est devenu le péché originel de son quinquennat. Faut-il un nouveau traité ?

François Bayrou : Quiconque vous annonce un nouveau traité à court terme vous raconte des histoires. Une seule voie est possible : il faut partir du traité actuel et transformer par une pratique nouvelle les institutions en institutions démocratiques. Ce que les peuples rejettent, ce n’est pas l’euro, ni l’UE, c’est l’UE qui ne leur dit rien, qui décide à leur place sans qu’il y ait le moindre partage des décisions. Les dirigeants nationaux qui ont de fait la responsabilité politique principale dans les institutions de l’Union sont fautifs. Quand on est devant d’immenses questions historiques, on les partage avec les peuples ! Souvenez-vous du général de Gaulle quand il sort du commandement intégré de l’Otan en 1966 (avant que Nicolas Sarkozy ne nous y ramène), il tient une puissante conférence de presse et il explique aux Français les raisons de son choix. Les dirigeants européens doivent désormais assumer publiquement leurs réflexions et leurs débats sur les questions essentielles : la croissance, la protection contre les comportements de dumping, les migrations, la défense et la sécurité. Ces grandes questions politiques doivent être traitées comme telles. Ce sera probablement impossible dans le cadre des Vingt-Sept, il faut donc qu’elles le soient dans un cercle plus restreint, celui des pays qui ont l’euro en commun. Ainsi l’Union ne sera plus impuissante et enlisée : elle pourra avancer, même si c’est à des vitesses différentes.

« Quand on est devant d’immenses questions historiques, on les partage avec les peuples ! »
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D’anciens commissaires européens ont cédé au mélange des genres entre leurs fonctions et leurs affaires privées. Neelie Kroes n’est pas la seule à avoir succombé aux sirènes des grandes multinationales, sept anciens de la Commission Barroso sont dans une situation similaire…

C’est de la haute trahison que de porter atteinte à un idéal collectif pour un intérêt personnel, pour des raisons d’argent. Pour moi, il y a une obligation déontologique d’interdire à ceux qui ont exercé les plus hautes fonctions de se vendre à des grands intérêts privés qui concernent le domaine dont ils ont eu la charge. Il y a Barroso chez Goldman Sachs, et il y a aussi cette commissaire en charge de la lutte contre les émissions qui vient de se faire embaucher par Volkswagen. Cette idée de vendre des carnets d’adresses et la connaissance des mécanismes de décision acquis lors des responsabilités exercées est insupportable. C’est une trahison a posteriori qui dévalorise et délégitime l’action passée et l’institution. Ce mélange des genres est mortel ! La Commission et les institutions européennes peuvent ne pas s’en remettre ! Il est urgent d’adopter un règlement drastique et des sanctions à l’égard de tout manquement. Concernant le cas de Barroso, il suffit que la Commission et les Etats membres annoncent qu’ils refuseront toute relation avec Goldman Sachs tant que cette banque d’affaires continuera à s’adjoindre les services de l’ancien président de la Commission.

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