Affaire Bygmalion : notre démocratie ne doit pas tolérer le cas Sarkozy

Les affaires qui visent Nicolas Sarkozy, grâce à ce que la justice a découvert, ne peuvent être écartées du débat politique pour la primaire et plus généralement pour la présidentielle. Elles ne peuvent pas, non plus, demeurer dans la simple chronique des faits divers.

A part François Fillon, nul n’osait ces derniers temps évoquer le fardeau judiciaire qui accable Nicolas Sarkozy. Pudibonderie d’une classe politique où chacun à son lot de casseroles et bienveillance de commentateurs peu enclins à mêler la morale à la politique ? Toujours est-il que l’ancien président semblait pouvoir mener campagne sans être renvoyé aux multiples soupçons et mises en examen. Mais le réel a fini par supplanter le monde sans juge rêvé par Sarkozy.

Suivant les conclusions de l’enquête menée par la police et les juges d’instruction, le parquet de Paris a demandé son renvoi devant un tribunal correctionnel. C’est lui qui dira in fine s’il est coupable ou innocent…

En attendant il y a des faits et une interrogation politique majeure.

Les faits, d’une simplicité enfantine, sont à peine contestés : en 2012, les frais de campagne de Nicolas Sarkozy ont dépassé le plafond fixé par loi de plus de… 23 millions d’euros ! Non seulement il ne pouvait ignorer les dépenses fastueuses de chaque meeting mais le procureur considère qu’il était le « donneur d’ordre » de l’arnaque. Il est donc aujourd’hui le premier responsable présumé d’une fraude à la loi électorale inédite. Le reste n’est que glose. La pathétique défense de l’avocat de l’ancien président invoquant on ne sait trop quel « mépris du code procédure pénale» ou les saillies de quelques sarkozystes évoquant une improbable manipulation pour détourner l’opinion de l’affaire Cahuzac ne peuvent prêter qu’à rire…ou à pleurer.

L’interrogation politique est d’une autre importance. Comment notre démocratie peut-elle sans barguigner le moins du monde tolérer qu’un ancien Président, à nouveau prétendant à la magistrature suprême se présente devant les citoyens en étant suspecté d’une telle tricherie ? Peut-il sérieusement prétendre être le garant de l’autorité de l’Etat et des lois de la République en étant lui-même accusé de ne pas les respecter ? D’autant que Nicolas Sarkozy, outre l’histoire Bygmalion est menacé d’être renvoyé devant un autre tribunal pour avoir voulu corrompre un haut magistrat afin d’obtenir des documents confidentiels (l’affaire des écoutes)…

Ces affaires doivent être au coeur du débatCes affaires, grâce à ce que la justice a découvert, ne peuvent être écartées du débat politique pour la primaire et plus généralement pour la présidentielle. Elles ne peuvent pas, non plus, demeurer dans la simple chronique des faits divers. Elles doivent être au cœur du débat, d’une part parce qu’elles révèlent une pratique ancienne du pouvoir de l’ancien président et qu’elles entretiennent le plus grand doute quant à sa qualité pour l’exercer à nouveau. Imagine-t-on un banquier accusé d’avoir puisé dans la caisse, poursuivre la gestion des fonds de son établissement ou Karim Benzema, suspect d’avoir participé à un chantage contre un ancien collègue, rejouer avec l’équipe de France ?

La décence, l’éthique sans parler de morale, voudrait que Nicolas Sarkozy demande au plus vite l’organisation d’un procès dont il n’a rien à craindre à craindre puisqu’il est innocent… Or chacun sait qu’avec ses avocats il mettra tout en œuvre pour repousser les échéances judiciaires, en espérant qu’en novembre puis en mai les citoyens lui offriront cinq années d’immunité supplémentaires.

La situation judiciaire de Nicolas Sarkozy candidat à l’Elysée, ne doit être éludée ni par les candidats à la primaire de la droite et du centre, ni par les commentateurs. Elle doit même être discutée comme un préalable aux prochaines joutes électorales. Parce que le problème politique, judiciaire et médiatique posé est essentiel pour ce qui reste de crédibilité à notre classe politique.

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