Le Mont-Saint-Michel en eaux troubles

Rendre à la mer ce site d’une renommée planétaire ? Le projet, ambitieux, était supposé attirer davantage de touristes. Il produit l’effet inverse, pour le plus grand malheur des commerçants locaux, qui enragent. Et règlent leurs comptes sur fond de rivalités ancestrales.

Au Louvre, vous êtes sûrs de trouver la Joconde. Au château de Versailles, la galerie des Glaces. Mais voir le Mont-Saint-Michel au milieu des flots n’est pas garanti sur facture. C’est pourtant ce que vantent, depuis la fin des travaux de désensablement de la baie en 2014, les innombrables livres, brochures et photos sur le rocher le plus arpenté de France (2,3 millions de visiteurs l’an dernier), classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Plus percutant que l’expression technocratique consacrée – le «rétablissement du caractère maritime du Mont-Saint-Michel» -, les vendeurs de boules à neige, à l’unisson des politiques locaux et nationaux, débitent aujourd’hui le même slogan marketing : « Le Mont est redevenu une île ! » François Hollande, en visite inaugurale il y a neuf mois, n’a pas dit autre chose : « Aujourd’hui, le Mont- Saint-Michel a été rendu à la mer. La nature, grâce à l’homme, a retrouvé ses droits. »

Un battage qui fait sourire Romain Pilon. Enfant du pays et guide assermenté dans la baie, il promène depuis quinze ans, en français, anglais et swahili – un legs de ses années de safari, en Tanzanie -, les marcheurs venus découvrir la faune et la flore de cette frontière naturelle entre Bretagne et Normandie. « Les travaux ont commencé en 2006, rappelle-t-il. Et, par un hasard extraordinaire, ils ont été achevés officiellement en 2015, pile pour les marées du siècle… » Lesquelles, comme prévu, ont redonné au Mont, l’espace de quelques heures, ce caractère insulaire qu’il avait perdu depuis 1879 avec la construction de la digue goudronnée menant aux remparts puis, plus tard, avec la création d’un immense parking à l’entrée de la forteresse.


Seuls un grand coefficient de marée et une crue importante permettent au Mont d’être entouré d’eau. – via Wikipédia commons

Le spectacle tant attendu valait le détour. L’abbaye bénédictine fondée au Xe siècle s’est détachée des contingences terrestres. Des kayaks ont fait le tour de la « Merveille de l’Occident », sous l’œil de milliers de  badauds massés sur le pont-passerelle flambant neuf et submergé à son extrémité par les vagues. Le hic, c’est que les « marées du siècle » ne se produisent pas tous les quatre matins, ni tous les cent ans, mais tous les dix-huit ans. Autant dire, pas demain… A défaut de vives-eaux exceptionnelles, les conditions pour que le Mont soit ceinturé d’eau, même superficiellement sur l’esplanade bétonnée où débarquent à présent les touristes, sont strictes : une hauteur en pleine mer de 12,85 m au moins et un coefficient de marée supérieur ou égal à 110. En 2016, ces deux phénomènes ne seront réunis qu’une vingtaine de jours. Et deux jours seulement l’an prochain, les 27 et 28 avril, si l’on en croit le calendrier fourni par l’office du tourisme. N’en déplaise à l’archange Michel, l’île promise sur la carte postale est diaboliquement survendue…

Pis : d’après les observations de Romain Pilon, ce chantier de 220 millions d’euros, payé à 40 % par l’Etat et presque autant par les collectivités locales (régions et départements), montrerait déjà ses limites. Le nouveau barrage construit sur le Couesnon, le fleuve qui se jette dans la baie, et dont les lâchers d’eau repoussent les sédiments qui s’y accumulaient, a bien un effet «balayette» au nord du Mont. Mais, au sud, aux abords du pont-passerelle et de l’esplanade piétonne, « les herbus commencent déjà à réapparaître, constate notre guide. Les travaux n’ont fait que retarder l’échéance. Si on avait vraiment voulu lutter contre l’avancée de la terre sur la mer, il aurait fallu arrêter bien plus tôt l’extension des polders autour du rocher« , ces espaces conquis sur la Manche où paissent les fameux agneaux de prés salés. Sauf qu’aucun élu local ne s’est jamais risqué à affronter le lobby paysan.

Des décennies de palabres

Qui a eu cette idée folle d’annexer la mer ? Pas Charlemagne, mais un autre empereur. En 1856, Napoléon III signe un décret autorisant la création de 3 000 ha de polders autour du Mont. Les terres
gagnées sur le rivage sont fertiles mais l’Etat n’a pas les moyens de financer cette révolution agricole. Il accorde donc une concession, moyennant redevance, à la Compagnie des polders de l’Ouest. A l’époque, faute de route le reliant au continent, le Mont-Saint-Michel est une île à marée haute, et une presqu’île à marée basse. Les traversées sont périlleuses car l’eau remonte vite sur les grèves, « à la vitesse d’un cheval au galop« , disait Victor Hugo. La construction d’une digue, inesthétique mais insubmersible, est décidée en 1874. L’administration des Beaux-Arts s’insurge contre cette défiguration du paysage mais elle ne pèse pas lourd face à celle des Ponts et Chaussées. Cinq ans plus tard, le Mont est relié à la terre ferme, à la grande joie des Montois, qui voient affluer les curieux et les pèlerins, à pied, à cheval ou en tramway.

Pour combler les appétits ouverts par l’excursion, Annette Poulard, cuisinière avisée, se lance dans l’omelette, un plat roboratif et facile à préparer les jours d’affluence. Le tourisme, florissant, devient la nouvelle religion des lieux, au détriment de toute réflexion environnementale. Car la digue, en bloquant le va-et-vient des marées, accélère autant, sinon plus, que les polders l’ensablement de la baie. En 1906, le conseil général de la Manche tire la sonnette d’alarme. Il réclame un percement de l’ouvrage, afin de permettre le passage des flots et « empêcher le colmatage de se produire jusqu’au Mont, auquel il faut conserver le charme de sa situation insulaire. »* Peine perdue. Il faudra attendre 1970 pour qu’une étude scientifique sérieuse, réalisée par le Laboratoire central d’hydraulique de France, préconise enfin le « rétablissement du caractère maritime » du Mont. Puis 1995, pour l’officialisation du projet par le gouvernement. Et 2006 encore, pour les premiers coups de pioche, qui conduiront au remplacement de la digue par un pont et au déplacement des parkings sur la terre ferme. Des décennies de palabres. Qui continuent d’échauffer les esprits.

« Les agriculteurs votent, pas les touristes »Eric Vannier, l’ancien maire divers droite – et richissime patron du groupe La Mère Poulard – aurait aimé aller plus vite. Dès le premier de ses quatre mandats, il a défendu sa « vision» »d’un Mont insulaire. Un dossier que cet ancien prince de la nuit parisienne (Les Bains-Douches, Le Palace), issu d’une famille montoise, pensait pouvoir boucler en cinq ou dix ans. Soit le délai qu’il lui avait fallu pour déposer la marque Mère Poulard, dont il avait acheté l’auberge, et la décliner, coup de génie, sur les paquets de biscuits qui ont fait sa fortune. Las : le temps de la politique n’est pas celui du business.

« J’ai été élu pour la première fois en 1983, raconte Vannier. Quelques mois plus tard, j’ai rencontré François Mitterrand. Il aimait beaucoup l’endroit et la puissance spirituelle qui s’en dégage. J’ai essayé de le convaincre de faire du désensablement du Mont l’un de ses grands travaux, comme la Pyramide du Louvre ou la Bibliothèque nationale de France. Il semblait intéressé. Mais je n’avais pas assez de relais à Paris, et ça ne s’est pas fait. Sans compter que mes collègues, ici, n’étaient pas très chauds pour remettre en cause les polders.

« Les agriculteurs votent, pas les touristes », me serinaient-ils. En 1993, peu avant la cohabitation, je suis allé voir un type promis à un bel avenir, Nicolas Sarkozy. C’est lui qui a obtenu d’Edouard Balladur, deux ans plus tard, l’engagement de l’Etat. Sauf que, en 2001, au moment où les choses commençaient enfin à bouger sur le plan technique et financier, j’ai perdu les municipales. L’équipe suivante, qui n’avait pas porté le projet, a enchaîné les conneries. Et, quand j’ai été réélu en 2008, le chantier était déjà commencé. »

C’est sans lui, également, qu’il se terminera. Condamné en première instance, puis en appel, pour prise illégale d’intérêts – le départ des navettes acheminant les touristes au Mont avait été fixé initialement, heureuse coïncidence, en face de deux hôtels-restaurants lui appartenant -, le « maire Poulard », comme l’appelaient ses administrés, a préféré se retirer de la vie politique en février 2014. « Sans moi, rien n’aurait été possible, conclut-il, amer, dans ses tristes bureaux du XVIe arrondissement de Paris. Même si je n’attendais pas des remerciements, je n’imaginais pas que mon histoire avec le Mont se finirait ainsi, sous les crachats. Tout ce granit, ces forces telluriques, ça rend fou à la longue. Il faut savoir s’en éloigner… »

3km à pieds qui effraient les touristes


Les commerçants se réunissent contre l’éloignement des parkings.-via Flickr
 

Dans l’imaginaire des continentaux, l’île est généralement perçue comme une échappatoire au consumérisme. Un havre de paix propice à l’ascèse. Un paradis perdu où les autochtones baigneraient dans une douce quiétude. Tout ce que le Mont-Saint-Michel n’est pas, et n’a jamais été. Midi, un jour ensoleillé de juillet, dans la rue principale du rocher. Large d’à peine deux mètres et raide comme la justice divine, l’artère est bondée de touristes qui battent le pavé pour monter à l’abbaye, ou en revenir. Un chemin de croix pour les béquilleux, conducteurs de poussettes, tireurs de valises à roulettes et autres damnés de la terre. En guise de stations, les boutiques de souvenirs dispensables – chapelets en plastique, couteaux à beurre faïencés, liqueurs douteuses, sabres japonisants (en plein Vigipirate), « désolé, madame, la carte Bleue, c’est 15 € » – alternent avec les tables astronomiques (38 € l’omelette-patates chez La Mère Poulard) et les hôtels biscornus. Seule une librairie religieuse, au terme de la grimpette, dénote par son humilité dans ce déluge de bimbeloterie. Jadis, on trouvait encore un marchand de journaux, une mercerie, une épicerie. Emportés par la lame de fond des sandwichs-frites.

A l’Auberge Saint-Pierre, trois étoiles, WiFi, 222 € le lit double, Patrick Gaulois, le « meilleur ennemi » d’Eric Vannier – son adversaire victorieux aux municipales de 2001 et l’instigateur du fameux procès qui a plombé sa fin de règne -, fait les comptes de la journée. Ils n’y sont pas. Christine, sa femme, montre le cahier de réservations : huit chambres inoccupées sur 21, en pleine saison. Madame tique, Monsieur tonne.

« Bien sûr, il y a le contexte terroriste, les contrôles, les militaires qui patrouillent pour la première fois ici, tout ça a fait fuir une partie de la clientèle, notamment étrangère. Mais comment voulez-vous que les gens aient envie de dormir sur le Mont quand ils doivent trimballer leurs bagages depuis les parkings, situés désormais à 3 km ? Il faut revoir de A à Z ce système aberrant de navettes, en associant enfin les petits patrons que nous sommes aux discussions ! »

En 2014, une union des commerçants, présidée par Christine Gaulois, a vu le jour. Un miracle, tant les rivalités familiales et les querelles de gros sous sont exacerbées sur cette microcommune de 4 km2. « Il y a 49 commerces dans le Mont-Saint-Michel, nous avons 26 adhérents, ce n’est pas si mal », juge la «petite patronne»… qui possède, en sus de l’Auberge Saint-Pierre, cinq autres affaires dans la rue, un manoir de charme à proximité de la baie et plusieurs hôtels à Saint-Malo. Avec Eric Vannier, les Gaulois captent 80 % de la manne touristique intra-muros. Vu leur passif commun, on comprend aisément que la vingtaine d’établissements aux couleurs de la Mère Poulard n’aient pas rejoint la jeune association. « Vannier et moi, on est un peu les Don Camillo et Peppone du Mont, s’esclaffe Patrick Gaulois. Il mélangeait un peu trop les genres mais c’était un type intelligent, ça manque par ici…« 

« On a perdu tous les locaux »A la Caserne, le lieu-dit de l’autre côté du pont, à proximité des parkings, la guéguerre commerciale, pas moins féroce, oppose le même Eric Vannier – encore lui – à la Sodétour, un groupe contrôlé depuis un demi-siècle par plusieurs familles montoises. Quatre hôtels, trois restaurants, trois campings, des prix plus sages qu’au pied de l’abbaye et un président, Gilles Gohier, qui se refuse à débiner la concurrence. On s’étonne. « Je suis rennais, pas montois. Et je ne suis là que depuis cinq ans. » Affable et pesant ses mots, le patron de la Sodétour en convient : le ravissement architectural n’est pas la qualité première de cette zone tampon entre le Mont et les caisses automatiques. Bâtiments sans charme des années 70, pelouses pelées : l’endroit, malgré la cinquantaine d’arbres plantés l’an dernier, tient plus de l’aire d’autoroute que du joli village normand, les voitures en moins. Des voitures que Gilles Gohier aimerait voir plus souvent garées devant ses établissements : « Si quelqu’un de la région veut déjeuner chez nous sans passer par le parking, il doit payer 4 €. C’est le prix que le gestionnaire du stationnement, Transdev, lui facture pour accéder à la Caserne. Avant, c’était gratuit. Résultat des courses : on a perdu tous les locaux. Dont on aurait bien besoin aujourd’hui pour compenser la désertion des Japonais et des Américains. »

Le « flop » des navettes

Transdev… L’autre nom de Belzébuth pour tous les commerçants et habitants du coin. Pas une conversation sans que le nom de l’ancienne filiale malade de Veolia, soutenue à bout de bras par la Caisse des dépôts, ne revienne sur le tapis. C’est à elle que les autorités, soucieuses d’alléger de 24 millions d’euros la facture des travaux, ont confié une délégation de service public pour la construction et l’exploitation des nouveaux parkings. Riche idée : depuis leur mise en service en 2012, c’est un festival de couacs. A l’origine, l’opérateur de transports avait prévu de convoyer les touristes jusqu’à la «Merveille» par des navettes (gratuites), non pas depuis les parkings (payants), mais depuis l’extrémité du pont-passerelle. Deux à trois kilomètres à pied aller-retour, en plus de l’ascension du Mont : les touristes ont boudé, la fréquentation a chuté et les professionnels sont sortis de leurs gonds.

Devant la bronca, Transdev a revu ses plans et rapproché des parkings le point de départ des navettes. Mais pas à l’œil : le forfait de stationnement a bondi de 8,50 € à 11,70 € et grimpe même à 23,40 € en cas de perte du ticket. Une hausse censée financer l’achat de navettes supplémentaires, pour accélérer les rotations. Avec leur placage en bois, ces bus customisés, qui circulent de 7 h 30 à 1 heure, ont plutôt belle allure. Sauf qu’ils roulent au diesel (une aberration dans un site naturel classé), ne transportent pas assez de passagers par rapport au cahier des charges (88 au maximum au lieu de 100) et pouvaient tout juste se croiser sur le pont-passerelle avant que la pose en urgence de rétroviseurs rabattables n’offre un peu de sécurité aux chauffeurs…


Les cyclistes doivent laisser leurs vélo à l’entrée du pont ou marcher à côté.-via Flickr

Pour varier les plaisirs, Transdev avait également prévu des navettes de 50 places à deux étages, les «maringotes», tirées par des chevaux. Nouveau flop : les six exemplaires, non conformes aux normes de sécurité, ont été mis au rencart avant le premier trot, remplacés par de banales calèches. Les vélos ne sont pas mieux lotis. Ville de départ du dernier Tour de France, le Mont-Saint-Michel n’aime pas les cyclistes, obligés de laisser leurs engins à l’entrée du pont-passerelle et d’effectuer la traversée à pied (cinquante minutes) ou en navette. Seuls les résidents peuvent accéder chez eux en deux-roues. Mais en se faufilant sur le trottoir, au milieu des piétons, car la chaussée leur est interdite. « C’est quand même fou qu’on ne puisse pas aller et venir sur l’unique voie qui mène à notre maison par le moyen de notre choix, écolo en plus« , s’emporte Jean-Yves Lebrec, l’un des 29 habitants du Mont, qui conteste en justice, pour l’heure sans succès, les arrêtés municipaux félons.

Ce VTTiste en colère n’est pas le seul à ferrailler. Au rayon des spécialités montoises, le contentieux judiciaire est en passe de détrôner la galette. En novembre dernier, après une décision du tribunal administratif de Caen sanctionnant sa gourmandise tarifaire, Transdev a fait savoir qu’il ne pouvait envisager plus longtemps d’assurer « un service structurellement déficitaire » et souhaitait renégocier l’ensemble du contrat signé avec le syndicat mixte du Mont-Saint-Michel, le maître d’ouvrage de l’opération insulaire. Ce dernier devant être prochainement dissous, toutes les huiles locales planchent depuis des mois sur la future «gouvernance» du site. Qu’on espère pacifiée.

C’est mal parti… La région Bretagne veut se retirer du jeu et couper ses crédits, alors que Saint-Malo et Cancale profitent à plein de l’attractivité du Mont, rattaché, lui, à la Normandie. L’Etat, propriétaire de 80 % du bâti sur le rocher, via le Centre des monuments nationaux, est prêt à assurer les fins de mois mais pas plus. Quant à la commune, qui a perdu sa redevance sur les parkings, elle n’a plus un sou vaillant. Un sac de nœuds tel que Manuel Valls, en déplacement il y a quelques mois au Mont, s’est empressé de nommer une énième mission d’étude sur le sujet. « C’est à l’Etat de gérer et payer tout ça, lâche Yan Galton, le nouveau maire du Mont depuis deux ans. Moi, je n’ai pas l’argent. Et, quand je lance des travaux indispensables, comme le remplacement des câbles électriques souterrains, dont certains dataient quand même de 1913, les commerçants me tombent dessus et exigent d’être indemnisés parce que le chantier va faire baisser pendant trois mois leur précieux chiffre d’affaires ! J’ai 70 ans, je ne voulais pas être maire mais il en fallait un. Franchement, j’aimerais mieux m’occuper de mes petites-filles. C’est pas l’île aux enfants, ici, c’est l’île aux emmerdes. »

*Cité dans Histoire et guide du nouveau Mont-Saint-Michel, de Jean-Marie Vannier, éditions Eurocibles, 26 €.

 

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