Jean Lassalle va quitter le MoDem pour marcher vers 2017

INFO MARIANNE – Après avoir parcouru la France à pied en 2013, le député des Pyrénées-Atlantiques prépare une candidature « non partisane » à la présidentielle. Et annonce par conséquent à « Marianne » qu’il se met « en congé du MoDem ». Une façon d’acter son désaccord avec son ami de 40 ans, François Bayrou… Rencontre avec un élu brut de décoffrage.

Dans les couloirs de l’Assemblée nationale, son accent du Sud-Ouest à couper au couteau détend l’atmosphère feutrée. Quand Jean Lassalle approche, ça s’entend. Le député des Pyrénées-Atlantiques salue chacun, s’extasie d’un rien, donne son avis sur tout. Quinze ans qu’il fait partie du paysage au Palais-Bourbon, où il s’est illustré par quelques coups d’éclat. On retiendra sa grève de la faim contre la délocalisation d’une usine en 2006, des interventions qui ont fait rire aux larmes ses collègues mais aussi, sa marche à travers la France en 2013. Six mille kilomètres à pieds pour recueillir les « cahiers de l’espoir » de ses concitoyens en colère.

Pourtant, aujourd’hui, l’atypique député songe à une démarche on ne peut plus classique : se présenter à l’élection présidentielle, « le dernier rendez-vous auquel les Français croient encore un tout petit peu ». Il l’a déjà lâché à demi-mot, au micro de Public Sénat. En recevant Marianne dans son bureau de l’Assemblée, jeudi 10 mars, Jean Lassalle se garde bien de toute déclaration officielle, mais sa résolution est prise. « Je pose un acte et si je sens qu’il trouve un écho, je l’incarnerai et je serai candidat à la magistrature suprême », déclame-t-il, un peu grandiloquent.

Lassalle fustige ces partis « vétustes, complètement dépassés »

« Notre pays est au bord de la révolution, peut-être même de la guerre civile, tellement les raisons de s’affronter se croisent », s’inquiète Jean Lassalle. « On détruit jour après jour les services publics, qui affirmaient le triptyque liberté-égalité-fraternité. Notre industrie est à terre, notre agriculture est flinguée jour après jour dans le silence des agneaux. Nous n’avons plus d’artisanat. » Le constat est devenu classique mais lui a été aux avant-postes pour s’en rendre compte. Au cours de sa marche, il a observé en direct le rejet de ces partis « vétustes, complètement dépassés » et de ce système « cadenassé ».

Pourtant, Jean Lassalle est membre d’un parti, le Mouvement démocrate (MoDem) de François Bayrou, dont il est même le vice-président. Alors, pour lever la contradiction, il choisit de couper le cordon. « La démarche que j’engage est non partisane. Maintenant, je dois le dire clairement : je me mets en congé du MoDem », nous annonce-t-il. Une décision qui acte, de fait, la rupture avec son ami du Béarn, François Bayrou. Jean Lassalle est l’un des plus anciens compagnons de route du patron du MoDem mais aujourd’hui, il n’y croit plus. Quand il en parle, son visage se referme, son regard se perd dans le vague. « J’ai été son complice, son petit frère », souffle-t-il. « Je ne voudrais pas qu’il le prenne mal… » Trop tard. Le 3 mars sur BFMTV, Bayrou a sèchement désavoué sa démarche présidentielle en assénant, martial, que « le démon de la politique, c’est la division ».

Avec François Bayrou à Pau, en avril 2015. Les ambitions de Jean Lassalle viennent refroidir les relations de ces deux amis de très longue date. – FOURCADE FERNAND/SIPA

« Mon attitude est de nature à l’agacer. Il ne doit pas forcément tout comprendre. Après, moi, je n’ai pas compris non plus pourquoi j’ai été évincé de la candidature à la grande région Aquitaine », lâche Jean Lassalle. Aux régionales de décembre 2015, il se serait bien vu conduire à nouveau une liste MoDem mais François Bayrou a douché ses ambitions en concluant une alliance avec Alain Juppé. A l’origine de cette brouille, il y a aussi un désaccord de fond : Jean Lassalle ne partage pas le ralliement de François Bayrou au maire de Bordeaux, candidat à la primaire de la droite. Mais il fait mine de croire que tout n’est pas fini : « Rien ne pourra jamais détruire notre relation exceptionnelle. Ma démarche n’exclut nullement François. Quand il en aura fini avec Alain, il pourra me rejoindre… »

En attendant, il est bien seul dans son aventure. Pas de parti ? Pas d’argent ? Jean Lassalle assume. Il vante une démarche « très participative » qu’il compte engager sur les réseaux sociaux dans les prochaines semaines. Son programme, c’est justement qu’il n’a pas de programme ! « On ne peut plus vendre aux Français des projets auxquels ils ne sont absolument pas associés », s’agace-t-il. Le député veut d’abord « faire un état des lieux » car « ce pays a besoin de dire lui-même comment il se sent ». Surtout, il souhaite que ses concitoyens lui fassent remonter eux-mêmes leurs solutions : « S’il y en a qui ont des idées pour réinventer un modèle européen, régler le problème des immigrés qui s’échouent sur nos côtes ou arrêter le saccage de notre organisation territoriale, qu’ils viennent me voir. » Avis aux amateurs.

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