Dans son vibrant plaidoyer en faveur de l’entreprise Heetch (actuellement en procès) ce jeudi matin sur France Info, l’un des rédacteurs en chef du « Monde », Vincent Giret, a oublié de préciser un léger détail : son journal et la start-up ont un actionnaire commun, un certain Xavier Niel.
Vincent Giret ne lit pas son journal. C’est dommage : il y trouverait matière à réflexion pour ses chroniques radio. Rédacteur en chef au Monde, l’intéressé officie sur France Info et livre, à l’heure du petit déj’, son « décryptage éco ». Ce jeudi 8 décembre, c’est à l’ouverture du procès intenté par plusieurs syndicats de taxis contre la start-up Heetch (un service de transport entre particuliers) que le « décrypteur » du Monde consacrait son billet. La veille, le même Monde avait posé les enjeux de ce procès, sobrement, factuellement, en détaillant les arguments des uns et des autres.
« Nous sommes une start-up issue de l’économie du partage qui met en relation, la nuit, des particuliers. Nous fonctionnons selon une logique de partage de frais », y expliquait Teddy Pellerin, le cofondateur de l’application. Le quotidien précisait ensuite :
« Le ministère public ainsi qu’une douzaine de syndicats et autres fédérations de taxis et plus d’un millier de taxis à titre individuel ne partagent pas cette analyse. Les deux actionnaires et la société sont accusés d’avoir organisé un système de mise en relation de clients avec des particuliers se livrant au transport routier de personnes à titre onéreux, d’avoir exercé illégalement l’activité d’exploitant de taxi et d’être coupables d’une pratique commerciale trompeuse. Ils risquent jusqu’à 300.000 euros d’amende et deux ans de prison. »
Pas rien. Sauf pour Vincent Giret, qui ne voit dans ce procès qu’une « affaire désolante et ubuesque », et déroule, en bon VRP de l’ubérisation de nos sociétés, le mémoire en défense de Heetch. Cette « petite entreprise », tonne-t-il, est « emblématique d’une économie collaborative dans ce qu’elle peut faire de plus vertueux : pratique, sociale, sans intermédiaires, porteuse de sécurité, de réassurance, bref rendant un vrai service aujourd’hui insatisfait. »
Sorti du lit par ce cri d’amour, l’auditeur de France Info remercie Vincent Giret de lui avoir ouvert les yeux sur cette nouvelle affaire Dreyfus. Le lecteur du Monde, lui, sait depuis la veille de quoi il retourne : Heetch est financée pour partie par le fonds Kima Ventures, qui « appartient à Xavier Niel, actionnaire à titre personnel du Monde. » Un – gros – détail que Vincent Giret, rédacteur en chef dudit journal, a curieusement omis de mentionner dans son vibrant plaidoyer sur la radio de service public. Décryptage, vraiment ? Ou enfumage ?
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