Dans un pilote de son émission controversée à (re)venir sur iTélé, Jean-Marc Morandini s’est livré à une leçon de journalisme à l’endroit de toute la profession, qui ne manque pas de sel quand on se remémore ses états de service…
Jean-Marc Morandini n’avale manifestement pas le traitement médiatique de ses affaires. Mis en cause cet été par une enquête du magazine Les Inrocks, puis mis en examen fin septembre pour « corruption de mineurs », l’animateur a fait face à la rentrée à une fronde de la rédaction d’iTélé qui s’opposait à sa mise à l’antenne pour une quotidienne sur la chaîne d’info. Après que Vincent Bolloré a gagné son bras de fer, et Morandini conservé son siège, un nouveau pilote de son émission Morandini Live a été tourné, révèle le site Les Jours.
Info Les Jours & @Garriberts : pendant que les deux tiers de la rédaction quittent @itele, Jean-Marc Morandini tourne un pilote… pic.twitter.com/dmOptrye89
— Les Jours (@Lesjoursfr) 2 décembre 2016
Par la même occasion a été dévoilée la leçon délivrée à la fin de ce pilote par l’amer Morandini à la presse :
« Dans une démocratie, il est important que les Français fassent confiance à leur presse, à leurs journalistes. Alors peut-être faut-il arrêter de vouloir jouer à Madame Soleil. Et si nous, les journalistes, on se contentait de dire ce que l’on sait, et non pas ce qu’on croit ? Les journalistes, c’est vrai, n’aiment pas se remettre en cause, n’aiment pas être critiqués. Alors, prudence car en démocratie, la presse doit être forte et pour que la presse soit forte, elle doit être crédible. C’est notre responsabilité. C’est mon avis. Et je le partage. »
Le problème, c’est que tout à sa posture de victime, Jean-Marc Morandini fait semblant d’ignorer que l’opposition suscitée par sa venue sur iTélé n’est pas née de ses déboires judiciaires, mais bien des compétences qu’il a démontrées en journalisme, justement, tout au long de sa carrière. Lesquelles pourraient inspirer la fameuse charte éthique réclamée à sa direction par la rédaction d’iTélé… ou pas. Voici quelques exemples de ces moments où Jean-Marc Morandini a incarné un journalisme vérifié, « fort », « crédible » :
Le 7 juillet 2009, Michael Jackson vient de mourir et les médias sont en boucle sur ses obsèques. Sur D8, dans l’émission qui porte son nom, Jean-Marc Morandini se branche aussi sur l’évènement, affichant à l’écran deux journalistes siglés « en direct de Los Angeles ». Sauf que Rue89 révèlera qu’ils se trouvaient en fait… dans un studio à Puteaux ! Le CSA intervient auprès de D8 pour lui rappeler ses obligations.
Nous sommes cette fois le 17 mai 2013. Sur NRJ12, Morandini présente cette fois l’émission Vous êtes en direct. Au vu de ses états de service sur D8, on peut s’attendre à tout. Eh bien ce qui devait arriver arrive, lorsque ce jour-là est diffusée une interview d’un acteur américain – Vin Diesel -, présentée comme diffusée en live alors qu’elle a été enregistrée quelques jours plus tôt. Ce qui vaudra à la chaîne une intervention du CSA.
Sept ans après l’affaire Jackson, Morandini présente le lundi 17 octobre dernier sur D8, devenue entre-temps C8, la première de son fameux Morandini Live. Toujours cette obsession affichée du direct, qui a bien du mal à se concrétiser… Car cette fois, l’animateur présente aux téléspectateurs une « spécialiste politique » de Los Angeles censée commenter, par téléphone, la campagne présidentielle américaine. Sauf que comme le relèvera BuzzFeed, la spécialiste en question est la fille de Rachel Bourlier, la chroniqueuse qui co-anime l’émission avec lui, qu’elle n’est pas spécialiste politique et qu’elle vit… à Londres ! Morandini plaidera une « erreur de synthé », ce qui ne fera pas échapper, encore, sa chaîne à une mise en demeure du CSA.
En 2012, c’est l’hebdomadaire Le Point qui relèvera une autre méthode du « journalisme » à la Morandini : le plagiat. Sur son site Internet sont en effet intégralement reproduits des articles du magazine signés Emmanuel Berretta, sans les sourcer. « Après plusieurs avertissements de notre part, Jean-Marc Morandini s’est entêté à pomper, pomper, pomper tel un Shadok seul sur sa planète », explique alors le journaliste. Finalement, Morandini sera condamné à 50.000 euros de dommages et intérêts, jugement qui sera confirmé en appel mais cassé en Cassation.
Sur l’affaire du plagiat du Point, Morandini reconnaîtra sans ambages, dans une interview à GQ donnée en 2015 : « Je dois avouer qu’au début, je n’étais pas du tout sensible à la notion de source. Mais je n’étais pas un as du Net, je ne voyais pas le problème. J’ai fini par réaliser que les gens y tenaient vraiment… » Si les gens tiennent à un peu de déontologie, alors, ça ne coûte pas plus cher…
Dans la même interview donnée à GQ, Morandini concède par ailleurs : « Quand je n’aime pas quelqu’un, je peux le dire sur le site. C’est aussi ça qui fait le succès. Et puis, c’est de la télé, ce n’est pas très sérieux tout ça. » Pas très sérieux, c’est lui qui l’a dit !
Finalement, là où Morandini incarne le journalisme le plus « fort », c’est encore quand il traite… de lui-même. Faisant fi de l’effet Inception, l’animateur multiplie en effet sur son site les articles relatifs à son propre cas – jamais rien de défavorable, rassurez-vous -, dont Buzzfeed a réalisé un florilège savoureux. Là, au moins, l’info est de première main. Quand à savoir si elle est de bonne fois… puisqu’il vous dit d’avoir confiance !
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