La ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, Laurence Rossignol, s’apprête à étendre le délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse aux sites internet qui, explique-t-elle, « trompent les internautes » et « cherchent à dissuader les femmes d’avorter ». Une mesure qui, malgré l’opposition de la droite, vient d’être adoptée par le Sénat ce mercredi 7 décembre.
« Plus personne ne s’enchaîne devant les hôpitaux. Les anti-IVG agissent désormais sur Internet… » Forte de ce constat, la ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, Laurence Rossignol, s’apprête à étendre le délit d’entrave aux sites internet qui « trompent les internautes » et « cherchent à dissuader les femmes d’avorter ». Si la mesure était votée dans le cadre d’un nouvel amendement apporté au projet de loi « égalité et citoyenneté » examiné par le Sénat à partir du mardi 4 octobre, une peine de deux ans de prison et 30.000 euros d’amende serait prononcée en cas d’entrave « numérique », soit les mêmes peines d’ores et déjà appliquées à l’entrave physique.
« Nous ne sommes pas contre l’existence de sites de propagande anti-IVG, précise toutefois Laurence Rossignol au Monde, nous souhaitons qu’ils cessent de se dissimuler et s’assument comme tels. » Sont notamment visés les sites qui apparaissent très haut dans les moteurs de recherche lorsqu’on souhaite s’informer sur l’avortement et qui cachent leur réel objectif anti-IVG, comme ivg.net, sosbebe.org, sosgrossesse.net ou encore afterbaiz.co, à propos duquel La Croix revient longuement ce mercredi 28 septembre, en cette journée mondiale du droit à l’avortement.
Animé par un certain Émile Duport, porte-parole des « Survivants », afterbaiz.com « renouvelle les codes de la lutte contre l’IVG », détaille le journal, avec « une charte graphique mordante », « l’utilisation des réseaux sociaux », et « des clips efficaces ». Il s’adresse aux jeunes filles qui souhaitent avorter pour les convaincre que ce n’est pas la solution, et tente de contrer ce qui est présenté comme de mauvais arguments (« Ce n’est pas le bon moment », « je ne me sens pas prête », « mon copain va me quitter », etc.). Le site ne cache toutefois pas le fait que l’avortement est un droit. Pourrait-il ainsi être considéré comme coupable de délit d’entrave ?
Où placer le curseur pour ne pas entraver la liberté d’expression ? La question fait justement débat, aussi bien parmi les associations catholiques que chez les universitaires. Parmi eux, Dominique Reynié, professeur à Sciences-Po. « Favorable » au droit à l’interruption volontaire de grossesse, « j’estime que la décision d’y recourir est d’une extrême gravité », écrit-il dans une tribune publiée ce mardi dans le Figaro, relevant entre autres que le site officiel du gouvernement (ivg.social-sante.gouv.fr) fait « totalement » l’impasse sur le respect de la neutralité en décourageant par exemple « la recherche d’informations alternatives. » Ce site a été lancé fin 2013 pour faire concurrence aux sites de propagande anti-IVG qui n’en portent pas le nom.
Pour Laurence Rossignol, qui a annoncé la mesure sur France Info le 17 septembre dernier, « on ne peut pas renvoyer le gouvernement et les anti-IVG dos à dos ». Et d’assurer, toujours dans le Monde, que « le gouvernement n’est pas pro-IVG (…) Il respecte le choix des femmes et leur permet de bénéficier de la loi ».
Créé en 1993, le délit d’entrave à l’IVG avait été élargi en 2014 à l’accès à l’information, mais il ne concerne pour l’instant que les hôpitaux.
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