A partir d’un socle commun, les finalistes de la primaire de la droite s’opposent surtout sur leur degré de libéralisme économique, quelques sujets de société et l’attitude envers la Russie dans le dossier syrien.
Fillon-Juppé, blanc bonnet et bonnet blanc ? Pas tout à fait. Si les points communs sont nombreux entre les programmes des deux ex de Matignon qui s’affronteront ce dimanche 27 novembre au deuxième tour de la primaire à droite, ils ne sont pas sur la même longueur d’onde sur tout. Ils auront d’ailleurs l’occasion de faire valoir leur différence lors du dernier débat télévisé de cette primaire, ce jeudi 24 novembre. D’ici là, revue de détail de leurs projets pour la France d’après 2017…
En bons candidats de la droite, Alain Juppé comme François Fillon affichent tous deux leur détermination à supprimer l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Dans les pas de Jacques Chirac, donc, qui avait supprimé en 1987 son frère aîné, l’impôt sur les grandes fortunes (IGF). Fait amusant : à l’époque, son ministre du Budget et porte-parole du gouvernement n’était autre qu’un certain… Alain Juppé (François Fillon, lui, était alors député). Par la suite, aucun gouvernement de droite n’osera finalement démettre l’ISF, rétabli sous sa forme actuelle en 1989 par Michel Rocard.
Au programme également des deux anciens premiers ministres, dans la plus pure doxa de la droite également : l’augmentation du plafonnement du quotient familial et la réduction progressive l’impôt sur les sociétés. En compensation de ces pertes pour les caisses de l’Etat – l’ISF rapporte notamment 5 milliards par an -, les deux rivaux se proposent de relever la TVA, payée par tous les consommateurs :
– de deux points pour Fillon (à 22%), afin de compenser la suppression de la cotisation salariale maladie
– d’un point pour Juppé (à 21%) pour compenser en partie la réduction des cotisations des entreprises destinées aux allocations familiales.
A respectivement 62 et 71 ans, François Fillon et Alain Juppé ne sont pas fatigués. Alors les Français… Surtout, ils tous deux ont une revanche à prendre sur ce dossier, après avoir chacun leur tour échoué à mener une réforme réglant définitivement le problème du financement des retraites, en 1995 pour Juppé et en 2003 pour Fillon. Cette fois, ils prévoient d’allonger l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 65 ans, Juppé précisant que cela interviendra d’ici à 2026.
Au passage, on relèvera qu’Alain Juppé touche sa retraite d’inspecteur des finances publiques depuis l’âge de 57 ans et demi (2003). François Fillon, lui, n’a jamais travaillé dans le privé ni dans la fonction publique.
Le mot d‘ »assistanat » n’est pas prononcé, mais son spectre plane sur cette campagne. Avec un concept en commun chez les deux rivaux : la dégressivité. Tous deux réduiront donc les allocations chômage, par une dégressivité dans le temps pour Juppé, un plafonnement et une dose de dégressivité pour Fillon. « Pour que le travail paie toujours plus que l’inactivité », indique le maire de Bordeaux.
Les deux veulent réduire les dépenses publiques, de 100 milliards d’euros en cinq ans pour Fillon, entre 85 et 100 milliards pour Juppé. Objectif affiché : le retour à l’équilibre budgétaire à la fin du quinquennat. Et un outil commun : la réduction du nombre de fonctionnaires (actuellement, la France compte 5,5 millions d’emplois publics). Mais ils divergent sur l’ampleur de cette baisse :
– de 500.000 en cinq ans grâce à l’augmentation du temps de travail des fonctionnaires à 39 heures pour Fillon
– de 200.000 à 300.000 en cinq ans grâce à des départs en retraite non remplacés pour Juppé.
A titre de comparaison, Nicolas Sarkozy n’était parvenu au cours de son quinqennat, avec sa fameuse Révision générale des politiques publiques (RGPP), à supprimer « que » 150.000 emplois.
Cette fois c’est promis, ils le feront ! Les fameuses 35 heures, meilleur ennemi de la droite depuis 2002 mais qu’elle n’a jamais supprimées entre 2007 et 2012, vivent leurs derniers moments si Juppé ou Fillon gagne en 2017. Les deux veulent en effet laisser aux entreprises le soin de négocier le temps de travail. Juppé maintient toutefois, à défaut d’accord, une durée légale à 39 heures, tandis que Fillon supprime cette notion dans le secteur privé, laissant juste dans la loi la limite légale européenne de 48 heures. Pour les fonctionnaires, ce sera retour aux 39 heures.
Les deux proposent des quotas d’immigration et une réforme du regroupement familial. Fillon propose que le droit du sol (un jeune étranger né et élevé en France devient Français à sa majorité) ne soit plus automatique : la nationalité ne serait accordée qu’à la demande du jeune. Juppé, lui, maintient le « droit du sol » automatique à condition qu’au moins un des parents ait été en situation régulière à la naissance de l’enfant.
Fillon veut supprimer l’aide médicale d’Etat (AME), destinée aux étrangers sans papiers, alors que Juppé veut la limiter aux cas d’urgence.
Après avoir changé d’avis sur le sujet, Alain Juppé a annoncé qu’il ne reviendrait pas sur la loi Taubira ouvrant le mariage et l’adoption aux homosexuels. François Fillon, lui, a promis à son électorat catholique la réécriture du volet adoption…
Que faire pour résoudre la situation catastrophique en Syrie ? C’est le point sur lequel les deux finalistes de la primaire à droite s’opposent le plus diamétralement. Partisan de la fin des sanctions économiques contre la Russie, Fillon estime qu’il n’y a pas « d’autre choix que de nous tourner vers les Russes et le régime syrien pour éradiquer les forces de l’Etat islamique ». Critiquant au contraire « la fuite en avant » de la Russie en Syrie, Juppé juge qu’il « n’y aura pas de retour à la paix en Syrie avec Bachar al-Assad ».
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