Retour, côté autorités, sur le déroulé de cette terrible nuit du 13 novembre 2015, quand des commandos de terroristes ont attaqué le Stade de France et le Bataclan à Paris.
13 novembre 2015. Le téléphone de Christophe Molmy, patron de la BRI, la force d’intervention de la police parisienne, bipe à 21h44. C’est un journaliste de Marianne (moi-même en l’occurrence) qui lui envoie un SMS : « Des tirs dans un resto à Paris ». Pas encore sur le pied de guerre, le commissaire est chez lui avec sa femme et leurs enfants, un œil sur le match de foot qui met aux prises la France avec l’Allemagne.
A peu près à la même heure, Jean-Michel Fauvergue, patron du RAID depuis avril 2013, dîne chez lui avec ses deux adjoints et leurs épouses. Leurs téléphones sonnent à peu près en même temps. Mobilisation générale. Pas question de se demander qui a la priorité pour traiter la crise. Aucune force ne sera de trop.
Jacques Meric, patron de la DSPAP, la direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne, est aussi chez lui, regardant distraitement le match de foot, rapporte un livre paru chez Plon (Les coulisses du 13 novembre, signé par Jean-Michel Decugis, François Malye et Jérôme Vincent), lorsque son chef de salle le prévient. Il appelle le procureur et le commissaire de permanence la nuit, Guillaume C, qui est le premier à entrer au Bataclan avec son fidèle conducteur, tandis que lui-même roule en direction du Stade de France. Le commissaire et son aide de camp pénètrent les premiers dans l’enceinte du Bataclan. Ils sortent tous les deux leur arme et tirent, six balles à eux deux, en direction du terroriste le plus visible, dont la ceinture d’explosifs se déclenche – il sera impossible, vu l’état du corps, de dire combien de balles l’ont vraiment atteint.
Les deux policiers, d’une remarquable retenue, seront discrètement décorés de la légion d’honneur, au mois de janvier, dans une salle de la Préfecture de police, par le président de la République, en présence de leurs familles respectives, en même temps que le policier de la BRI blessé à la main au moment de l’assaut. Par décret spécial, sans publication au journal officiel, pour préserver leur identité, mais nous n’en sommes pas là…
Dans cette nuit du 13 novembre, François Hollande décide de venir sur les lieux. Il arrive en même temps que le premier ministre, Manuel Valls, accompagné du ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, et de Christiane Taubira, ministre de la Justice. Il y a aussi Claude Bartolone, le président de l’Assemblée nationale.
Le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, a décoré l’après-midi même à Montrouge cet employé de la voirie qui avait stoppé dans son élan Amedy Coulibaly, alors qu’il venait de tuer une jeune policière stagiaire de 25 ans. Obsédé par la menace terroriste, il semble abasourdi. Christiane Taubira est muette. Manuel Valls très affecté. Selon les policiers qui leur font face, François Hollande « surnage ». « Est-ce que vous avez déjà vu ça ? », demande-t-il. « Ecoutez, monsieur le président, c’est un carnage », lui répond Jacques Méric, le patron de la police en tenue à Paris, arrivé sur les lieux à 22h22. « Est-ce que la salle était gardée ? », demande encore le chef de l’Etat. « Non ». « Je ne vous en fait pas le reproche, comprenez », embraye François Hollande, avant de demander : « Combien de morts y a-t-il selon vous ? » « Une centaine », répond le commissaire, qui est entré dans le Bataclan quelques minutes plus tôt, a commencé à compter, comme il l’avait fait lors de l’attaque contre Charlie Hebdo au début de l’année, avant de renoncer.
François Hollande, dans ce terrible contexte, est déjà dans l’après, tandis que Claude Bartolone lâche : « Mon Dieu, mais c’est une catastrophe ! » Le préfet de police de Paris, Michel Cadot, est sur les lieux également : il roulait vers Saint-Denis quand il a entendu qu’il y avait une fusillade rue Bichat. Le patron de la police judiciaire, Christian Saintes, est présent à ses côtés lorsque le patron de la BRI, Christophe Molmy, vient donner les premières informations : « On a établi un contact avec les terroristes. On ne peut pas négocier. C’est pas possible ». Le patron du RAID, Jean-Michel Fauvergue, est arrivé sur place lui aussi, avec ses hommes et ses médecins, qui entrent en action avec toutes les bonnes volontés… La tension est énorme parce qu’à cet instant, se souvient un responsable de la préfecture de police, « on se dit que ça peut claquer ailleurs, sur les Champs-Elysées, à la Tour Eiffel ». La suite, on la connaît…
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