« Manuel de libération », d’Alexander Kuznetsov, se veut un mode d’emploi à l’usage de ceux qui ont eu la malchance de se voir accoler un diagnostic de maladie mentale et abusivement interner.
Si Manuel de libération, d’Alexander Kuznetsov, ne ressemble à aucun documentaire russe contemporain, c’est sans doute parce qu’il s’achève sur un happy end. Et qu’il se veut un mode d’emploi à l’usage de ceux qui ont eu la malchance de se voir accoler un diagnostic de maladie mentale et abusivement interner.
Le film raconte le combat de deux jeunes filles, Ioulia et Katia, embastillées en hôpital psychiatrique depuis leur enfance, afin de recouvrer leurs droits civiques. L’action se déroule dans l’internat neuropsychiatrique de Tinskaya, une station de train située au km 3.699 de la magistrale transibérienne, c’est-à-dire au milieu de nulle part, au fin fonds de la Sibérie, à 400 km à l’est de Krasnoïarsk. Pourtant, on ne trouvera rien de sinistre dans cet environnement. Grâce à un personnage très atypique, Sergueï Yefremov, le directeur de l’internat. Surnommé « Papa », par ses 450 pensionnaires, ce miraculeux personnage a d’emblée ouvert l’internat sur le monde extérieur, raconte Alexander Kuznetsov, photographe de presse passé à la caméra par passion pour son sujet.
« Les portes sont ouvertes, les pensionnaires chantent et dansent et se produisent même à l’extérieur. On sent beaucoup d’amour », s’émerveille le cinéaste qui a prêté une caméra aux pensionnaires pour qu’elles lui confient leurs états d’âme. Kuznetsov a tourné son film sur une période de six ans – du premier passage de Ioulia devant les juges jusqu’à sa libération. Abandonnée à sa naissance, puis diagnostiquée « retardée mentale », Ioulia Danilouchkina, 34 ans, a passé sa vie en institutions. Encouragée par le directeur, elle a appris le métier de cuisinière et rêve d’une vie normale.
L’attitude de la juge lors de son premier procès puis le déroulement de son expertise légale constituent des scènes d’anthologie. Sa seconde tentative, six ans plus tard, sera la bonne. Tandis que sa copine, Katia Kasimova, 24 ans, abandonnée à 9 ans par sa mère à cause de ses fugues répétées, puis jugée schizophrène, se heurtera à un refus. Un film « métaphore de la Russie contemporaine », conclut Kuznetsov, qui estime qu’entre 15 et 20% des enfants internés le sont injustement.
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