Critiqués de toutes parts pour leur couverture de l’élection présidentielle, les médias américains vont sans doute entamer une période d’introspection. Le « New York Times », prestigieux quotidien de la côte est, fait lui d’ores et déjà son mea culpa.
Régulièrement mis en cause pour leur traitement de la campagne présidentielle, les médias américains qui ont dans leur très grande majorité appelé publiquement à voter en faveur de la candidate démocrate Hillary Clinton, déchantent. Avec la large victoire de Donald Trump ce mercredi 9 novembre, c’est tout leur système sophistiqué de datas et de sondages qui s’effondre. A longueur de semaines, les enquêtes d’opinions n’ont en effet cessé de donner Hillary Clinton gagnante avec un écart dépassant dans certains cas les dix points.
Conscient de la responsabilité qui lui incombe à présent pour avoir, comme les autres, nourri la machine sans jamais avoir cherché à la remettre en question, le New York Times, prestigieux quotidien de la côte est, s’interroge quelques heures à peine après l’annonce des résultats officiels et fait, en quelques sortes, un premier mea culpa. Car au-delà des seuls outils de mesure de l’opinion et de leur fiabilité, voire de la place qui leur est accordée, l’issue du scrutin révèle pour le quotidien un « échec » plus important encore, celui ne pas avoir su « capter la colère en ébullition » qui montait parmi ces électeurs laissés sur le carreau, « trahis par les deals » politico-économiques qui leur ont fait perdre leurs boulots, trahis et surtout « méprisés » par les élites de « Washington ».
Pourtant, poursuit le New York Times, les médias auraient pu à plusieurs reprises sentir les prémices du séisme. Citant le « Brexit » par exemple, en juin dernier. Ou même au niveau national, avec le succès fulgurant du Tea Party, faction ultra-conservatrice du parti républicain qui a émergé à la surprise – justement – de tous les observateurs en 2010, après la crise financière des subprimes. De ces signes, de cette colère qui gît dans les eaux profondes, en silence, au niveau des classes moyennes, chez ces électeurs « blancs » notamment, déclassés, endettés et qui ne parviennent parfois plus à se soigner ou à envoyer leurs enfants à l’école, les médias n’ont rien voulu voir.
Le journalisme tel qu’il est pratiqué aux Etats-Unis, pour tout un banc de la société américaine, en particulier celle qui a élu Donald Trump, est par conséquent « cassé », conclut le New York Times. Tout comme le sont les systèmes politique et économique en vigueur. Il faudra ainsi tout revoir. Y compris dans le fonctionnement des médias, y compris donc du New York Times. Il ne suffira pas ou plus d’envoyer une myriade de journalistes « couvrir sur le terrain », du nord au sud du pays, la colère de la population, conclut de fait le New York Times. Capter le mécontentement des gens, des sans-voix, relève en réalité « d’un état d’esprit », avec lequel l’aveuglement qui a jusqu’ici dominé dans la presse apparaît désormais définitivement incompatible…
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