« Marianne » est co-organisateur d’un colloque exceptionnel consacré aux « idiots utiles » de l’islamisme, qui se tient ce samedi 5 novembre à Paris. Le président du Comité laïcité République, Patrick Kessel, présente cette journée de travail.
Marianne : Comment va se dérouler le colloque du 5 novembre consacré aux « idiots utiles » ?
Patrick Kessel : « Les idiots utiles », dont le CLR, en partenariat avec la Licra et avec l’hebdomadaire Marianne, a décidé d’analyser le discours et l’idéologie, sont toutes celles et ceux qui, par aveuglement ou par complaisance, refusent de regarder en face l’islamisme, et de le combattre. L’islamisme ne bénéficie pas uniquement des soutiens actifs de ses militants ; il tire également parti de la lâcheté et de la bêtise de tous ceux qui, notamment à l’extrême droite et à l’extrême gauche du spectre politique, refusent de prendre au sérieux la menace qu’il constitue. Nous essayerons au cours de cette journée d’analyser toutes les modalités de leur dévoiement au travers d’une journée d’études scandées de diverses table-rondes : « la sociologie assassine », l’ essentialisation des identités religieuses », « comment le clientélisme nourrit l’islamisme », « A l’école des accommodements », ou encore « les médias malades de la bienpensance ». Cette journée au Palais–Bourbon va être le premier colloque d’ampleur consacré à ce sujet en France.
Pourquoi avoir dédié cette journée aux « idiots utiles » ? N’est-ce pas leur faire trop d’honneur ? Leur contribution à la confusion des esprits est-elle si importante ?
PK : Leurs amalgames sont, en effet, très nuisibles. Les « faux amis de la laïcité et idiots utiles » croient – ou feignent de croire – que ce ne sont pas les intégrismes religieux qui seraient en cause, mais un laïcisme intolérant, trop « rigide », trop « daté », car insuffisamment enclin aux « concessions ». Au nom de la diversité des croyances, ces faux amis de la laïcité rejettent la critique de pratiques liberticides comme le port de la burqa ou l’excision, et encouragent la diabolisation de notre seul véritable instrument de régulation du vivre-ensemble : la laïcité.
Pire, à l’instar de la philosophe américaine Martha Nussbaum ou encore, récemment, le New York Times dans sa polémique avec Manuel Valls, ils expliquent souvent que le vrai problème de la France, n’est pas la remise en cause violente de la laïcité, mais la laïcité elle-même. Selon ces beaux esprits, le respect de la neutralité de l’espace public ferait le lit des exclusions. C’est une complète inversion du sens que nous avons voulu dénoncer. Et qui n’est pas sans rappeler des attitudes de déni qui ont accompagné la montée des totalitarismes du XXe siècle. Rien n’est plus urgent pour des démocrates authentiques que de comprendre, d’analyser et de mesurer les conséquences d’un tel phénomène, qui multiplie les brouillages et les confusions dans un débat public déjà saturé par les amalgames.
Ces ennemis particulièrement retors se situent-ils aux deux extrémités du spectre politique ?
Il y a, en effet, une double tenaille d’idiotie utile qui pèse sur la laïcité. Du côté de l’ultra-gauche, la laïcité se trouve ainsi accusée d’être « colonialiste », « raciste », « islamophobe » dès lors qu’elle postule que la République garantit les mêmes droits et exige les mêmes devoirs de tous les citoyens, quelles que soient leurs appartenances religieuses ou philosophiques. La confusion est telle qu’un grand quotidien national a publié récemment une tribune d’un sociologue intitulée « Le fondamentalisme laïque menace la France » ! Quelques mois après les massacres de la barbarie à Charlie Hebdo, à l’Hyper-casher, au Bataclan, à Nice, le 14 juillet, voilà une bien terrible nouvelle version de l’arroseur-arrosé ! Alors qu’il s’agit de faire en sorte que l’islam, comme les autres religions, puisse être pratiqué dans le respect des lois de la République.
Et du côté de l’autre extrême ?
Du côté de l’extrême-droite, on a assisté à un véritable hold-up sur la laïcité. L’histoire témoigne que ce mouvement politique a toujours défendu une identité française bien peu laïque, blanche, catholique, apostolique et romaine. Il s’agit, en réclamant démagogiquement l’interdiction totale des signes religieux, de stigmatiser les musulmans, d’instrumentaliser les peurs pour récupérer l’électorat populaire. Et d’exercer une pression idéologique sur les partis conservateurs.
Entre les deux extrêmes, des intellectuels ont voulu affubler la laïcité de qualificatifs qui ne visaient qu’à la vider de sa substance. Ainsi fut-elle invitée à devenir « moderne », « nouvelle », « ouverte » et, plus récemment, « inclusive », « apaisée » voire même, « concordataire ». Un superbe oxymore papiste ! Perdre le sens des mots, c’est perdre sa capacité à penser librement, rappellera Charles Coutel pendant le colloque. Et sans pensée libre, la démocratie cède aux diktats de l’opinion. Nous y sommes. Le libéralisme se substitue à la liberté, l’équité à l’égalité, la charité à la solidarité, la différence à la singularité, le communautarisme à l’universalisme.
Colloque « Faux-amis de la laïcité et idiots utiles », samedi 5 novembre 2016 à Paris, parrainé par l’hebdomadaire Marianne
Si vous souhaitez assister à ce colloque organisé par, la Licra et le CLR, vous devez impérativement vous inscrire à l’adresse suivante : inscriptions.clr@laposte.net
Palais Bourbon
Salle Colbert
126, rue de l’Université
Métro Assemblée Nationale ou Invalides
Samedi 5 novembre 2016
9h – 16h30
Programme prévisionnel
9h – Accueil des participants
9h 20 – Ouverture par Jacqueline Costa-Lascoux
1ère Partie : Une analyse à plusieurs voix – Modérateur Jean-Pierre Sakoun
9h30 – Céline Pina : Comment le clientélisme nourrit l’islamisme dans certains territoires
9h50 – Joseph Macé-Scaron : L’essentialisation des identités ethniques et religieuses **** à l’universalisme.
10h10 – Alain Jakubowicz : Le « deux poids/deux mesures » et la théorie du complot.
2e partie : L’aveuglement et la haine de soi – Modérateur Jean-Pierre Sakoun
10h 30 – Jacqueline Costa-Lascoux : La jouissance du paternalisme
10h50 – Charles Coutel : La confusion commence par les mots
11h10 – Fatiha Boudjahlat : À l’école des accommodements
11h30 – Martine Gozlan : La sociologie assassine
Débat avec la salle
3e partie : La démocratie en balance – Modérateur Jean-Pierre Sakoun
14h00 – Brice Couturier : Les médias malades de la bien-pensance
14h20 – Chahla Chafiq : Les droits des femmes **** aux manipulations des mouvements identitaires
14h40 – Caroline Fourest : Les mauvais génies de la laïcité
15h00 – Mohamed Sifaoui : titre en attente
15h20 – Patrick Kessel : Les communautarismes contre les Droits de l’Homme et du Citoyen.
15h40 – Intervention de M. Gilles Clavreul, Délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme
Débat avec la salle
16h20 – Clôture par Patrick Kessel
• Fatiha BOUDJAHLAT, enseignante à Toulouse. Secrétaire Nationale du MRC en charge de l’Éducation, auteure de nombreux articles sur la laïcité.
• Chahla CHAFIQ : écrivaine et sociologue, auteure de Demande au miroir, L’Age d’Homme, 2015 ; Islam politique, sexe et genre, PUF. 2011
• Gilles CLAVREUL, Délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme.
• Jacqueline COSTA-LASCOUX : Directrice de recherche au CNRS, CEVIPOF, Sc. po Paris, auteure de L’humiliation, les jeunes dans la crise politique, L’Atelier, 2010 ; Le monde arabo-musulman dans les manuels scolaires français, UNESCO, 2011.
• Charles COUTEL, universitaire, va publier « Vous avez dit Laïcité » aux éditions du Cerf
• Brice COUTURIER : Éditorialiste, présentateur de la chronique quotidienne Le tour du monde des idées sur France Culture, collaborateur régulier de l’hebdomadaire Le Point
• Caroline FOUREST : Enseignante à Sc. po Paris, chroniqueuse à l’hebdomadaire Marianne, auteure de La tentation obscurantiste, Grasset, 2006 ; Le génie de la laïcité, Grasset, 2016
• Martine GOZLAN : Rédactrice en chef à l’hebdomadaire Marianne et essayiste
• Alain JAKUBOWICZ : Avocat, Président de la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme (Licra)
• Patrick KESSEL : Président du Comité Laïcité-République
• Joseph MACE-SCARON : Président du comité éditorial de l’hebdomadaire Marianne, essayiste et romancier, auteur de La Panique identitaire, Grasset, 2014
• Céline PINA : ex-Conseillère régionale PS d’Ile-de-France, auteure de Silence coupable, Kero, 2016
• Mohamed SIFAOUI : Journaliste, écrivain, réalisateur, auteur de Pourquoi l’islamisme séduit-il ? Paris, Armand Colin, coll. « Éléments de réponse », 2010
• Avec le concours du Comité Laïcité-République (CLR), de l’hebdomadaire Marianne, de la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme (Licra).
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