La purge se poursuit en Turquie avec l'arrestation du rédacteur en chef d'un journal d’opposition

Murat Sabuncu, rédacteur en chef du quotidien turc laïc Cumhuriyet, a été arrêté ce lundi 31 octobre lors d’une descente de police, au lendemain de la suspension de 10.000 fonctionnaires. Quatre mois après le coup d’Etat militaire manqué contre le président Erdogan, la Turquie poursuit tranquillement sa purge.

100.000 personnes limogées, 37.000 arrêtées… Les chiffres de la purge en Turquie, engagée par le président islamo-conservateur Erdogan en réaction au coup d’Etat manqué de juillet fomenté par une partie de l’armée, donnent le vertige. La presse turque, elle, subit une saignée sans précédent… Et, au lendemain de la suspension de 10.000 fonctionnaires accusés de liens avec le putsch raté, l’arrestation tôt ce lundi 31 octobre de Murat Sabuncu, rédacteur en chef du principal média d’opposition, ne présage rien de bon pour la liberté de la presse dans le pays. 

Ici, des images de l’arrestation tweetées par un journaliste du journal :

D’après la chaîne CNN Türk, l’homme à la tête du plus vieux journal du pays est visé par un mandat d’arrêt l’accusant d’avoir commis des crimes aux noms de la rébellion kurde, et du réseau de Fetullah Gülen, prédicateur musulman exilé aux Etats-Unis et désigné par Erdogan comme l’instigateur du putsch, le 15 juillet 2016. Douze autres personnes du journal ont également été placées en détention. Des perquisitions menées au domicile des journalistes ont abouti à la saisie de leurs ordinateurs personnels.

Une vidéo publiée ce matin sur le site de Cumhuriyet montre un des journalistes, âgé de 75 ans,  Aydin Engin, emmené de force par deux policiers en civil dans un hôpital pour examens médicaux… “Je travaille pour Cumhuriyet, n’est-ce pas suffisant ?” peut-on notamment l’entendre dire.

 

Can Dündar, finaliste du Prix Sakharov 2016, condamné en juin

Déjà, en mai 2016, son prédécesseur à la tête du journal, exilé depuis en Europe, Can Dündar, avait été condamné par contumace à 5 ans de prison ferme pour la publication de secrets d’Etat montrant l’implication de la Turquie aux côtés des rebelles islamistes combattant en Syrie. Selon ces documents, les services secrets turcs livraient par camions des armes aux groupes syriens affiliés à Al-Qaïda. Can Dündar figurait parmi les finalistes du Prix Sakharov 2016.   

Depuis juillet, toute personne suspectée d’être proche de Gülen, accusé d’avoir mis en place un “Etat parallèle” en Turquie infiltrant des pans entiers de la société, subit le courroux d’Ankara. Des centaines de médias ont été fermés et des dizaines de milliers de personnes arrêtées, limogés, condamnées, ou en passe de l’être. La rébellion menée par le Parti des travailleurs kurdes (PKK), interdit en Turquie et considéré comme groupe terroriste par l’Union européenne, est également réprimée dans le sang.

240 personnes sont mortes suite au coup d’Etat manqué de juillet. Mais depuis l’installation au pouvoir de l’AKP en 2002, le parti d’Erdogan, la presse turque n’a cessé de subir des pressions. Proportionnellement à son nombre d’habitants, la Turquie fait « honneur » à son titre de pays emprisonnant le plus de journalistes au monde

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