Nicolas Sarkozy a répété ce jeudi 27 octobre dans « Bourdin Direct » sur BFMTV et RMC avoir bénéficié de « cinq non-lieux » judiciaires depuis 2012. Le hic, c’est qu’il en invente…
C’est l’une des affirmations préférées de Nicolas Sarkozy en ce moment. Auto-proclamé justiciable « le plus interrogé » de France, l’ex-président de la République affirme avoir bénéficié de pas moins de cinq non-lieux judiciaires depuis quatre ans. Invité dans Bourdin Direct sur BFMTV et RMC ce jeudi 27 octobre, il a répété ce message : « Cela fait cinq dossiers où j’ai été interrogé, convoqué, où mon nom a été utilisé et où ça s’est terminé par un non-lieu« . De quoi nourrir l’argument d’un acharnement judiciaire brandie par le candidat à la primaire de la droite… Sauf que cette affirmation est fausse.
En fait, Nicolas Sarkozy considère qu’il bénéficie d’un non-lieu… chaque fois qu’il sort du bureau d’un juge sans être mis en examen ! Or, juridiquement, les choses sont un peu plus compliquées que cela… Un non-lieu judiciaire est prononcé lorsque le juge d’instruction considère ne pas disposer d’élements suffisants pour continuer des poursuites. Pour en bénéficier, il faut soit avoir été mis en examen au préalable, soit avoir été placé sous le statut de témoin assisté. Ce qui fait qu’en réalité, Nicolas Sarkozy a bénéficié de trois non-lieux depuis 2012. Pas cinq.
En octobre 2013, sa mise en examen dans l’affaire Bettencourt pour abus de confiance, abus de faiblesse et escroquerie s’est effectivement soldée par un premier non-lieu. Le deuxième a été prononcé en septembre 2015, dans le dossier du paiement de l’amende écopée par Nicolas Sarkozy après le refus de ses comptes de campagne par le Conseil constitutionnel. La justice s’interrogeait alors sur la légalité du « Sarkothon » qui a vu l’UMP régler en juillet 2013 la facture à la place de l’ancien Président, placé dans cette affaire sous le statut de témoin assisté. Les juges ont finalement prononcé un non-lieu général.
Dans l’affaire Karachi, portant sur des soupçons de versement de rétrocommissions dans le cadre d’une vente d’armes en échange d’un financement présumé illégal de la campagne présidentielle d’Edouard Balladur en 1995, Nicolas Sarkozy a bien bénéficié d’un troisième non-lieu… sur une branche mineure du dossier. En octobre 2013, il avait été entendu par les juges sous le statut de témoin assisté au sujet d’un communiqué de l’Elysée datant de septembre 2011, dans lequel il était affirmé que « le nom du chef de l’Etat n’apparaît dans aucun des éléments du dossier » Karachi. Cette information pouvait constituer une violation du secret de l’instruction. Les juges ont finalement rendu un non-lieu à ce sujet en août dernier. Une décision contestée par les parties civiles, qui ont fait appel.
L’ex-chef de l’Etat en conclut triomphalement sur l’affaire Karachi : « Pendant quinze ans, j’ai été accusé, poursuivi, c’est une affaire aujourd’hui terminée« . Ce qui est inexact. En juin 2014, les juges Renaud van Ruymbeeke et Roger Le Loire ont renvoyé le volet principal de l’affaire vers la Cour de Justice de la République (CJR), compétente pour juger les infractions commises par les ex-ministres dans le cadre de leurs fonctions. Au cours de l’enquête, ils ont d’ailleurs envisagé d’entendre Nicolas Sarkozy, qui avait été le ministre du Budget et le porte-parole d’Edouard Balladur. Ce qui sera peut-être le choix de la CJR. Nicolas Sarkozy a donc tort d’y voir un « non-lieu » supplémentaire.
Le dernier non-lieu évoqué n’existe tout bonnement pas. Dans le dossier dit « Air cocaïne », sur des soupçons d’abus de biens sociaux, les juges ont demandé la géolocalisation du téléphone portable de l’ex-président de LR et épluché ses fadettes. Sans rien, en effet, y trouver de probant. Mais il n’a jamais été mis en examen ni même interrogé sur cette affaire et ne peut donc se prévaloir d’un non-lieu. L’ex-président estime à tort que « c’est pareil« .
Surtout, l’ex-chef de l’Etat reste mis en examen dans deux affaires. Dans le dossier Bygmalion, où Nicolas Sarkozy considère à tort avoir avoir été dédouané : « J’ai été reçu, convoqué douze heures par le juge Tournaire (…) Au bout de douze heures, le juge Tournaire considère que je n’ai rien à voir dans les agissements de Bygmalion« . Et pour cause, le candidat à la primaire de la droite est en réalité mis en examen pour « financement illégal de campagne électorale ».
Enfin, l’ex-Président est également mis en examen dans l’affaire dite des « écoutes », où il est soupçonné d’avoir cherché à corrompre un magistrat de la Cour de cassation avec la complicité de son avocat. Dossier sur lequel Nicolas Sarkozy insiste beaucoup moins…
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