La Manif pour tous tente de ressusciter sur du vent

Le mouvement, né il y a quatre ans en réaction aux débats ayant mené à l’adoption de la loi sur le mariage pour tous en mai 2013, organise ce dimanche après-midi un nouveau rassemblement, à Paris. À quelques mois de la présidentielle, l’association veut se rappeler aux bons souvenirs des élus de droite et de participants à la primaire pas toujours prêts à assumer la radicalité des ouailles de Ludovine de la Rochère.

Deux ans. Cela faisait deux ans que serre-têtes, jupes plissées et pulls à col rond jetés sur chemisettes avaient déserté le pavé parisien. Mais l’odeur de la présidentielle de 2017 a le même effet sur les opposants au mariage homosexuel que le doux fumet du gigot du dimanche : elle ravive les passions.

Alors, La Manif pour tous sort l’artillerie lourde. Bien sûr, comme la Terre n’a pas brûlée dans les flammes de l’enfer après la célébration de quelques milliers de mariages homosexuels par an depuis 2013, l’association préfère insister sur d’autres chevaux de bataille : ce sera donc la procréaction médicalement assistée (PMA), la gestation pour autrui (GPA) et la « diffusion du genre à l’école ». Autant de vilenies prompts à « porter atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant » et à « déstabiliser la famille », selon la présidente de La Manif pour tous, Ludovine de la Rochère. Et tant pis si la PMA pour les couples de femmes n’existe nulle part dans la loi, si la GPA est interdite en France et si la théorie du genre n’existe pas. Ce qui intéresse La Manif pour tous, c’est de ramener les brebis égarées dans le droit chemin, et les élus de la République avec : « Tous les parlementaires, tous les dirigeants des principaux partis politiques ont été invités, ainsi que de nombreux élus locaux ».

À défaut d’entendre des voix, La Manif pour tous peut en distribuer
C’est là l’un des premiers objectifs du raout de ce dimanche : faire pression sur les candidats de droite à la présidentielle, en pleine primaire, et compter les élus locaux favorables au mouvement présents dans le cortège. Parmi eux, des députés dont le siège sera également remis en jeu au cours des élections législatives de 2017… Leurs administrés « amoureux de la famille » pourront d’ailleurs « s’assurer de la présence de leurs élus » sur le site web de La Manif pour tous qui promet un outil pour vérifier qui en était et qui a préféré reste à la maison. On ne saurait être plus clair.

Sur le plan national, l’équation est complexe pour des politiques attentifs à ménager leur électorat le plus traditionnel tout en prenant garde de ne pas s’y enfermer. Ainsi, à part le candidat catholique Jean-Frédéric Poisson, aucun des participants à la primaire de la droite ne se rendra dans le cortège. Certains ne font pas mystère de leur soutien au mouvement, comme Laurent Wauquiez, fidèle compagnon de route et de pavé en 2013… mais tout de même absent ce dimanche, au nom de sa neutralité de président de parti. Bien commode. Du côté des participants Les Républicains à la primaire, c’est François Fillon qui assume le plus sa proximité avec La Manif pour tous. Logique, après la bénédiction reçue par la « filiale » de l’association, le collectif Sens commun.  

#16oct Je tiens à témoigner de ma sympathie et de mon soutien à ceux qui seront mobilisés demain pour la famille. https://t.co/4efSIwHK9s

— François Fillon (@FrancoisFillon) 15 octobre 2016

De l’autre côté de l’échiquier politique, la mobilisation de ce 16 octobre rappelle de bien mauvais souvenirs à l’exécutif. L’adoption de la loi Taubira ayant ouvert le mariage et l’adoption aux couples de même sexe en mai 2013 restera comme l’une des rares promesses de campagnes clairement estampillées de gauche et tenues sans barguigner par François Hollande. Manque de « bol », les polémiques et interminables débats autour du texte auront réussi ce qu’aucun pouvoir de gauche n’a accompli depuis plus de trente ans : faire descendre massivement la droite catholique conservatrice dans la rue. Et participer à l’éducation de toute une génération ultraconservatrice à la contestation populaire, un levier de pression traditionnellement accaparé par le peuple de gauche. Mais, à tenter de rassembler sur du sable et à se battre contre des mirages, La Manif pour tous risque fort de tourner en rond.  

 

 

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