Serpent de mer du débat politique et source infinie de divisions à gauche comme à droite, la légalisation et la dépénalisation du cannabis reviennent sur la table en ce début de campagne présidentielle…
C’est devenu l’un des marronniers de chaque campagne présidentielle. Alors que plusieurs candidats ont commencé à remettre le sujet sur la table, la ministre de la Santé Marisol Touraine a réaffirmé ce mardi 10 octobre son opposition à la dépénalisation du cannabis tout en souhaitant un débat sur l’efficacité des sanctions pénales pour réprimer son usage.
Interrogée sur la nécessité d’un débat, la ministre a jugé sur RMC/BFMTV que c’était utile mais a rappelé qu’elle n’entendait pas « banaliser le cannabis » et s’est demandée si la campagne présidentielle était « le meilleur moment ». « Je suis en tout cas favorable à ce que le débat puisse exister sur la nature de la sanction, a-t-elle précisé. Est-ce qu’une amende forfaitaire ne serait pas une meilleure sanction ?« . Sa collègue de l’Environnement, Ségolène Royal, s’est quant à elle vertement opposée sur iTélé à l’idée d’une dépénalisation : « La vente de cannabis par l’Etat, ça voudrait dire qu’on a légalisé le canabis, j’y suis farouchement opposée (…) Le plus grand service que des adultes peuvent rendre à des jeunes, c’est de leur poser des interdits, de leur donner des explications et surtout de tourner leur activité vers des choses qui les motivent, des choses positives ».
Aujourd’hui, l’usage de stupéfiants peut être puni d’un an d’emprisonnement et de 3.750 euros d’amende, mais la loi du 14 août 2014 prévoit déjà la possibilité d’une amende transactionnelle facultative en fonction des circonstances et de la gravité de l’infraction. Un groupe de travail de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) a déjà proposé cet été de remplacer la peine de prison par une contravention et une amende.
Le débat a resurgi par les voix de deux candidats aux primaires, Benoît Hamon (PS) et Nathalie Kosciusko-Morizet (LR), alors qu’un colloque sur le thème de la légalisation se tenait ce lundi au Sénat. Une question au fort potentiel politique puisqu’en France, en 2014, 17 millions de personnes déclaraient avoir déjà pris du cannabis dans leur vie et 700.000 en consommeraient quotidiennement, selon l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies. Lundi, un sondage Ipsos a par ailleurs montré que plus d’un Français sur deux (52%) était favorable à ce que la question de sa législation soit abordée lors de la campagne présidentielle.
Pour Benoît Hamon, il faut légaliser et pas seulement dépénaliser, afin de « tuer ces trafics » qui sont une « vraie gangrène ». « Ce qui fait qu’aujourd’hui ces bandes prospèrent (…), c’est l’économie du cannabis », a martelé l’ex-ministre sur France info. « S’il n’y pas de légalisation, c’est-à-dire si on ne casse pas ces économies parallèles, nous ne reprendrons pas la main (…) Si on veut ramener la République (sur les lieux de trafic), il faut en passer par là« . Sur Twitter, l’ancienne ministre et candidate à la primaire d’Europe Ecologie-Les Verts Cécile Duflot a réagi en rappelant qu’elle défendait « de très longue date la légalisation du cannabis » : « Comme le dit Daniel Vaillant (ancien ministre de l’Intérieur et député PS), on manque de courage et de lucidité sur ce sujet ».
Dans le même temps, Nathalie Kosciusko-Morizet a reconnu que le « système actuel n’est pas efficace ». Sans toutefois aller jusqu’à la légalisation, qui selon elle « permet de lutter contre le trafic » mais n’envoie pas le bon « signal à la jeunesse ». « Je suis plutôt pour la dépénalisation, ça permet de continuer à envoyer un signal à la jeunesse, de continuer à dire c’est interdit parce qu’on pense que c’est problématique en termes de santé », a-t-elle dit. Selon l’ancienne ministre de l’Écologie, cette dépénalisation permettrait de se doter de moyens de lutter contre la consommation « moins hypocrites et plus efficaces parce qu’on met une contravention« . Elle rejoint en cela une proposition faite par… Nicolas Sarkozy, alors candidat à l’élection présidentielle de 2007 mais qui a depuis fait marche arrière.
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