Le JDD révèle ce dimanche 2 octobre que les services secrets d’Ali Bongo, président du Gabon reconduit pour un second mandat malgré des soupçons de fraude, auraient écouté les observateurs européens dépêchés dans tout le pays pour veiller au bon déroulement de l’élection présidentielle.
Ce dimanche 2 octobre, le JDD révèle que les services secrets d’Ali Bongo auraient espionné les membres de la délégation européenne dépêchée au Gabon pour veiller au bon déroulement de l’élection présidentielle. L’hebdomadaire dévoile ainsi une vingtaine d’enregistrements clandestins, puisés dans un vivier beaucoup large, que les services secrets d’Ali Bongo auraient intercepté. Du 27 août, jour de l’élection, au 23 septembre dernier, date de proclamation des résultats, ces derniers auraient suivi les faits et gestes, ainsi que les conversations, des membres de la mission européenne. D’après le JDD, l’un d’entre eux a formellement reconnu sa voix sur l’un de ces enregistrements. C’est à cette période que le maintien au pouvoir du président gabonais, qui a prêté serment ce mardi 27 septembre pour un second mandat de sept ans, commence à être entouré de soupçons.
Sous l’autorité de la députée bulgare Mariya Gabriel, directrice de la délégation, les premiers observateurs arrivent à Libreville le 12 juillet, rejoints au mois d’août par 44 autres, déployés dans les neuf provinces du pays. Au total, ce sont une soixantaine de délégués qui prennent leurs quartiers dans le pays. Le but de leur mission est détaillée comme suit :
« La mission a pour objectif de présenter une évaluation précise, détaillée et impartiale du processus électoral. Elle doit opérer en toute indépendance et de manière neutre, sans interférence dans le déroulement électoral… »
“Ils ont fait exactement ce que j’espérais qu’ils n’allaient pas faire.” Quand elle découvre les résultats qu’annonce l’AFP à l’élection présidentielle le 31 août dernier, Polyna, la chef adjointe de la mission, est inquiète. Elle prévient immédiatement Pierre, ancien militaire nommé responsable de la sécurité de la délégation européenne. “L’AFP donne les chiffres, la différence est de 5.500 voix, l’opposition va refuser ces chiffres et va faire appel”, lui annonce-t-elle. Privée, la conversation revient en fait aux oreilles des services secrets d’Ali Bongo, comme la plupart tenues par les observateurs.
Pire, les hommes de l’ombre du président Bongo auraient même ciblé certains membres de la délégation en lançant de violentes accusations à leur égard dans les journaux gabonais. C’est le cas de Xavier. le 30 août au petit matin, alors que les résultats officiels se font attendre et que la délégation redoute de plus en plus une manipulation de la part du pouvoir en place, l’observateur échange au téléphone avec un autre membre de la mission. Il lui raconte qu’il a passé plusieurs heures à échanger avec un membre de l’opposition dont il donne le nom. D’après lui, le clan Jean Ping, opposant à Bongo, détient les mêmes chiffres qu’eux : au départ, 60.000 voix d’avance étaient annoncées pour Ping. Au final, 3.000 d’avance sont comptabilisées au profit de Bongo. Un chiffre qui sera encore gonflé fin septembre après avis de la Cour constitionnelle gabonaise.
Il n’en faut pas plus pour que le lendemain, bon nombres de publications gabonaises s’en prennent aux membres de la délégation. “Scandale de corruption au sein de l’Union européenne”, peut-on lire en Une. C’est Xavier qui est ciblé, accusé d’avoir passé “quatre heures avec un candidat de l’opposition”. Les journalistes s’appuieraient sur “des sources des services gabonais”. Il est plus probable que leur première source ait été l’enregistrement de cette conversation… Tout est immédiatement mis en place pour exfiltrer Xavier du pays.
A l’issue de l’annonce des résultats, les observateurs quittent le pays, pour certains relativement rapidement. Un rapport de synthèse doit être rendu d’ici à deux mois par Bruxelles.
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