Giancarlo De Cataldo amoureux de Rome, cette vieille ville cynique

Coécrit encore avec le journaliste Carlo Bonini, le magistrat n’en finit pas d’explorer les facettes complexes de la Cité éternelle.

« J’ai fait une grande erreur en faisant mourir le Libanais à la page 140 de Romanzo Criminale. Depuis il revient et il me reproche ça. Et comme c’est un type difficile, il faut lui donner raison. »

C’est ainsi que depuis 2002 et la publication de Romanzo Criminale et jusqu’à aujourd’hui avec la parution de Rome Brûle, coécrit avec le journaliste Carlo Bonini, le personnage emblématique du Libanais, fondateur de la bande de la Magliana qui fit main basse sur Rome entre les années 70 et 80, ne hante plus seulement la mémoire de la pègre romaine mais aussi l’œuvre de Giancarlo De Cataldo. Une œuvre qui ausculte Rome, ses bandes mafieuses, la corruption d’une partie de ses élites, et qui, surtout, fait de la Cité Éternelle un personnage à part entière que le juge et écrivain romain originaire de Tarente aime profondément sans pour autant en dissimuler les défauts.

« J’adore Rome et je suis indigné par Rome. Je suis tombé amoureux d’elle et j’ai été adopté par cette ville. Rome, c’est une ville pleine de défauts. C’est une vieille ville cynique. Mais en même temps elle est unique au monde et on ne peut pas ne pas l’aimer. Peut-être que le destin de tous ceux qui vivent à Rome est d’être en permanence déchiré entre la rage que provoque l’état des choses et le désir de les changer. »

Cette Rome ambivalente, complexe, séduisante et exaspérante, se révèle dans la nouvelle série de romans que Giancarlo De Cataldo écrit avec Carlo Bonini. Et ce d’autant plus qu’avec Suburra – et les auteurs n’ont pas fini d’en entendre parler – De Cataldo et Bonini racontaient à leur manière l’affaire qui, quelques mois après la sortie du livre, allait faire exploser la mairie de Rome et prendre le nom très cinématographique de Mafia Capitale. Pas de don particulier de préscience là-dedans, mais une documentation solide et l’imagination de l’écrivain : « Pour un écrivain, c’est plus facile que pour un juge. Parce que le juge, lui, il doit avoir des preuves alors que l’écrivain se contente d’inventer. »

Inventer, anticiper parfois, et, sur une trame d’informations solides, faire évoluer des personnages tragiques, une pègre, un monde politique dont Giancarlo  De Cataldo explique volontiers qu’ils sont distordus pour les besoins de l’histoire : « Je ne crois ni en la distance, ni en la proximité. Je crois en les histoires et en l’Histoire. Mon travail, c’est juste de les exploiter. » Et, souvent, ce faisant, de toucher juste et de montrer la complexité du monde et des hommes qui le font ou le subissent.

Rome brûle, Éd. Métailié. 19 €

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