Il aura fallu moins d’un an à l’association lyonnaise La Parole libérée pour recueillir plus de 400 témoignages de victimes présumées d’actes pédophiles. Pour l’essentiel, ces confidences mettent en cause des hommes d’église.
La Parole libérée n’imaginait pas en recueillir autant. En dix mois, l’association lyonnaise, connue pour être à l’origine de l’affaire Preynat et Barbarin, a réuni plus de 400 témoignages de victimes présumées d’actes pédophiles, révèle France Info ce 30 septembre. Selon son président François Devaux joint par Marianne, « plus de 90 % » de ces personnes disent avoir été abusées par des prêtres. Certaines s’expriment pour la première fois, longtemps après les agressions.
D’autres n’ont pas eu l’occasion de le faire, comme cet homme dont la femme a retrouvé des écrits après sa mort. « Elle ignorait l’existence des ces carnets, dans lesquels son mari exprimait sa souffrance », raconte François Devaux. Un homme de 93 ans a lui encore pu prendre la plume « avec son écriture toute chevrotante » pour raconter son calvaire, vécu dans ses plus jeunes années. « Tous ces témoignages, ce sont des douleurs immenses, à vie », résume François Devaux. Pour ces auteurs de témoignages ressortis des mémoires, le délai de prescription est passé depuis longtemps. Mais l’objectif est commun : éviter que le traumatisme vécu ne soit subi par d’autres. Pour les autres, La Parle libérée promet de « les accompagner » dans leurs éventuelles démarches judiciaires.
À l’omerta imposée de l’Église jusqu’à très récemment succède peu à peu une volonté de faire le ménage dans les diocèses. Ainsi, Monseigneur Guyard, évêque émérite du Havre, n’hésite pas à fustiger les comportements passés de la hiérarchie ecclésiastique au micro de France Inter : « À l’époque, la pédophilie n’était pas considérée comme quelque chose de dramatique, si vous voulez, pour être un peu vulgaire, c’était des histoires de touche pipi… comme les gamins le font quand ils ont 12 ans entre eux. On mettait ça à ce niveau-là. »
Les prêtres soupçonnés étaient simplement mutés par leur hiérarchie « pour étouffer les affaires et lui permettre de continuer à vivre tranquillement ». Quoiqu’il arrive, fermer les yeux, ne pas faire de vagues. Même indifférence dans les rangs de l’Éducation nationale ou de ceux des forces de l’ordre, où les affaires de pédophilie étaient délaissées.
Les cellules d’accueil désormais mises en place dans chaque diocèse, accompagnées d’une adresse mail, ne peuvent masquer les agissements coupables très récents de certains dirigeants de l’église catholique, toujours en vogue. Ainsi, le cardinal Barbarin avait maintenu en fonction le père Preynat, y compris au contact d’enfants, tout en ayant connaissance du passé pédophile du prêtre. « L’Église feint d’agir depuis des lustres et des lustres, s’emporte François Devaux. Afficher la tolérance zéro c’est bien, mais les actes doivent suivre. Or ils ne suivent pas ».
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