Rentrant chez lui à Saint-Denis le 22 septembre, Guillaume Vadot, professeur à Paris I, assiste à un contrôle de police musclé à la sortie de la gare de Saint-Denis. Outré, il décide de filmer la scène. Ce qui ne plaira pas aux agents sur place qui, d’après lui, le violenteront. Il a décidé de porter plainte pour « souligner ces pratiques courantes. »
Ce devait n’être qu’un simple contrôle. Jeudi 22 septembre, Guillaume Vadot, enseignant à Paris I, rentre chez lui par le RER D. Arrivé à Saint-Denis, à la sortie de la gare, il entend des cris derrière les portiques. Il saisi alors son téléphone pour filmer la scène à travers les grilles de la porte de sortie. Une femme noire de 45 ans est menottée, plaquée contre un mur. Elle crie et se tord de douleur, rapporte-t-il. « Elle était contrôlée parce qu’elle n’avait pas de ticket de transport, elle ne méritait pas un tel traitement. J’ai tout de suite pensé à Adama Traoré, filmer c’était un geste citoyen« , explique t-il lors d’une conférence de presse donnée ce 26 septembre à Paris avec son avocat, maître Slim Ben Achour.
Froissé par le fait de le voir filmer l’incident, un agent de la police nationale intervient. « Il m’a dit que je n’avais pas le droit de filmer dans l’enceinte de la gare ». Suivant ces recommandations, il décide de passer la grille et de poursuivre l’enregistrement vidéo à l’extérieur. Là, un autre fonctionnaire de police l’aborde et attrape son téléphone. « On va procéder à un contrôle d’identité », lui aurait-il annoncé. « Là, c’est le début d’une escalade », dit celui qui se dit « victime », les yeux humides.
Il poursuit son récit :
« Ils étaient deux. L’un des deux m’a attrapé en me faisant une clé de bras avant de me plaquer contre le mur. Quand je lui ai dit que j’avais mal, il m’a répondu ‘t’as voulu jouer avec la police, on va jouer avec toi' ».
Selon lui, des attouchements au niveau des fesses s’en seraient suivis, puis des insultes homophobes et même une mention à Daech. « L’un d’eux m’a demandé si je soutenais l’Etat Islamique, comme si le simple fait d’être solidaire avec une personne racisée était une collaboration. » Puis, ils l’auraient fouillé, trouvant de cette manière sa carte de professeur et sa carte électorale. « A ce moment là, en voyant que je n’étais pas encore un professeur titulaire, ils m’ont dit qu’ils allaient faire un rapport salé pour empêcher ma titularisation. » Découvrant son adresse sur l’un de ses documents, ils l’auraient menacé de venir lui rendre visite « pour (le) violer ». Coup final : un décharge au taser. « Alors, ça pique ? », lui auraient demandé les policiers avant de supprimer eux-mêmes les vidéos du téléphone du professeur et de quitter les lieux. Des enregistrements que Guillaume Vadot a tout de même réussi à récupérer malgré la suppression initiale et qu’il veut présenter comme preuve.
Ces vidéos que nous avons pu consulter ne permettent toutefois pas d’entendre les menaces ou de voir l’agression décrite. Elles prennent fin trop tôt.
S’il a longuement hésité, Guillaume Vadot a finalement décidé de saisir le défenseur des droits et de porter plainte notamment pour abus de pouvoir, violences volontaires, agression sexuelle, menaces de viol et injures. Pour maître Slim Ben Achour, l’avocat de la victime, cette démarche est rendue nécessaire par les évènements qui secouent l’actualité, citant en exemple les cas d’Adama Traoré ou du syndicaliste de Sud qui a perdu un œil lors d’une manifestation contre la loi Travail le 15 septembre dernier. « Ces pratiques violentes se développent en totale opacité et en totale impunité. Si vous n’acceptez pas de vous soumettre, vous êtes en outrage ou en rébellion. La police doit être un véritable service public, or elle ne l’est pas. » Pour son client, cette affaire doit devenir celle de toutes les violences :
« Ce qui m’est arrivé est malheureusement banal. Ca devient courant. C’est pourquoi je lance un appel à tous ceux qui ont été spectateur de cette scène ou victime de tels agissements. On ne peut plus laisser faire ! »
Contactée par Marianne, la préfecture de police de Paris indique qu’un contrôle de police « a bien eu lieu ce soir là » et que « des vérifications sont en cours pour déterminer si les faits énoncés peuvent correspondre à cette intervention« . Elle ajoute : « Si c’est le cas, la préfecture de police saisira l’IGPN pour faire la lumière sur celle-ci.«
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