L’écrivain et conseillère du 17e arrondissement parisien, Pauline Delpech, explique le lancement d’une nouvelle association « Pour Une Nouvelle Politique Anti-Tabac », dont elle est la présidente.
Chaque année près de 5 millions de personnes meurent dans le monde à cause du tabac sous toutes ses formes. Ils sont 80 000 en France, 700 000 dans l’Union européenne.
La recherche évite les maladies génétiques. La prévention lutte contre les maladies transmissibles. Contre les produits du tabac il faut évidemment de la recherche et de la prévention : mais il faut lutter contre ceux qui les produisent et qui s’enrichissent grâce au tabac, qui développent l’addiction, qui contournent en permanence les politiques de santé publique et les règles de l’impôt, qui défendent leur opulence en mettant en avant les agriculteurs et les buralistes dont le rôle social n’est pas en cause et qui sont toujours, comme les fumeurs, les victimes de ces groupes transnationaux qui se partagent à quatre des profits colossaux.
Pour l’American Cancer Society les bénéfices de l’industrie du tabac sont de 6 000 dollars par mort du tabac.
Les politiques de santé publique françaises ont toujours ciblé mollement les fabricants : du fait de leur lobby efficace, de leurs relais obligés jusqu’au sein de l’administration. Bien sûr ils subissent des assauts : paquet neutre, avertissements sanitaires, interdiction de la publicité, mais leurs profits « optimisés fiscalement » augmentent chaque année, même en France.
Il est temps donc de changer de dimension dans cette lutte indispensable.
« Laisser fumeurs et buralistes tranquilles, mais se focaliser sur les industriels du tabac »
Nous avons voulu créer une nouvelle association de lutte contre le tabac pour formuler de nouvelles propositions de lutte contre le tabagisme, dont l’objectif est clair : laisser fumeurs et buralistes tranquilles, mais se focaliser sur les industriels du tabac. Elle vise à compléter l’action déjà remarquable des associations existantes en luttant contre les pratiques immorales, voire pire, des principales multinationales du tabac.
La première est celle qui consiste à cibler les populations les plus vulnérables notamment les jeunes. Or, un adolescent sur trois qui commence à fumer deviendra un fumeur adulte régulier.
La deuxième, elle est la conséquence d’une politique de prix élevé, est le trafic et notamment le trafic transfrontalier. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) elle-même met en cause l’industrie du tabac ; les défunts accords passés entre l’Union européenne et l’industrie du tabac ne s’expliquent pas autrement. Pour lutter efficacement contre ce trafic il faut une traçabilité indépendante des produits du tabac c’est-à-dire hors de tout contrôle de l’industrie du tabac comme l’impose le traité OMS récemment ratifié par la France et par l’UE et qui n’est toujours pas mis en œuvre.
La troisième est l’existence d’une optimisation fiscale fondée sur le caractère transnational de ces entreprises. UBER, GOOGLE et YAHOO qui ne tuent personne sont la cible des contrôles fiscaux visant à mettre un terme à ces pratiques. Il faut inscrire Philip Morris International, British American Tobacco, Japan Tobacco et Imperial Tobacco sur la liste, et, dans l’attente, leur faire prendre en charge les dépenses liées aux conséquences du tabagisme. En France, le Contrat d’Avenir qui doit être signé en novembre entre l’Etat et les buralistes offre une première concrétisation de cette nouvelle politique. Les quatre cigarettiers, qui ne déclarent que quelques dizaines de millions d’euros de profits, mais qui réalisent, grâce à l’optimisation fiscale, un vrai bénéfice annuel d’un milliard d’euros doivent financer la hausse de la rémunération des buralistes à 11% et la mise en œuvre du Protocle de l’OMS, comme le préconise d’ailleurs le Rapport « Sur l’avenir des buralistes » du député Frédéric Barbier.
La quatrième est celle d’une fiscalité plus avantageuse des produits dits d’entrée de gamme ceux qui, justement favorise l’addiction de la jeunesse : cigarettes dites Premium, tabac à rouler et, pis encore, tabac à tuber. La vente du tabac dans les duty free va dans le même sens. Il faut harmoniser la fiscalité sur tous les produits du tabac et l’harmoniser par le haut.
La cinquième est la mise en œuvre effective et l’application stricte de la Convention OMS de lutte contre le tabac qui interdit toute action de lobbying aux cigarettiers eux-mêmes, mais également à leurs prestataires externes, qu’ils utilisent de plus en plus souvent pour contourner les règles d’encadrement du lobbying. Au-delà c’est l’interdiction de tous les outils de marketing des fabricants de tabac qu’il faut viser notamment ceux qui rendent leurs produits attractifs, en ciblant délibérément notamment les adolescents et les femmes : cigarettes à capsules, cigarettes parfumées, cigarettes fines, appellations attractives notamment.
La sixième est l’absence d’implication des cigarettiers dans la gestion environnementale de leurs déchets correspondant à 6 000 milliards de cigarettes fumées chaque année. Les mégots constituent une pollution visuelle, une charge pour les collectivités publiques et un risque environnemental. Comme les cigarettes les mégots contiennent quelque 4 000 substances chimiques qui mettent près de douze ans à se dégrader totalement et peuvent chacun polluer plus de 500 litres d’eau ou 1 m3 de neige. Comme près d’une vingtaine de produits souvent moins polluant, il faut mettre à la charge des producteurs de tabac le coût de la collecte et de l’élimination des mégots de cigarettes.
Les profits des principaux fabricants augmentent chaque année, preuve de ce que les mesures législatives ou réglementaires ne sont pas suffisantes. « Pour une nouvelle politique anti-tabac » propose que l’efficacité des politiques anti-tabac soit indexée sur la valeur boursière des majors du tabac. Il s’agit d’un vrai changement de logiciel dans la définition des politiques anti-tabac.
Une fois une baisse durable de cette valeur l’association se dissoudra.
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