La Rochelle : paroles de militants frondeurs, partagés entre Hamon et Montebourg

Entre 300 et 400 personnes se sont retrouvées à La Rochelle ce week-end pour l’université d’été de l’aile gauche du Parti socialiste. Parmi ces militants, beaucoup de partisans de Benoît Hamon, un peu moins d’aficionados d’Arnaud Montebourg. Mais pour tous, l’heure est à l’espoir après des années de désillusions.

Ils roulent beaucoup pour Benoît Hamon, fort de son implantation historique dans le parti,. Un peu moins pour le franc-tireur Arnaud Montebourg. Les filles déclinent trop souvent les demandes d’interview, quand elles ne sont pas sommées par un militant mâle à peine plus âgé qu’elles de refuser une photo. Tous s’entendent pourtant sur un point : au fond du trou quelques mois auparavant, la perspective d’une échéance électorale à court terme et la possibilité d’exprimer librement leurs idées à travers leurs candidats favoris pour 2017 leur redonne des ailes.

Les hamonistes

Antoine, 25 ans, vient de finir des études en Affaires publiques, Paris


Le favori – « Benoît Hamon est mon candidat. Il porte un projet de société ambitieux à long terme, ce qui peut aussi être un problème : quand on parle revenu universel ou semaine des 32 heures, on donne parfois l’impression d’être trop en avance. Montebourg ? C’est un parfait président de la Ve République, il a une stature très présidentiable à laquelle je suis sensible, mais il a un positionnement trop productiviste. Cela étant, si c’est lui qui devait être désigné parmi les frondeurs comme candidat à la primaire, je le soutiendrais. Mais je ne suis pas favorable à la désignation d’un candidat unique issu des frondeurs : une primaire, c’est deux tours, on peut toujours se rassembler après le premier round. Il ne faut pas avoir peur du débat ».

Comment ça va ? – « Après plusieurs années difficiles, je retrouve la patate : je suis super content de pouvoir militer pour mes idées, alors qu’avant il fallait jouer le jeu pour des gens qu’on n’aimait pas forcément… Et puis, dans les sections, c’était moral à zéro, avec des débats en interne parfois d’une grande violence ; on pouvait se faire traiter de ‘fossoyeur de la gauche’ en tant que frondeur. Des gens nous rejoignent, ça faisait un moment que ce n’était pas arrivé. C’est très stimulant de pouvoir promouvoir ses idées librement, en sachant qu’il y a un débouché électoral à court terme ».

Maxime, 26 ans, enseignant en histoire-géographie, Grenoble


Le favori – « Je soutiens Benoît Hamon mais je suis d’abord un militant de la gauche du Parti socialiste. Hamon a une vraie vision de l’avenir, et du rapport de force à changer en Europe. Contrairement à d’autre, il sait que pour changer l’Europe, il faut des alliés et un programme de fond, pareil pour le revenu universel et le partage du temps de travail, cela implique une une stratégie à long terme. Et puis, il est moins grande gueule, aussi, avec une plus grande capacité à rassembler les électeurs de gauche que Montebourg ».

Comment ça va ? – « En Isère, on a fait un bureau fédéral sous protection policière, alors pouvoir imaginer un candidat vraiment de gauche à la présidentielle, ça met du baume au coeur. Dans mon département, aujourd’hui, certains endroits sont quasiment en état de mort clinique tellement ils sont dépeuplés ».

Thibault, 21 ans, en fin d’études dans l’immobilier, Biarritz


Le favori – « Benoît Hamon est clair sur ses positions. Le revenu universel, la semaine des 32 heures, le développement de l’économie sociale et solidaire, tout cela me parle. Et puis, les sondages ne font pas les idées. Regardez le parcours de Bernie Sanders, que personne n’attendait… »

Inès, 18 ans, tout juste entrée à Sciences-Po Bordeaux, Paris

Le favori – « J’ai adhéré au MJS parce que je partage les idées de Benoît Hamon, surtout sur le volet écologique. Il incarne une ligne nouvelle, sans ambition de jouer au monarque, et je lui fais confiance pour défendre les idées d’une gauche sociale et solidaire. Et puis c’est un des rares qui ne joue pas sur la peur de l’islam. Je regrette simplement qu’il n’ait pas la même popularité que Montebourg. Mais un président ne peut pas avoir que du charisme ».

Les montebourgeois

Pierre, 43 ans, professeur de français en collège, Bourges


Le favori – « Je soutiens Arnaud Montebourg pour ses positions fortes contre le poids de l’Europe libérale et des multinationales, pour la démondialisation, son approche républicaine et laïque et la volonté d’un État fort. En ce sens, je trouve qu’il se rapproche de Jean-Pierre Chevènement et c’est un bon point. Mais attention : si Hamon devait être désigné seul candidat des frondeurs, je le soutiendrais. Il y a plus de choses qui nous rassemblent que de sujets qui nous divisent ! »

Comment ça va ? – « Aujourd’hui, on est revenus dans le combat. Le fait de voir venir une élection présidentielle avec une vraie chance de remettre la gauche à sa vraie place, c’est un grand bonheur. Il est plus que temps de tourner la page du hollandisme. D’ailleurs, des sympathisants socialistes non encartés qui avaient abandonné toute idée de voter PS nous disent ‘Si c’est quelqu’un comme Montebourg, voire Hamon qui représente le parti, on est prêt à revoir notre position’. L’espoir est là, et on va se battre ! »

Francine, 54 ans, Bordeaux


Le favori – « Je suis proche des idées d’Arnaud Montebourg depuis longtemps, cela remonte à la fondation du Nouveau parti socialiste (NPS), en 2003. Je pense qu’il a pour lui la cohérence de ses idées et un côté visionnaire : la lutte contre les paradis fiscaux, la Ve République, le combat pour le Made in France, ce sont des thèmes dont on mesure toute la pertinence aujourd’hui. »

Comment ça va ? – « J’ai failli quitter le parti mais je me suis accrochée, comme tout militant j’ai appris à avaler des couleuvres… Mais aujourd’hui j’ai retrouvé de l’énergie, l’envie de me battre. Je suis totalement remobilisée dans la perspective de la présidentielle, mais aussi du prochain congrès du Parti socialiste, en 2017. En revanche, ce congrès sera celui de la dernière chance. Si la ligne libérale l’emporte, beaucoup de militants partiront pour de bon. »

Daniel, 74 ans, retraité de l’enseignement, Pierre-de-Bresse (Saône-et-Loire)

Le favori – « Moi, je fais partie de ces ‘mutins de la Bresse’ qui ont officiellement suspendu le versement de leur cotisation au parti. Je suis proche d’Arnaud Montebourg parce que j’ai été charmé par ses idées, et par sa façon d’être et de vivre. C’est un mélange de fond et de forme. Mais je ne suis pas un godillot : je trouve qu’il a mis trop longtemps à sortir du bois, or la politique n’est pas une partie de cache-cache. Mais Arnaud reste le seul capable de faire le lien avec toute la gauche ».

Comment ça va ? – « Je peste contre les gens qui ont rendu leur carte du parti. Chez nous, j’ai proposé que l’on se mette en grève du parti. On a décidé de ne plus payer le patron à Solférino. Aujourd’hui, le moral est au beau fixe, c’est clair et net. Une militante m’a d’ailleurs dit : ‘Quand est-ce qu’on paye !’. On est de retour, en ordre de marche mais attention : pas pour n’importe qui ! »

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