L'actrice marocaine Loubna Abidar poursuit son combat sur YouTube

Menacée dans son pays après la sortie du film « Much Loved », interdit au Maroc pour outrage aux valeurs morales, l’actrice Loubna Abidar a annoncé ce mardi 30 août le lancement de sa chaîne YouTube pour débattre avec ses concitoyens des sujets qui « intéressent » et qui « fâchent. » « Soit je suis morte, soit je suis vivante et si je suis vivante, je dois prendre la parole », confiait-elle à « Marianne » en mai dernier.

Lorsque nous l’avions rencontrée, en mai dernier à l’occasion de la sortie de son autobiographie, La dangeureuse*, l’idée germait peut-être déjà. Agressée puis exilée en France, l’actrice marocaine Loubna Abidar, qui avait osé incarner une prostituée de Marrakech dans le film Much Loved, interdit au Maroc pour « outrage grave aux valeurs morales et à la femme »,  s’était donnée pour mission de parler. D’être une voix pour celles qui, étouffées par des schémas patriarcaux, pensent « qu’il est trop tard. » « Si on est pauvre, si on n’a pas fait d’études, on ne va jamais y arriver (…) Ce n’est pas vrai, ce n’est jamais trop tard », confiait-elle à Marianne, regrettant l’emprise grandissante de la religion et de ses fondamentalistes au sein de la société marocaine. 

« On ne fait des fatwas que contre le sexe des femmes », expliquait-elle en effet, en particulier sur les « chaînes de télévision câblées » et autres « chaînes YouTube » massivement investies par ceux qui pratiquent un islam rigoriste, à l’image de la puissante Arabie saoudite qui importe à grand frais sa doctrine dans le reste du monde. Ainsi, sans doute dans l’idée de contrecarrer en partie leur influence, la jeune femme de 31 ans a-t-elle annoncé dans une vidéo postée cette semaine sur le même YouTube l’ouverture de sa propre chaîne, afin de débattre avec ses concitoyens des sujets qui « intéressent » et qui « fâchent ».

« Soit je suis morte, soit je suis vivante et si je suis vivante, je dois prendre la parole »

« Bonjour à ceux qui m’aiment, bonjour à ceux qui me soutiennent. Bonjour également à ceux qui ne m’aiment pas, à ceux qui m’insultent et qui, malgré ça, m’écoutent, entame-t-elle en arabe, rapporte Le Monde Afrique qui a traduit l’extrait. On va se rencontrer une fois par semaine. On va discuter des sujets qui nous intéressent vous et moi, des sujets qui vous agacent, et aussi de sujets qui fâchent. Et nous allons découvrir ensemble d’autres choses encore. Bienvenue à tous. » 

Une passerelle qui s’inscrit dans son combat citoyen, comme le laissait présager Loubna Abidar en mai. « Pour moi, soit je suis morte, soit je suis vivante et si je suis vivante, je dois prendre la parole », affirmait-elle malgré les menaces qui ont continué après la sélection du film à Cannes, malgré sa violente agression dans les rues de Casablanca en novembre dernier qui a provoqué son arrivée en France, où « la dangereuse » a notamment reçu le prix de la meilleure actrice au Festival d’Angoulême. 

*La dangeureuse, avec Marion Renterghem, journaliste au Monde, (éd.Stock)

Powered by WPeMatico

This Post Has 0 Comments

Leave A Reply