"Divines" d'Houda Benyamina, le coup d'éclat d'une bande de filles

Souvent réduits à des clichés ou aux bons sentiments, les quartiers populaires apparaissent dans le film « Divines », Caméra d’or à Cannes et premier long métrage de la réalisatrice Houda Benyamina, sous une lumière puissante, crue, belle où les rôles aussi bien que les codes s’inversent, se confondent, pour mieux questionner l’existence ou la conscience qu’on en a. Un pari risqué et réussi.

Dans une cité française, où la misère aiguise les appétits, des jeunes rêvent de pouvoir et de reconnaissance. Ils portent des joggings et des baskets, passent leurs journées à vendre du shit, à se filmer avec leur téléphone portable et à s’inventer une vie meilleure. Sous la caméra de la réalisatrice Houda Benyamina, ces jeunes sont des femmes. Au coeur de petits trafics, Dounia, la bâtarde, Maimouna, la pieuse, et leur mentor Rebecca, les trois héroïnes du film Divines, Caméra d’or à Cannes, escamotent bientôt un plan qui, cette fois c’est sûr, leur remplira les poches : voler l’un des plus opulents dealers du coin en le séduisant.

Comme tant d’autres films, « Divines » emprunte au parcours initiatique du jeune de quartier populaire sa matière brute, ses clichés, pour mieux les tordre cependant, sans angélisme ni bons sentiments. A la fois brutes et assujettis à une riche palette d’émotions, les personnages du premier long métrage de Houda Benyamina, incarnés par les actrices Oulaya Amamra, Déborah Lukumuena et Jisca Kalvanda, au jeu sobre et puissant, prennent par la gorge le spectateur. 

Divines, de la poésie dans les quartiers 

Dans une mise en scène épurée, à la lumière crue, qui tient tour à tour du sacré, du Vaudeville ou de la poésie, grâce à des dialogues forts et un jeu de mise en abyme à travers lequel les personnages deviennent les spectateurs d’eux-mêmes, le film interroge le monde clos des quartiers et des créatures qu’il enfante en se heurtant à ses limites. Dounia, Maimouna et Rebecca échapperont-elles à leur condition ?

Sur fond de musique classique, Mozart, Vivaldi ou Händel, musique qui transcende le film et apparaît comme le dernier élément de la bande, l’intrigue se déploie alors tel que sur les Atrides, dans une machinerie parfois prévisible où l’Hybris, l’Amour et l’Amitié se disputent les rêves et les incantations, au supermarché, dans un studio de danse, ou une cave de cité. Sublime.

En salles.

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