Marseille : comment Stéphane Ravier a provoqué une hémorragie d'élus FN

Autoritarisme, népotisme… les élus FN des quartiers nord de Marseille désertent. En cause, les mauvaises manières du maire lepéniste Stéphane Ravier.

C’est au cœur même du cabinet du maire que la série de démissions a débuté. Adrien Mexis, le premier, a claqué la porte. C’était en novembre 2015, et ce jeune homme de 32 ans symbolisait ces nouvelles recrues d’un FN «moderne» sur lesquelles mise Marine Le Pen. Surdiplômé, Adrien Mexis est d’abord passé par le cabinet de Xavier Bertrand, alors ministre du gouvernement de Villepin, avant de devenir élu de la commune d’Istres (Bouches-du-Rhône) et, enfin, chef de cabinet de Stéphane Ravier, sénateur-maire FN des 13e et 14e arrondissements de Marseille. A l’automne dernier, donc, il démissionne. Quatre mois plus tard, en février, la directrice générale des services, Marie-Dominique Desportes, 42 ans, lui emboîte le pas. Membre du cabinet de Daniel Simonpieri, maire FN de Marignane à la fin des années 90, sectaire mais expérimentée, elle incarnait plutôt la «vieille garde» du FN.

« Il est ingérable, colérique, il casse des portes »

Tous deux laissent filtrer dans la presse locale la cause de leur départ : l’attitude du maire, Stéphane Ravier, un homme autoritaire et méfiant, restreignant sa confiance à une équipe de quelques fidèles. Goguenard, l’intéressé se félicite alors du départ de ses deux collaborateurs. Mais l’hémorragie reprend de plus belle. Deux élus prennent la fuite à leur tour : Karine Harouche et Karim Herzallah. La première rejoint le banc des non-inscrits, quand le second, transfuge fêté de l’UMP en février 2015, plaque tout. A l’un comme à l’autre, le maire avait promis une délégation qui n’est jamais venue. «En deux ans, j’ai présenté des tas de projets, se plaint Karim Herzallah. Je n’ai eu aucune réponse. Ces gens-là ne foutent rien. On dirait qu’ils ne sont là que pour toucher leurs indemnités.» L’ex-conseiller municipal n’est pas tendre avec son maire, Stéphane Ravier : «Il est ingérable, colérique, il casse des portes, jette par terre sa tablette numérique en plein conseil municipal.» Il glisse même que ses origines maghrébines ne seraient pas pour rien dans sa disgrâce…

« Tous ceux qui partent sont des aigris ! »

Au début de l’été, Paul Rabia, ancien légionnaire, chauffeur routier, recruté au FN en 2011 par Louis Aliot, vice-président du FN, a déserté à son tour. A la mairie, il était chargé des anciens combattants et met en cause, lui aussi, les mauvaises manières du maire. «On ouvre mon courrier, comme celui des autres adjoints d’ailleurs, proteste-t-il. Quand j’envoie une lettre à une association, je dois la faire valider par le maire.» Mais ce qui l’a le plus choqué, ce sont les appels au «sang neuf» répétés par Marine Le Pen. «J’ai 59 ans. Alors que je me lève à 3 heures du matin pour travailler, je n’ai manqué aucune distribution de tracts, j’ai collé des affiches, j’ai milité, et on me dit qu’il faut laisser la place aux jeunes pour les élections !» Sa rancœur a été alimentée par la carrière foudroyante de Sandrine d’Angio, 34 ans, conseillère municipale, communautaire et régionale, présentée par son parti aux départementales… et nièce de Stéphane Ravier.

Dernier départ en date, celui de René Annibaldi, adjoint chargé des sports, débarqué par le maire début juillet. Figure du sport marseillais, âgé de 73 ans, il a été écarté des manifestations officielles ainsi que de la célébration des mariages. «Ravier est venu me chercher pour que je figure sur sa liste et il n’a cessé de me harceler sous prétexte que je faisais un peu le pitre pendant les mariages. Un mariage célébré par un élu du FN, ça devrait être triste ?» proteste l’ex-adhérent. Pis, il considère avoir été abusé. Militant dévoué, René Annibaldi a réglé en octobre 2014 d’un chèque personnel, à la demande du maire, une facture datant de juin 2014 de près de 3 000 € de pognes (des brioches) due à un boulanger local. L’artisan menaçait de déposer plainte. «Annibaldi se vantait d’avoir des gros moyens financiers, alors je l’ai mis à contribution, justifie Stéphane Ravier. Mais j’affirme l’avoir remboursé quelques mois plus tard, de ma poche.» Ce que dément René Annibaldi, qui menace le maire d’une action en justice. A nos questions insistantes sur le mode de remboursement, le maire, prolixe au moment de charger René Annibaldi de tous les défauts, est resté silencieux… Avant d’enfoncer le clou : «Tous ceux qui partent sont des aigris !»

 

 

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