Au sein de Daech, une cellule secrète – l’Emni, placée sous le commandement du porte-parole et chef de la propagande de l’Etat islamique, Abu Muhammad al-Adnani – serait derrière la planification de plusieurs attentats récents. Ceux de Sousse en Tunisie, de l’aéroport de Bruxelles ou encore du 13 novembre à Paris. L’Emni agirait clandestinement, en Syrie et surtout à l’étranger, où elle encadrerait via des intermédiaires les volontaires au martyr. « Le New York Times » en révèle les rouages dans une longue enquête parue ce mercredi 3 août…
Souvent qualifiés de loups solitaires, les jeunes djihadistes passés à l’acte en France et ailleurs dans le monde pourraient en réalité être bien moins isolés que ce que n’ont jusqu’ici envisagé les autorités. C’est ce que révèle une longue enquête du New York Times, ce mercredi 3 août. Ces soldats de Daech pourraient en réalité appartenir ou avoir été approchés par une branche secrète de l’organisation terroriste, l’Emni, spécialisée (entre autres) dans les opérations extérieures.
Selon les documents de travail des différents services de renseignements européens et les témoignages d’anciennes recrues auxquels a eu accès le quotidien américain, l’Emni, une cellule placée sous l’autorité d’Abu Muhammad al-Adnani, porte-parole et chef de la propagande de l’Etat islamique, serait en effet derrière la planification de plusieurs attentats récents, dont celui de Sousse en Tunisie, celui de l’aéroport de Bruxelles en Belgique ou les tueries du 13 novembre à Paris.
Le coordinateur présumé de l’épopée sanglante parisienne, Abdelhamid Abaaoud a notamment été une « figure clef « de l’Emni, écrit le New York Times d’après le témoignage d’un combattant français. Mais c’est surtout un ex-djihadiste incarcéré en Allemagne, un certain Harry Sarfo, que le journal a rencontré en prison outre-Rhin, qui détaille le fonctionnement de la cellule et sa force de frappe.
Pour lui, l’Emni a d’ores et déjà envoyé « des centaines » de recrues en Europe, potentiellement prêtes à agir et à frapper simultanément plusieurs pays, dont la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni. Des « centaines » d’autres combattants attendraient en Turquie. Il le sait car, lors de son arrivée en Syrie, on lui aurait demandé de retourner en Allemagne. Il y manque « des volontaires disposés à faire le job », lui aurait-on dit en substance. Quel est le chiffre exact de ces bombes humaines en puissance ? Selon le New York Times, les renseignements français, autrichiens et belges ont repéré 28 membres de l’Emni parmi les terroristes déjà identifiés. Une trentaine d’hommes est ainsi parvenue avec succès à quitter la Syrie sans se faire remarquer et à passer à l’acte, en étant toutefois pour certains arrêtés à temps.
Plus inquiétant, le mode de recrutement au sein de l’Emni (par nationalité ou langues parlées), rend très difficile les surveillances, pour au moins deux raisons poursuit le New York Times. Placés en petites unités, les membres de l’Emni mandatés pour commettre un attentat à plusieurs dans un pays de l’Europe se rencontrent parfois seulement la veille de leur départ. Pour ceux qui agissent seul, le schéma est encore plus élaboré, explique en prison le djihadiste allemand repenti, Harry Sarfo.
Pour ceux là, les « loups solitaires », l’Emni aurait recours à des intermédiaires soigneusement choisis, de préférence récemment convertis au djihad voire à l’islam, sans liens connus avec des groupes terroristes. Ces hommes, qu’Harry Sarfo appellent les « clean men », des agents « propres », seraient chargés de faire le lien entre les candidats au martyr et les opérationnels de Daech, ceux qui pourront ensuite faire parvenir le mode d’emploi d’un gilet explosif par exemple ou diffuser a posteriori la vidéo de revendication une fois l’attentat perpétré.
Devenu un rouage « crucial » de la machine à tuer de l’Etat islamique, l’Emni aurait déjà investi l’Autriche, l’Allemagne, l’Espagne, le Liban, la Tunisie, le Bangladesh, l’Indonésie etc. mais aurait du mal à s’implanter aux Etats-Unis, malgré un commandement multiple, et plusieurs lieutenants chargés de couvrir différentes zones de la planète à travers des services distincts, comme le service « Asie », le service « Européen » ou encore celui dédié au « Monde arabe. «
En France, à en croire les membres de Daech rencontrés par l’ex-combattant Harry Sarfo, les volontaires ne manque pas. Au contraire. « Mon ami leur a demandé ce qu’il en était de la France, raconte le prisonnier allemand au New York Times, et ils ont commencé à rire. Mais à rire sérieusement, avec des larmes aux yeux. Ils ont répondu: “Ne t’inquiète pas pour la France ‘Mafi mushkilah’ ». En arabe cela signifie « no problem. » Cette conversation a eu lieu en avril 2015. Quelques mois à peine avant le 13 novembre…
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