Lassana Traoré, frère d'Adama : "On ne fait plus confiance au procureur"

Les circonstances de la mort du jeune Adama Traoré, 24 ans, décédé lors de son interpellation, le 19 juillet dernier, à la gendarmerie de Persan, dans le Val-d’Oise, se précisent. Selon les deux autopsies pratiquées, un « syndrome asphyxique » apparaît à l’origine du décès. Qu’est-ce qui a provoqué l’asphyxie ? Pour le frère d’Adama, Lassana, les auditions des gendarmes laissent peu de doutes. Il fustige la communication du procureur de Pontoise, Yves Jannier, qui a omis ce détail…

On en sait un peu plus sur les circonstances de la mort du jeune Adama Traoré, 24 ans, décédé lors de son interpellation, le 19 juillet dernier, à la gendarmerie de Persan, dans le Val-d’Oise. Selon les deux autopsies pratiquées les 21 et 26 juillet, le décès du jeune homme est survenu en raison d’un « syndrome asphyxique« . Comment, par quoi cette asphyxie a-t-elle été provoquée ? Pour son frère Lassana, les auditions des gendarmes – qui révèlent qu’Adama a été maîtrisé au sol après avoir pris « le poids » de leur trois « corps » – laissent peu de doutes. Adama est mort asphyxié parce qu’il a pris une charge de « plus de 200 kilos », explique-t-il à Marianne. Et parce qu’au lieu d’appeler les secours ce jour-là, les gendarmes l’emmènent à la gendarmerie de manière « à ce que lui soit notifié au plus vite sa garde-à-vue » alors qu’il signale « immédiatement qu’il n’arrive plus à respirer ».

Un délai qui interroge la famille Traoré, car « Adama décède aussitôt dans le véhicule », sur le chemin de la gendarmerie. « Il n’est plus revenu » à la vie malgré les tentatives de réanimation des pompiers. Si Lassana Traoré se réjouit de commencer à entrevoir « des réponses », il ne décolère pas. Pourquoi le procureur de la République de Pontoise, Yves Jannier, n’a-t-il jamais mentionné dans ses communiqués le « syndrome asphyxique » comme étant la cause du décès de son frère, se contentant d’évoquer une « infection très grave », « touchant plusieurs organes » et l’absence de « trace de violence significative » ?

Les oublis du procureur de la République de Pontoise

« Pour nous, la communication du procureur Jannier c’est le gros point noir de l’affaire« , poursuit Lassana. « Ça nous fait penser que quelque chose ne va pas, que le procureur essaie de protéger les gendarmes. » D’abord, la gravité de l’infection n’est pas confirmée par la seconde autopsie. Puis, « le syndrome asphyxique apparaît dans la première autopsie dès les premières lignes, et revient sous les mêmes termes dans le second rapport des médecins légistes. » Comment le procureur a-t-il pu le manquer ?

Contacté à plusieurs reprises par Marianne, Yves Jannier, en « réunion », n’a pas souhaité répondre à nos sollicitations. Il a cependant déclaré au Monde avoir « communiqu[é] que pour fixer un certain nombre de points par rapport à des informations qui circul[ai]ent ».

C’est précisément ce choix de « fixer » certains « points » plutôt que d’autres qui a motivé la famille Traoré dans sa décision de déposer une plainte pour « violence volontaire ayant entraîné la mort sans intention de la donner » et de demander le dépaysement de l’affaire.

« Tout ceci fait qu’on ne fait plus confiance au procureur Jannier« , regrette Lassana. « J’entendais le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, conclure à l’absence de violences policières parce qu’il n’y avait pas de traces de coups sur le corps de mon frère. Ce que je voudrais dire, c’est très important, c’est que l’asphyxie ne laisse pas forcément de marques. Elle n’est pas survenue en un claquement de doigt chez mon frère ce jour-là… » 

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