Décès d'Adama Traoré : ce que disent les rapports médicaux

Les rapports médicaux et ceux des gendarmes mettent à mal trois jours de communication pour le moins maladroite du procureur qui s’est acharné à faire oublier « l’asphyxie » d’Adama Traoré, en se focalisant sur de prétendues infections graves.

Décédé le 19 juillet 2016 dans la cour d’une gendarmerie du Val d’Oise, jour de ses 24 ans, Adama Traoré fait l’objet d’une première autopsie le 21 juillet. Selon les renseignements transmis à ceux qui examinent son cadavre, le jeune homme aurait « présenté un malaise lors de son transfert à la brigade de Persan » à bord d’un véhicule léger. Symptômes décrits par les gendarmes : perte de connaissance avec convulsions suivie d’un arrêt cardio-respiratoire. L’autopsie ne décèle « aucune cause immédiate de décès », mais pointe un « syndrome asphyxique aspécifique, associé à des lésions d’allure infectieuse de type miliaire touchant les deux poumons et le foie ».   

Le corps d’Adama Traore fait l’objet de nouveaux examens le 26 juillet, à Garches. La médecine légale met en évidence « un ensemble de lésions dont l’association est très en faveur de l’existence d’une cardiomyopathie hypertrophique »« Ce type de pathologie est susceptible de donner lieu à une mort subite par le biais d’un trouble du rythme, écrit le docteur Rambaud. La survenue d’un trouble du rythme est favorisée par l’augmentation de travail du cœur, comme cela se voit dans les situations de stress ou encore d’exercice physique ou d’infection. Cette pathologie cardiaque est habituellement d’origine génétique et nécessite un dépistage cardiologique chez les proches ».

Les conclusions de l’autopsie ressemblent cependant à s’y méprendre à celles du premier rapport, dans la mesure où elles pointent un « syndrome asphyxique à confirmer par examen anatomo-pathologique, pour en définir le mécanisme ». 

Pour le nouvel avocat de la famille de la victime, le pénaliste Yassine Bouzrou, sollicité le 28 août, il y a bien une piste de « bavure » policière, jusque-là évacuée par le procureur de Pontoise, Yves Jannier. Certes ces rapports ne disent rien sur les circonstances de cette asphyxie, mais l’hypothèse la plus vraisemblable se niche dans le rapport des gendarmes. Ils expliquent en effet s’être mis à trois pour l’immobiliser, alors qu’il venait d’être retrouvé dans l’appartement d’un ami (qui a appelé la gendarmerie) après avoir pris la fuite lors d’un contrôle de police. Le poids de ces trois hommes aurait suffi, à lui seul, à comprimer les poumons d’un homme qui n’était par ailleurs pas recherché (son frère l’était en revanche, pour une affaire d’extorsion de fonds qui ne lui a finalement valu que quelques heures d’interrogatoire).

De quoi mettre à mal en moins de trois jours la communication pour le moins maladroite d’un procureur qui se sera acharné à faire oublier cette « asphyxie » en se focalisant sur de prétendues infections graves qui auraient préexisté à la neutralisation d’Adama Traore. Pour le magistrat, l’absence de lésions mortelles aura suffit à écarter la bavure. Un peu court. 

 

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