Alors que des responsables de l’opposition, Christian Estrosi en tête, n’hésitent plus à verser dans les accusations complotistes à l’encontre du gouvernement, celui-ci rejette avec virulence toute critique et tout questionnement sur le dispositif de sécurité mis en place à Nice le soir de l’attentat du 14-Juillet.
Halte au feu ! Après l’attentat terroriste du 14-Juillet à Nice, la classe politique avait tout de suite montré qu’elle n’était plus disposée à observer un quelconque délai de décence, l’opposition pointant la responsabilité du gouvernement alors que des cadavres gisaient encore sur la promenade des Anglais. Une semaine après la tuerie – 84 morts et toujours 12 personnes qui « luttent encore pour leur vie », a indiqué François Hollande ce vendredi – certains des principaux acteurs politiques concernés ont atteint un niveau de rhétorique insensé. Et tant pis pour la mémoire des victimes et leurs familles.
La dernière polémique en date a éclaté après que la police judiciaire a demandé par réquisition à la mairie de Nice d’effacer les images des caméras de vidéosurveillance qui ont filmé l’attaque. L’objectif est d’éviter une fuite malveillante de ces enregistrements, qui ont de toute façon été stockés par les enquêteurs. Mais le premier adjoint à la mairie de Nice, Christian Estrosi (Les Républicains) – jamais à court de polémique depuis l’attentat -, s’y oppose. « L’Etat veut effacer toutes les traces, or nous devons la vérité aux victimes », tonne-t-il dans Le Parisien ce vendredi 22 juillet. Non content de verser ainsi dans la théorie du complot, le président de la région Paca va jusqu’à remettre en cause l’indépendance de l’enquête menée sous la houlette du procureur de Paris, François Molins : « Je rappelle que le Parquet agit sous l’autorité du garde des Sceaux »… Dans son sillage, des élus de droite et d’extrême droite multiplient les sous-entendus complotistes sur les raisons de cette réquisition judiciaire. « Le gouvernement aurait-il quelque chose à cacher ? » se demande sur Twitter Valérie Debord, porte-parole du parti LR. « Ils veulent supprimer les preuves », accuse le député apparenté FN Gilbert Collard. « Pour ceux qui dénoncent en permanence la théorie du complot, on ne peut pas mieux faire pour l’alimenter ! » enchaîne le maire d’extrême droite de Béziers, Robert Ménard.
L’opposition, Christian Estrosi en tête, n’avait déjà pas lésiné pour mettre en cause l’exécutif à propos du dispositif prévu pour sécuriser la promenade des Anglais le 14 juillet. Mais sur ce point, le gouvernement aussi cède à la fébrilité et aux accusations à l’emporte-pièce. Jeudi, à la suite des révélations de Libération selon lesquelles, contrairement à sa version, un point d’accès à la zone piétonne de la Promenade des Anglais n’était gardé que par un véhicule de la police municipale et aucun de la police nationale, le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve n’a ainsi rien trouvé de mieux que de remettre en cause « la déontologie des journalistes qui ont signé ces articles » et d’accuser carrément le quotidien d’avoir recours « aux ressorts du complotisme » ! Tout en confirmant l’information selon laquelle il n’existait pas un, mais deux points de contrôle à l’entrée de la zone piétonne, ce que le gouvernement n’avait de fait pas indiqué jusqu’alors…
Et manifestement ce vendredi matin, l’exécutif n’est toujours pas à l’aise avec les appels à la transparence… Alors que RTL lui demandait si l’enquête de la police des polices finalement ordonnée par Bernard Cazeneuve au sujet du dispositif de sécurité serait bel et bien indépendante, le secrétaire d’Etat aux Relations avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen, s’est agacé en ces termes :
« Si aujourd’hui un certain nombre de journalistes, de commentateurs, de responsables politiques, mettent en cause le fonctionnement de la justice, des services administratifs de l’Etat, alors c’est une thèse qui est extrêmement dangereuse pour la démocratie. Je le dis franchement avec beaucoup de solennité. Arrêtons ce jeu délétère ! »
Poser des questions sur le fonctionnement (et les éventuels dysfonctionnements) des services de l’Etat deviendrait donc « délétère » et « dangereux », alors que le terrorisme islamiste a fait plus de 230 morts en France depuis janvier 2015. « Il faut que les esprits de certaines personnes se reprennent », a par ailleurs insisté Jean-Marie Le Guen au cours de la même interview. On ne saurait mieux dire.
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