Alain Juppé et Nicolas Sarkozy ont rapidement critiqué le gouvernement après l’attaque meurtrière du 14-Juillet. Signe que l’unité nationale réclamée par François Hollande ne tient plus le choc, face à la proximité de l’élection présidentielle mais aussi de la primaire de la droite prévue à l’automne.
« L’esprit Charlie » n’est plus qu’un souvenir. Loin des manifestations d’unité nationale qui ont suivi les attentats de janvier 2015, ou même des applaudissements de parlementaires de tous bords au Congrès de Versailles après le 13 novembre, le climat politique s’est tendu dès le lendemain de l’attaque qui a fait 84 morts à Nice le 14 juillet. Il faut dire que la droite n’a que faire des appels à « l’unité » et à la « cohésion » lancés la semaine dernière par François Hollande et Manuel Valls. A neuf mois de la présidentielle, plus question de faire le moindre cadeau à l’exécutif. C’est ce qui est ressorti de la réunion des parlementaires Les Républicains (LR) convoquée ce mardi par Nicolas Sarkozy au siège du parti. L’ancien chef de l’Etat y a rejeté toute « unité factice ». « Il y a de la colère et la classe politique dans son ensemble est interpellée », a-t-il lancé.
« C’est la différence entre un attentat et cinq attentats, explique à Marianne le député juppéiste Benoist Apparu. L’unité nationale est indispensable pour la compassion mais sur les moyens engagés, trop de questions se posent pour qu’on reste sans rien dire. » Avis partagé par son collègue filloniste Thierry Mariani : « L’unité nationale, ce n’est pas un programme permanent. On est à plus de 200 morts, le gouvernement a des comptes à rendre. » Le député Georges Fenech, qui a présidé la commission d’enquête parlementaire sur les attentats de 2015, est tout aussi catégorique : « Nous avions observé une sorte de retenue après janvier 2015 mais le Bataclan était déjà l’attentat de trop, assène-t-il. Nous sommes en démocratie, l’opposition doit jouer son rôle. »
Les ténors de la droite n’ont donc eu aucun état d’âme à taper sur l’exécutif, même si chacun l’a fait à son rythme. Alain Juppé a surpris en passant à l’offensive dès le lendemain de la tragédie. Vendredi sur RTL, il a affirmé que « si tous les moyens avaient été pris », l’attentat de Nice « n’aurait pas eu lieu ». Ce mardi sur BFMTV, le maire de Bordeaux a tenté de se justifier en admettant que « le risque zéro n’existe pas ». La veille, au bureau politique de LR, Nicolas Sarkozy avait raillé son rival, en déclarant qu’il n’était « pas raisonnable de dire que si on avait fait ceci ou cela, l’attentat de Nice n’aurait pas eu lieu ». Pourtant, l’ex de l’Elysée n’est pas en reste pour porter des coups à l’exécutif. Dimanche sur TF1, il a estimé que « tout ce qui aurait dû être fait depuis 18 mois ne l’a pas été ». Bruno Le Maire, lui aussi candidat à la primaire, a pour sa part cherché à prendre de la hauteur en attendant lundi pour réagir. « Nous, responsables politiques, nous devons éviter les querelles, les petites phrases », a intimé le député de l’Eure au 20H de France 2.
« Ce n’est pas en appelant à l’union nationale qu’on se différencie »
On le voit, la droite se cherche, coincée entre son désir de pilonner l’exécutif et la peur d’être accusée d’envenimer la situation. Pour ne rien arranger, comme le confie un député LR, « il y un effet primaire : chacun cherche à se démarquer sur le sujet, et ce n’est pas en appelant à l’union nationale qu’on se différencie. » L’autre raison pour laquelle Les Républicains mènent l’offensive, c’est le Front national en embuscade. Dès l’attentat contre Charlie Hebdo, Marine Le Pen avait rejeté l’unité nationale en organisant son propre rassemblement. Ne pas porter la contradiction au gouvernement, « c’est laisser un boulevard à l’extrême droite », s’inquiète Thierry Mariani.
Mais la droite, consciente que les Français ont plus qu’assez des querelles politiciennes, sait qu’elle ne peut pas pousser le bouchon trop loin. Mardi soir, les députés LR voteront la prolongation de l’état d’urgence souhaitée par le gouvernement, comme ils ont voté les loi anti-terroristes présentées par l’exécutif depuis 2012. Leur patron, Christian Jacob, les a d’ailleurs mis en garde contre tout « dérapage » dans l’Hémicycle. Pour donner une image responsable, mais aussi, sans aucun doute, parce que l’opposition n’a aucune recette miracle contre le terrorisme dans sa besace. Comme l’admet en soupirant ce député LR, « chacun sort sa phrase la plus martiale possible, mais qu’est-ce qui peut empêcher quelqu’un de foncer dans une foule avec un camion ?«
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