Face aux attentats, "la France n'était pas prête"

La commission d’enquête parlementaire sur l’action de l’État face aux attentats de janvier et novembre 2015 a livré ses conclusions ce mardi 5 juillet. D’où il ressort que le renseignement français doit entièrement se réorganiser face au terrorisme.

Huit mois après les attentats du 13 novembre, les interrogations restent nombreuses. Aurait-on pu éviter ces attaques qui ont fait 130 morts et près de 500 blessés ? Comment des individus connus et fichés par les services de renseignement ont-ils pu préparer de telles actions ? L’Etat a-t-il failli ? Après six mois d’enquête, la commission parlementaire sur « les moyens mis en œuvre par l’Etat pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015 » a rédigé un rapport de 300 pages, qu’elle a rendu ce mardi 5 juillet.

Pour la commission, la France a fait du mieux qu’elle pouvait avec les moyens qu’elle avait, mais elle n’était « pas prête ». « Maintenant il faut se préparer », avertit le rapport, qui liste 39 propositions en ce sens, dont sept sont destinées à la question du renseignement. Car les députés de la commission insistent : il faut absolument mettre fin à l’éclatement des différents services d’intervention dans la lutte antiterroriste. Le rapporteur de la commission, Sébastien Pietrasanta (PS), préconise ainsi « la fusion des trois forces d’élite » (BRI, GIGN, Raid), doutant du « bien-fondé du maintien de plusieurs forces d’intervention spécialisées. »

En finir avec l’éclatement des services

Au ministère de l’Intérieur même, les structures s’empilent. La création de l’Emopt (Etat-Major opérationnel de prévention du terrorisme) en 2015 par Bernard Cazeneuve n’a ainsi pas abouti à la suppression de l’Uclat (Unité de coordination de la lutte antiterroriste), créé en 1984. Soulignant la confusion des rôles entre les deux organisations, les députés appellent également à leur fusion. D’autant plus que ces différents services ont tendance au mieux à s’ignorer, au pire à se faire concurrence dans la grande tradition de la « guerre des services ».

De même, la commission en appelle à la création d’une direction générale du renseignement territorial, dans laquelle se fonderaient les services de renseignement de la police et de la gendarmerie. Un moyen de redonner un élan au renseignement de proximité, en recul depuis la dissolution des renseignements généraux (RG) en 2008 par Nicolas Sarkozy. Cette refonte devra s’organiser autour d’une agence nationale de lutte contre le terrorisme, placée sous l’autorité directe du Premier ministre, ainsi que d’une base de données commune. Car les trente députés de la commission insistent aussi sur les « grandes difficultés à obtenir le nombres d’individus suivis par les différents services chargés de la lutte antiterroriste » car… aucun fichier commun n’existe. Depuis 2015, une application informatique, le Fichier des signalés pour la prévention et la radicalisation (FSPRT), a bien été créé mais seuls les services affiliés à l’Intérieur y ont accès – ce qui n’est pas le cas de la DGSE, par exemple.

Un échec du renseignement

A cet éparpillement s’ajoute une autre remise en cause de la part de la commission : celle de l’efficacité de l’état d’urgence, mis en place au lendemain des attentats de novembre 2015. La commission se montre sceptique quant à son action, qui n’aurait qu’une « portée limitée sur la sécurité nationale ». Elle préconise donc d’abaisser les effectifs de l’opération Sentinelle et d’ajouter en revanche 2.000 policiers et gendarmes au programme Vigipirate.

Même si les députés considèrent qu’il n’y a pas eu de « gros ratés », c’est donc bien le constat d’un échec du renseignement qui est dressé. « Les deux grands patrons du renseignement ont reconnu, pendant leurs auditions, que les attentats de 2015 représentent un ‘échec global du renseignement' », admet Sébastien Pietrasanta. Les failles du renseignement pénitentiaire sont symboliques de cet échec. « Tout est à faire », confesse à son tour le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas.

 


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