Michèle Alliot-Marie candidate pour 2017 : le bingo des gaullistes

Michèle Alliot-Marie annonce ce lundi 20 juin dans « Le Monde » qu’elle se présentera à l’élection présidentielle de 2017. Seule. Suivant le chemin tracé par d’illustres gaullistes, dont elle reprend tous les codes.

Elle s’est finalement décidée. Michèle Alliot-Marie a confirmé au Monde ce lundi 20 juin qu’elle serait candidate à l’élection présidentielle de 2017, en inscrivant sa démarche dans une filiation gaulliste. « Pour moi, le gaullisme, ce n’est pas une nostalgie (…) C’est une grille de lecture et d’action pour l’avenir« , fait savoir la députée européenne, qui lancera formellement sa candidature le 4 juillet lors d’un meeting à Schiltigheim, dans le Bas-Rhin. Quoi qu’il en soit, « MAM » paraît déterminée à se lancer en solitaire, sans passer par la case primaire et avec le seul soutien de son micro-parti récemment créé, Nouvelle France. Poussant donc jusqu’au bout la démarche « gaulliste » dont tous les candidats de Les Républicains (LR) – de Sarkozy à Juppé en passant par Gaino, Le Maire, Fillon et NKM – se réclament.

Est-ce vraiment une surprise ? Si l’on remonte l’histoire de la Ve République, les candidatures individuelles de gaullistes à l’élection présidentielle sont une véritable tradition, de l’ex-Premier ministre du Général de Gaulle Michel Debré en 1981 à Dominique de Villepin en 2012. A tel point qu’il est possible d’établir un modèle de la candidature du « gaulliste solitaire« . Décryptage avec l’aide de Jean Garrigues, professeur d’histoire contemporaine à l’université d’Orléans.

Une critique des partis politiques

Il est de coutume de rappeler que, selon le mot attribué au Général de Gaulle, l’élection présidentielle est « la rencontre entre un homme et le peuple ». En réalité, l’homme de l’Appel du 18 juin n’a jamais prononcé cette phrase. « Ceux qui la citent reprennent simplement une idée développée par De Gaulle : que l’élection présidentielle permette une rencontre spontanée entre un homme et le peuple, en dehors des partis« , nous précise Jean Garrigues.

Michèle Alliot-Marie laisse aujourd’hui entendre qu’elle pourrait faire sien ce discours d’indépendance à l’égard des partis. « Je prends du recul et de la hauteur« , a-t-elle ainsi indiqué au Monde. Une position qui fait penser à celle de Marie-France Garaud, l’ancienne conseillère de Georges Pompidou et Jacques Chirac, candidate à la présidentielle de 1981 : « Je suis une femme, seule, sans parti, sans appareil« , revendiquait-elle. En 2011, Dominique de Villepin, candidat à la présidentielle de 2012, expliquera sans rire qu’il « préside un parti au-dessus des partis« .

Le 4 juillet, pour son premier meeting, MAM devrait donc critiquer « le régime des partis » et se définir comme « une femme libre ».

Autorité de l’État, rassemblement, grandeur

Le gaullisme recouvre aussi et surtout un corpus idéologique à mettre en évidence au moment de la déclaration de candidature. « Les idées d’autorité de l’État, de rassemblement et de grandeur sont les trois points cardinaux du gaullisme« , relève Jean Garrigues. Michèle Alliot-Marie a semble-t-il reçu le message : dans l’entretien accordé au Monde, elle se prononce pour un « État fort« , le « rassemblement de tous les Français » et un projet « qui prend en compte les réalités géostratégiques » de la France.

De la même façon, Michel Debré martèle en 1981 que « les Français ont besoin d’une France forte« , c’est à dire d’un État puissant.  « La droite française a renoncé à dire qu’il fallait favoriser l’assimilation des étrangers et non le communautarisme, qu’il fallait leur parler de la grandeur de la France et de l’amour qu’ils devaient à leur nouvelle patrie« , critiquera Charles Pasqua lors de l’élection présidentielle de 2002, quelques jours avant d’annoncer le retrait sa candidature, faute d’avoir obtenu suffisamment de parrainages.

Le 4 juillet, MAM évoquera probablement « une certaine idée de la France » et plaidera pour un « État stratège ».

Aucun intérêt pour les sondages

Michèle Alliot-Marie veut aller à la rencontre des Français « sans se préoccuper des sondages« . Voilà encore un leitmotiv des candidats gaullistes. « La logique gaulliste, c’est le recours à un homme providentiel. Pendant longtemps, De Gaulle n’a pas cru aux sondages« , rappelle Jean Garrigues. En 1981, Michel Debré tempête contre des « sondages truqués« . Dans le même esprit, Nicolas Dupont-Aignan reste aujourd’hui persuadé qu’il va faire mentir les sondages. « L’histoire est en marche et personne ne comprend rien. J’ai fait le plus dur. Le jour où on sera à 8% ou 10%, on emportera tout », a-t-il déclaré en mars à Libération.

Le 4 juillet, MAM se demandera quel score aurait fait le Général de Gaulle dans les sondages en 1957.

Et à la fin ?

Les précédentes candidatures gaullistes initiées en solo ont toutes mené à l’échec. Les uns ont réalisé des scores catastrophiques, tels Michel Debré (1981, 1,66%), Marie-France Garaud (1981, 1,33%) ou Nicolas Dupont-Aignan (2012, 1,79%). Les autres, comme Charles Pasqua (2002), Nicolas Dupont-Aignan pour sa première tentative (2007) ou Dominique de Villepin (2012), ont jeté l’éponge avant le premier tour. Pour accéder à l’Élysée en 2017, MAM devra étudier attentivement les exemples à suivre… et surtout ceux à ne pas suivre.

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