Larossi Abballa, le jeune Français de 25 ans décrit par ses anciens comparses comme un « comique » sans « grande connaissance de la religion », est passé à l’acte. Il a assassiné, ce lundi 13 juin, deux policiers à coups de couteau. Retour sur le profil de « lagross », un jeune en quête de « reconnaissance », qui se la jouait « beau goss » le jour et djihadiste la nuit.
Lorsque Larossi Abballa, un petit délinquant radicalisé des Mureaux, cité sensible d’Ile-de-France, recopie les adresses de plusieurs commissariats de police dans un calepin, en 2011, il n’est pas encore devenu le combattant aguerri qui poignardera à leur domicile, cinq ans plus tard, ce lundi 13 juin, un couple de policiers, au nom de l’Etat islamique. Mais il s’y prépare déjà.
A l’époque, le jeune Français de 25 ans, seul garçon d’une fratrie de quatre enfants, originaire du Maroc, qui rêve de mariage et de créer « une entreprise de prestation de services », est poursuivi par la justice pour sa participation dans une filière d’acheminement de djihadistes au Pakistan. Marianne a eu accès au dossier de son jugement d’alors, en 2011. Il comprend de nombreux éléments de personnalité. Larossi Abballa reconnaît par exemple, devant les enquêteurs, avoir « fait des recherches pour localiser les commissariats », sans toutefois, « savoir pourquoi ». Car son but à lui, quand il ne joue pas au « beau goss » devant son ancienne petite amie, c’est de partir faire le djihad.Un « comique » ne connaissant pas « grand chose en matière de religion »
Au Pakistan si possible, auprès des talibans. Ou au Waziristan – où se rend à peu près à la même époque un certain Mohamed Merah – ou encore en Tunisie. Voire, faute « d’alternatives », en France. « Akhii s’il vous plaît, laissez moi y aller [au Pakistan] svp svp svp », écrit-il ainsi le 15 février 2011 à l’émir de la filière, Mohamed Abdul Raseed, un Indien de 34 ans, le seul à avoir des contacts parmi les disciples d’Al Qaïda.
« Dis-moi en un peu, j’ai soif de sang, Allah m’en est témoin », avait-il d’ailleurs confié un peu plus tôt, à Noël, le 25 décembre 2010, à l’un des sept membres du groupe. Et d’insister quelques semaines plus tard, le 19 février 2011 :
« Franchement, crois-tu qu’ils ont besoin de nous là-bas, Allah avec sa volonté va nous donner les moyens de hisser le drapeau ici », (…) « faut commencer le taf » (…) « le nettoyage de kouffar » (…) « c’est un défi à relever » (…)« on va pas attendre d’être tous allés chez les frères et revenir chacun notre tour pour commencer… »
Des velléités qui vaudront à celui que ses comparses décrivaient comme un petit « comique », « mystérieux » et « bizarre », ne connaissant pas « grand chose en matière de religion », d’être condamné, en 2013 à trois ans de prison dont six mois avec sursis.
« Lunique » en quête de reconnaissance
Depuis, Larossi Abballa, qui a prêté allégeance à Abou Bakr Al-Baghdadi, chef autoproclamé de l’Etat islamique, il y a trois semaines seulement, a épuisé sa patience. Ce qui lui semblait « encore » si « loin » en 2011 – trouver la femme idéale, frapper la France – s’est réalisé, noyé sous son désir de « reconnaissance », comme l’explique sa soeur Aamara dès 2011. Il « manque de confiance », il est « en quête d’identité », de « reconnaissance », disait-elle, alors que son frère venait de créer une nouvelle adresse email pour communiquer : luniqueXXX[at]yahoo.fr.
« Lagross » (surnom que lui avait donné son ancien émir) a pourtant réussi à se faire oublier malgré les surveillances. Comme si toute l’affaire n’avait été que « des paroles en l’air » ainsi qu’il l’a lui-même confié aux juges, d’après l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel à laquelle Marianne a eu accès. Des paroles qui prennent aujourd’hui une tournure nouvelle au regard du drame qui s’est joué, ce lundi 13 juin, dans un quartier pavillonnaire sans histoires, à Magnanville, dans les Yvelines, au domicile de deux policiers.
« Il était venu chez moi, maintenant c’est moi qui viens chez lui », confie Larossi Abballa, selon Libération, aux hommes du RAID qui l’encerclent vers 21h00 ce soir là. Près de lui, le couteau ensanglanté qu’il a utilisé pour assassiner le chef adjoint des unités de police judiciaire au commissariat des Mureaux, Jean-Baptiste Salvaing, 42 ans et sa compagne, Jessica Schneider, 36 ans, secrétaire administrative au commissariat voisin de Mantes-la-Jolie.
Sur le canapé, le petit garçon du couple, 3 ans. « Je ne sais pas encore ce que je vais faire avec lui » déclare le terroriste présumé dans la vidéo du crime, qu’il retransmet en direct sur son compte Facebook. Dehors, les policiers n’attendront pas qu’il se décide. Après l’échec des négociations, ils donnent l’assaut et l’abattent. Le fils des policiers sera retrouvé en état de sidération, mais en vie.
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