L’Autorité de la concurrence a dit non jeudi à l’accord de distribution conclu entre le groupe Canal+ et BeIN Sports. Un sérieux coup d’arrêt aux ambitions de l’actionnaire de la chaîne cryptée, qui misait beaucoup sur les droits sportifs.
C’est non. L’Autorité de la concurrence a rejeté l’accord de distribution conclu entre Canal+ et le groupe qatari BeIN Sports, jeudi 9 juin. Une pierre dans le jardin de Vincent Bolloré, le président du conseil de surveillance de Vivendi (la maison-mère de Canal+), qui attendait beaucoup de cette alliance. Et se trouve donc contraint de revoir sa stratégie.
Que disait l’accord retoqué ? Les deux groupes avaient topé pour que Canal+ distribue en exclusivité dans ses offres les chaînes BeIN Sports sur une durée de cinq ans. Montant total : 1,5 milliard d’euros minimum. Or, Canal et BeIN disposent à eux deux de la quasi-totalité des droits sportifs de diffusion, et notamment de tous les matchs du championnat de France de Ligue 1. Leur alliance a donc été jugée trop risquée par l’Autorité de la concurrence, mais aussi par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) : dans un avis confidentiel rendu le 3 juin et révélé par BFM Business, ce dernier craignait que les deux groupes ne s’entendent lors des prochains achats de droits sportifs.
Sans l’apport des chaînes BeIN, c’est tout un pan du projet imaginé par Vincent Bolloré qui tombe à l’eau. L’homme d’affaires breton, qui fait brutalement le ménage dans les émissions en clair de Canal+ – d’où les départs d’un grand nombre d’animateurs, comme Yann Barthès, Maïtena Biraben ou Ali Baddou – misait sur le renforcement de l’offre en crypté. A savoir le cinéma, les séries, mais surtout le sport, destiné à retenir des abonnés qui désertent par milliers. C’est raté : le fan de foot devra toujours choisir entre Canal+ et BeIN Sports – ou alors payer pour les deux à la fois, sans pouvoir les coupler dans un même abonnement.
Prenant acte de la décision de l’Autorité de la concurrence, le groupe Canal+ indique sur Twitter qu’il « devra donc travailler sur d’autres solutions pour faire cesser les pertes des chaînes françaises Canal+ ». Le message est court, mais lourd de sous-entendus. Vincent Bolloré compte-t-il faire de ce refus un argument pour infliger une cure de rigueur à ses équipes ? Adepte des coups de pression à répétition, l’actionnaire a déjà laissé planer la menace d’une disparition pure et simple de Canal+. Son grand argument, c’est la situation financière de la chaîne : 264 millions d’euros de perte opérationnelle ajustée en 2015, selon ce que Bolloré indiquait en février. Mais comme le montre une enquête de Marianne en kiosques vendredi 10 juin, le bilan de la Société d’édition de Canal Plus montre au contraire un bénéfice net de 57 millions d’euros l’an dernier. Un tour de passe-passe réalisé en imputant intégralement à Canal+ France des coûts habituellement partagés avec d’autres entités du groupe (par exemple la production de reportages). L’Autorité de la concurrence a-t-elle pris en compte cette astuce ? En tout cas, les lamentations de Bolloré ne l’ont visiblement pas émue.
>>> Retrouvez notre dossier « Canal+ : Bolloré ma tuer » dans le numéro de Marianne en kiosques.
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