Selon le trésorier du groupe socialiste, Christian Bataille, des députés, dont certains ex-ministres, auraient accumulé un retard de paiement « de plus de six mois ». Le manque à gagner pour le groupe PS se chiffrerait à « des dizaines de milliers d’euros ».
Après les frondeurs, les mauvais payeurs. Selon le Canard enchaîné de ce mercredi 8 juin, cela fait plusieurs mois que quelques députés PS ne payent plus leur cotisation au groupe socialiste à l’Assemblée nationale, entre 200 euros et 800 euros mensuels, selon le nombre de mandats.
C’est le trésorier du groupe Christian Bataille, par ailleurs député du Nord, qui a dénoncé dans une réunion interne les retards de paiement de certains élus « pour la plupart anciens ministres« . Parmi ces députés en délicatesse avec leurs obligations partisanes, on retrouve selon le palmipède les anciens ministres Guillaume Garot, Victorin Lurel, Aurélie Filippetti et Carole Delga, ainsi que le député macroniste Pascal Terrasse (voir leurs réactions dans l’encadré ci-dessous). Pas de jaloux entre légitimistes et frondeurs puisqu’à l’exception d’Aurélie Filippetti, ces élus partagent la ligne politique du gouvernement. Ces cotisations servent notamment à payer les salaires des quelque 40 salariés du groupe chargés d’assister les députés sur les dossiers législatifs. Avant de rejoindre le groupe socialiste, chaque député doit à ce titre signer son règlement, dans lequel est stipulée l’obligation de verser une cotisation mensuelle.
Contacté par Marianne, Christian Bataille confirme :
« Oui, ces députés sont en retard, de manière conséquente. Cela peut aller jusqu’à plus de six mois. J’ai adressé à chacun une lettre de rappel pour leur demander de jouer le jeu de la solidarité, je n’ai pas eu de réponse. »
D’autres membres du groupe seraient en retard mais « de façon beaucoup plus acceptable« , selon le député du Nord. Le trésorier du groupe ne dément pas l’information du Canard enchaîné selon laquelle le manque à gagner se chiffrerait à « des dizaines de milliers d’euros« .
Comble de l’histoire, le trésorier du groupe explique que les députés peuvent régler leur cotisation avec leur indemnité représentative de frais de mandat (IRFM). En effet, selon les services de l’Assemblée nationale, les députés doivent utiliser cette somme de 5770 euros mensuels pour « faire face aux diverses dépenses liées à l’exercice de leur mandat qui ne sont pas directement prises en charge ou remboursées par l’assemblée ». Autrement dit, la somme ne sortirait même pas directement de leur poche…
Si l’IRFM n’est pas utilisée en totalité, le député est censé reverser le reliquat à l’Assemblée à l’issue de la législature. Mais, comme l’expliquait le déontologue de l’Assemblée Ferdinand Mélin-Soucramanien à Francetvinfo en 2015, « il n’y a pas d’encadrement très strict« . En clair, les députés en font ce qu’ils veulent.
Selon le Canard enchaîné, Christian Bataille aurait suggéré de retirer leurs investitures aux prochaines législatives à ces mauvais payeurs présumés. « Cela ne relève ni de moi ni du président du groupe mais du Parti socialiste« , tempère le député, interrogé par Marianne. Avant d’ajouter, l’air de rien : « Mais il est tout à fait envisageable que le PS se montre solidaire de son groupe parlementaire.« Si ce chantage aux investitures se confirmait, nul doute que certains retrouveraient le chemin de leur portefeuille.
Ce soutien d’Emmanuel Macron critique un système dans lequel ceux qui ont un mandat exécutif local doivent payer plus. « Donc on considère que les députés qui cumulent utilisent leurs moyens locaux pour exercer leur mandat de député. Ce serait au contribuable local de payer pour le fonctionnement du mandat parlementaire. Moralement, c’est bizarre. » Concernant la menace aux investitures, il se veut rigolard : « Je leur dis chiche ! S’ils veulent m’amener chez Mélenchon je peux le faire. Moi, à mes électeurs, si je leur dis que je ne paye pas mes cotisations au groupe socialiste, c’est des points pour moi. »
Pour Pascal Terrasse, la publication de son nom dans le Canard pourrait être liée au contexte politique à gauche. « Si je suis tourmenté psychologiquement, je me dis que c’est parce que je soutiens Emmanuel Macron qu’on jette en pâture mon nom. Je sais qu’on va entrer dans une période où tous les coups sont permis. »
Carole Delga va-t-elle désormais rembourser la différence, soit 4.000 euros ? Pas immédiatement, assure encore son directeur de cabinet. « Carole Delga veut d’abord recevoir cette notification du changement de régime, et ensuite savoir pourquoi les présidents de conseils régionaux devraient payer plus« , explique-t-il. Et d’ajouter que Carole Delga « verse déjà 1.400 euros par mois au Parti socialiste, en additionnant l’Assemblée, la Haute-Garonne et la Région« . Renseignements pris, les élus cumulards doivent payer davantage car le groupe socialiste considère qu’ils peuvent compter sur leurs assistants locaux pour exercer une partie des tâches afférant à leur mandat parlementaire. Voilà qui devrait déplaire à Laurent Blondiau… lui-même salarié de la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées.
Contactés par Marianne, les autres députés concernés n’ont pas encore répondu.
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