A partir de ce vendredi 10 juin, le monde du football aura les yeux braqués sur la France, où débutera l’Euro. La compétition, qui s’achèvera le 10 juillet, peut faire office de test pour François Hollande. Entre gestion de la crise sociale, relance possible de l’activité et contrôle de la menace terroriste…
François Hollande mouille le maillot. A moins d’une semaine du coup d’envoi de l’Euro de football, qui se joue en France du 10 juin au 10 juillet, le président de la République se fait le premier promoteur de la compétition. Invité de France Inter ce dimanche 5 juin, le chef de l’Etat a tenu, comme à son habitude lorsqu’il parle foot, des propos pour le moins politiques. Il faut dire que pour lui aussi, l’Euro français peut être une étape de reconquête… ou d’échec.
« Personne ne comprendrait que la grève des trains ou des avions puisse empêcher le déplacement des spectateurs. » Le transit des 2,3 millions de personnes attendues dans les stades et 6,5 millions dans les « fan zones » tout au long de la compétition ne saurait être perturbé par une poignée de syndicalistes, selon François Hollande. Alors que le pays connaît une troisième semaine de grèves, qui ont perturbé l’approvisionnement en carburant avant les transports collectifs, le chef de l’Etat compte profiter de l’Euro pour faire cesser le mouvement.
S’il tente aujourd’hui de prendre l’opinion à partie pour délégitimer le mouvement social, François Hollande a tout de même concédé du terrain aux syndicats de transporteurs ces dernières semaines. Les chauffeurs routiers ont été les premiers à bénéficier des concessions de l’exécutif. Le secrétaire d’Etat aux Transports Alain Vidalies leur a assuré le 21 mai qu’ils conserveraient leur régime dérogatoire interdisant la majoration de leurs heures supplémentaires de moins de 25%. Le même Alain Vidalies a ensuite négocié directement avec les syndicats de cheminots sur le temps de travail à la SCNF. Suffisant pour que la CFDT lève son préavis de grève.
« Personne n’a dit : ‘On va bloquer l’Euro' »Si les autres syndicats – CGT, FO et Sud en tête – maintiennent la pression pour exiger le retrait de la loi Travail, il semblerait que les actions visant à paralyser directement l’Euro de football ne soient pas d’actualité. « Personne n’a dit : ‘On va bloquer l’Euro.’ On n’est pas stupide. (…) Il pourra y avoir quelques actions ici ou là, mais quand vous êtes face à un mur il n’y a pas de choix que de continuer », tempère ainsi ce lundi matin Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force ouvrière.
Mais en agitant la menace de nouvelles actions, les syndicats pourraient obtenir d’ultimes concessions à la veille du coup d’envoi de la compétition. Pour preuve : un millier de cheminots ont envahi ce lundi matin le hall et les voies de la gare Montparnasse, à Paris, où se tiennent les dernières tractations sur leurs conditions de travail.
Coup d’envoi de l’ #EURO2016 ce matin à la gare #Montparnasse. pic.twitter.com/tYwnt9q11Q
— Sosthène Kinz’Côtes (@ImiksimikJawad) 6 juin 2016
Depuis l’émission Dialogues citoyens du 14 avril, le chef de l’Etat ne cesse d’affirmer que « ça va mieux ». Moins de déficit, plus de croissance… oui, ça va mieux. Sauf sur le front de l’emploi, le principal cheval de bataille de François Hollande depuis 2012. Pour stimuler la reprise de l’activité et inverser durablement la courbe du chômage, ce dernier compte sur l’impact économique de l’Euro de football en France.
Des emplois surtout temporairesUne étude du Centre de droit et d’économie du sport (CDES) de Limoges a chiffré à 1,27 milliard d’euros l’impact économique de l’Euro. Ce montant correspond à la somme des apports financiers des acteurs étrangers sur le territoire français. Et, d’après la même étude, 26.000 emplois seront créés du fait de cet impact. Ceux-ci s’ajoutant aux près de 94.000 personnes employées pour l’organisation de la compétition et aux 6.000 volontaires.
Si ces emplois devraient donc accentuer la baisse du chômage constatée ces derniers mois, ils appellent néanmoins à la mesure. D’abord, parce que ces près de 100.000 postes créés pour l’organisation de l’Euro ne sont que temporaires. Ensuite, parce qu’ils dissimulent le gouffre financier que représente le championnat d’Europe de football pour l’Etat et les collectivités locales. Avec la construction et la rénovation des stades, ainsi que l’accueil des fans, ce sont aux moins 650 millions d’euros de fonds publics qui ont été investis. Une somme bien supérieure aux recettes attendues par l’Etat et les villes hôtes : à peine 250 millions d’euros.
Les villes qui accueilleront les matches de la compétition doivent supporter d’autres dépenses : celles liées à la sécurisation des « fan zones ». Ces espaces, qui réuniront des dizaines de milliers de supporters dans chacune des villes hôtes, font l’objet de grandes inquiétudes. Même le préfet de police de Paris a actionné la sonnette d’alarme, en adressant à Bernard Cazeneuve un courrier dans lequel il estime que ses services ne sont « pas en mesure de garantir un niveau optimal de sécurisation ». En retour, le ministre de l’Intérieur lui a opposé une fin de non recevoir : « Si sous prétexte que la menace est élevée, nous cédons à la menace en cessant d’être nous-mêmes, alors nous organisons la victoire des terroristes. Et je pense qu’aucun gouvernement ayant la passion de la France et de la République ne le ferait. »
La menace terroriste qui pèse sur l’Euro de football est bien réelle. Et la mobilisation des forces de l’ordre dans les stades et les « fan zones » pourrait même inciter à des actions loin de ces lieux. Les services secrets ukrainiens ont ainsi annoncé ce lundi 6 juin que le Français arrêté le 21 mai, pour préparation d’attentats, prévoyait de commettre « quinze actes terroristes qui étaient planifiés en France à la veille et pendant le championnat d’Europe de football. » Ce Lorrain, qui a fait part aux services ukrainiens de son opposition à « la politique de son gouvernement concernant l’arrivée massive d’étrangers en France, la diffusion de l’islam et la mondialisation », aurait évoqué des projets d’attentats visant potentiellement des synagogues ou des mosquées.
Sur France Inter ce dimanche, François Hollande a reconnu qu’il y a « très clairement une menace terroriste », mais estime que l’Etat a « mis tous les moyens » pour y répondre.
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