Après quatre ans de procédure, les juges viennent de rendre une ordonnance de non-lieu dans l’affaire qui opposait Nicolas Sarkozy et Mediapart au sujet de l’authenticité d’un document libyen en rapport avec les soupçons de financement de la campagne présidentielle de 2007 de l’ancien président.
Edwy Plenel n’est pas peu fier. Après quatre ans de procédure, la justice vient de rendre un non-lieu dans l’affaire qui opposait son média à Nicolas Sarkozy. Le 28 avril 2012, Fabrice Arfi et Karl Laske publiaient un article intitulait « Sarkozy-Kadhafi : la preuve du financement » dans lequel les deux journalistes révélaient l’existence d’un document daté de 2006 et signé de la main de Moussa Koussa, alors chef des services de sécurité et du renseignement extérieur de Mouammar Kadhafi, attestant un « accord portant sur le soutien à la campagne électorale du candidat aux élections présidentielles Monsieur Nicolas Sarkozy pour un montant de 50 millions d’euros ».
Dans la foulée de la publication, Nicolas Sarkozy porte plainte pour faux, recel de faux, usage de faux et diffusion de fausses nouvelles. Le président de la République d’alors qualifiant ce document de « faux grossier ». Une procédure inhabituelle : en matière de presse, le combat se règle généralement sur le terrain de la diffamation. A plusieurs reprises d’ailleurs, les avocats de Mediapart dénoncent un « recours à des procédés contraires au régime protecteur de la liberté de l’information et du droit de la presse, garanti par nos principes constitutionnels et protégé par la loi du 29 juillet 1881 ».
Après quatre années, les juges René Gros et Emmanuelle Legrand ont fini par faire tomber toutes les accusations de Sarkozy : « L’ensemble des investigations visant à déterminer si le document publié par Mediapart était un faux matériel c’est-à-dire, indépendamment de son contenu, un support fabriqué par montage ou tout autre moyen, ou altéré par des falsifications de toutes natures, n’a pas permis de l’établir ». Selon les experts consultés lors de l’instruction, la signature est bien celle de Moussa Koussa et la note publiée par Mediapart a toutes les caractéristiques « d’un document officiel libyen ».
Le journal en ligne se félicite donc, un peu trop vite d’ailleurs, que « les juges ferment la porte » à l’hypothèse d’un « faux intellectuel », c’est-à dire-d’un document authentique dans lequel on aurait glissé de fausses informations. « Cette piste purement théorique part d’une incertitude sur la date de la réunion mentionnée dans la note libyenne, Brice Hortefeux, alors ministre délégué aux collectivités locales, affirmant avoir été à Clermont-Ferrand le jour mentionné, soit le 6 octobre 2006. Or les juges ferment aussi cette porte, affirmant que ‘ces incertitudes ne permettent pas de conclure formellement à l’impossibilité d’une telle réunion' », claironne Edwy Plenel.
Une interprétation propre au fondateur du journal, les magistrats réfutant simplement l’argument de Brice Hortefeux plaidant qu’il ne pouvait être à cette réunion ce jour-là pour cause d’agenda incompatible. La possibité d’une manipulation des services secrets libyens visant à déstabiliser Sarkozy, qui avait poussé à l’intervention en Libye contre Kadhafi en 2011, n’est toujours pas totalement à exclure. On se souvient que c’est à cette période que Saïf Al-Islam, le fils du Colonel, avait accordé à la chaîne Euronews cet entretien dans lequel il accusait le président français d’avoir reçu des millions pour sa campagne de 2007…
Reste une belle revanche pour les enquêteurs de Mediapart qui permet de renvoyer la balle dans le camps sarkozyste. « Nous ne saurions croire que la justice française ne se donne pas les moyens de répondre aux deux questions posées par ce scandale libyen : le régime libyen de Mouammar Kadhafi a-t-il financé la campagne électorale de Nicolas Sarkozy afin d’être élu président en 2007 ? Le régime français de Nicolas Sarkozy a-t-il contribué à la chute de ce dictateur afin d’effacer les traces de cette compromission ? », conclut Plenel.
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