Plusieurs membres ou ex-membres d’EELV interrogées par Mediapart et France Inter ont témoigné début mai à visage découvert de faits pouvant relever de harcèlement voire d’agression sexuelles commis par Denis Baupin, ex-élu parisien aujourd’hui vice-président de l’Assemblée nationale, qui a quitté Europe Ecologie-Les Verts il y a quelques semaines. Trois d’entre elles ont porté plainte contre l’élu ce 2 juin.
>> Cet article a été publié une première fois le 9 mai
C’est une enquête édifiante que publient ce lundi 9 mai nos confrères de Mediapart et France Inter. Plusieurs femmes témoignent d’agissements relevant de l’agression sexuelle ou du harcèlement sexuel mettant en cause Denis Baupin, député et vice-président de l’Assemblée nationale, qui quitté Europe Ecologie-Les Verts le 18 avril. Quatre d’entre elles ont notamment accepté de parler à visage découvert.
De son côté, Denis Baupin nie les faits qu’il résume à des « jeux de séduction« …
Sandrine Rousseau, porte-parole d’EELV, raconte ainsi une scène remontant à octobre 2011, alors qu’elle se rend aux toilettes lors d’une réunion de préparation du programme de la présidentielle des Verts, à Montreuil :
« Dans le couloir qui longe la salle, Denis Baupin est venu. Il m’a plaquée contre le mur en me tenant par la poitrine, et a cherché à m’embrasser. Je l’ai repoussé violemment. »
Peu après, elle raconte à l’un de ses voisins ce qui vient de se produire. « Il m’a dit : ‘Ah, il a recommencé.’ Ça a été sa phrase. »
Isabelle Attard, députée du Calvados qui a quitté EELV en 2013, assure avoir reçu des dizaines de textos insistants de Denis Baupin. « C’était du harcèlement quasi quotidien de SMS provocateurs, salaces. Il y avait des moments où on en avait plus, c’était par salves », explique-t-elle. « C’était par exemple : ‘J’aime bien quand tu croises tes jambes comme ça’. C’était même crûment dans des réunions ou des déjeuners de travail le fait de me proposer d’être mon amant. Au début, c’est dit sur le ton de la rigolade. Et puis, cela devient vite très lassant, pénible… »
Elen Debost, adjointe écologiste à la jeunesse à la mairie du Mans, raconte elle aussi avoir subi « plusieurs mois de SMS d’incitation sexuelle de M. Baupin ». « Au total, j’ai reçu une centaine de messages. Du type : ‘Je suis dans un train et j’aimerais te sodomiser en cuissarde’. ‘J’adore les situations de domination. Tu dois être une dominatrice formidable.’ ‘J’ai envie de voir ton cul’. »
Annie Lahmer, conseillère régionale d’Ile-de-France et militante EELV de longue date, a côtoyé Denis Baupin lorsqu’elle travaillait au siège du parti à la fin des années 90. Elle aussi repousse ses avances. « Le lendemain matin, j’arrive, je reprends mon boulot », raconte-t-elle. « Denis est là, il ne me dit pas bonjour. Je lui dis : ‘Écoute Denis, donc à partir du moment où on veut pas coucher avec toi, tu ne dis plus bonjour.’ Il a pointé son index sur moi en disant : ‘Toi, t’auras jamais de poste au sein du parti.’ Ça s’est arrêté là. »
Plusieurs autres femmes mettent en cause Denis Baupin sous le couvert de l’anonymat. Mediapart et France Inter racontent notamment ce jour où une salariée du groupe écologiste s’est retrouvée seule avec Denis Baupin dans un ascenseur de l’Assemblée nationale. « Il lui a pincé les fesses. Il s’est pris une baffe ! », selon les sources citées par les deux médias.
Malgré plusieurs alertes, l’omerta a visiblement été de mise chez EELV, parti qui se veut pourtant en pointe sur les droits des femmes. « Beaucoup de gens se sont tus aussi par égard pour Emmanuelle Cosse, sa compagne, pour ne pas la blesser », précise Isabelle Attard. Emmanuelle Cosse, ancienne patronne d’EELV, a pris ses distances avec le parti depuis qu’elle a été nommée ministre du Logement en février dernier.
La députée et Elen Debost expliquent qu’elles se sont décidées à sortir du silence lorsqu’elles ont vu une photo postée sur Twitter par Denis Baupin le 8 mars dernier, journée des droits des femmes. Le député pose avec plusieurs de ses collègues avec du rouge à lèvres « contre les violences faites aux femmes ». Un autre tweet de Denis Baupin prend une lumière particulière après ces révélations : en juillet 2012, l’élu se félicite du vote de la loi contre le harcèlement sexuel. « Fierté de participer à ce vote de justice », écrit-il…
Sollicité par Mediapart et France Inter, Denis Baupin n’a pas souhaité répondre à nos confrères et les a renvoyés vers ses avocats. Le 8 avril, ceux-ci ont envoyé un courrier à Mediapart les mettant « en demeure » de ne rien publier.
Interrogé ce lundi sur France Inter, François de Rugy s’est dit « abasourdi » par ces révélations. « Si ces faits sont avérés, ils doivent bien sûr être condamnés et c’est à la justice d’établir la vérité des faits », a estimé le co-président du groupe EELV à l’Assemblée, qui a quitté le parti à la rentrée 2015. « La question des droits des femmes pour les écologistes, ça a toujours été quelque chose de très important dans notre combat politique. » De son côté, Noël Mamère, candidat des Verts à la présidentielle de 2007, a fait part sur BFMTV et RMC de son « sentiment de malaise, d’accablement et de honte en même temps.«
[Edit 11h] D’autres tweets de bon goût de Denis Baupin ont refait surface ce 9 mai, à l’image de cette « super blague » lancée lors de l’arrestation de Dominique Strauss-Kahn à New York dans l’affaire dite du Sofitel :
On peut dire ce qu’on veut de DSK, mais au moins avec lui les bourses n’étaient jamais en berne ! #calembour #honteux
— Denis_Baupin (@Denis_Baupin) 8 août 2011
Un de ses retweets du même acabit est également remonté :
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