Avigdor Lieberman, l'inquiétant nouvel homme fort du gouvernement israélien

Ce lundi 30 mai, Israël s’est doté d’un nouveau ministre de la Défense, confirmé par un vote du Parlement. Il s’agit du très controversé Avigdor Lieberman, étiqueté comme ultranationaliste. Avec son parcours et ses récentes déclarations, il inquiète l’armée israélienne comme les autorités palestiniennes.

C’était le 10 mars 2015. Lors d’un meeting près de Tel Aviv, Avigdor Liberman dérape, encore. A l’égard des Arabes israéliens, il juge que « ceux qui sont de notre côté méritent beaucoup, mais ceux qui sont contre nous méritent de se faire décapiter à la hache« . Une déclaration inquiétante lorsqu’on sait que cet homme est désormais ministre de la Défense de l’Etat hébreu et qu’il s’occupera donc des territoires occupés, du conflit israélo-palestinien et des possibles déclenchements de guerres. Le portefeuille des affaires étrangères est cependant actuellement entre les mains du Premier ministre, il n’aura donc pas le dernier mot sur ces dossiers.

Depuis ce lundi 30 mai, Avigdor Lieberman devient en tout cas le deuxième homme fort du gouvernement en étant nommé ministre de la Défense. Peu avant cette nomination, il accusait le gouvernement de manquer de fermeté face aux attaques palestiniennes et lui reprochait de ne pas construire dans les colonies de Cisjordanie occupée. Peu après le vote du Parlement, il s’est voulu rassurant en soulignant qu’il y avait dans « l’initiative de paix arabe quelques éléments très positifs pour permettre de mener un dialogue très sérieux avec tous nos voisins« .

Une sortie inhabituelle de sa part, lui qui s’est souvent fendu de déclarations pour le moins choquantes. En 2003, en parlant des prisonniers palestiniens remis en liberté, il appelle à ce que ceux-ci soient « transportés en autocars jusqu’à la mer Morte et qu’ils y soient noyés« . Un an plus tard, à l’adresse de la population arabe d’Israël, Avigdor Lieberman assume qu’ils « n’ont pas leur place ici. Ils peuvent prendre leurs baluchons et disparaître« . Et en 2009, c’est tout simplement la bombe nucléaire qui serait pour lui une solution : « Nous devons combattre le Hamas comme les Etats-Unis ont combattu les Japonais. Les Américains ont vaincu le Japon sans invasion terrestre, rendant une occupation militaire absolument superflue« . En toute tranquillité.

Cet originaire de Moldavie, qui a émigré en 1978, n’en est pas à son premier coup d’essai au sein d’un gouvernement israélien. Avigdor Lieberman a déjà été nommé ministre malgré ses propos. En 2006, il s’occupe des affaires stratégiques, il en démissionnera deux ans plus tard car il s’oppose aux négociations de paix avec les Palestiniens. Il fait son retour en tant que ministre des Affaires étrangères entre 2009 et 2015, avec quelques interruptions dues à des ennuis judiciaires (accusations de blanchiment d’argent, corruption, fraude, subornation de témoins, entrave à la justice dans le cadre d’une enquête sur le financement des ses campagnes électorales). 

Cap à droite toute

Avigdor Lieberman est un partisan d’une solution à deux Etats avec un échange de territoires et de populations, un moyen pour lui de se « débarrasser » des Arabes israéliens et pour qu’Israël ne devienne pas un Etat binational. Il fait la promotion de ses idées à travers son parti, Israel Beytenou – que l’on peut traduire par « Israël notre maiso »n. Créé en 1999, ce dernier est considéré comme ultranationaliste, d’extrême droite et non religieux, et représente les Israéliens d’origine russe. Il a particulièrement une ligne très dure vis-à-vis des Arabes et des Palestiniens.

Sa nomination a été possible grâce à la démission de son prédécesseur, l’ancien chef d’état-major, Moshe Yaalon. Proche de Tsahal, l’armée israélienne, ce dernier explique son départ par le fait que « des éléments extrémistes et dangereux se sont emparés d’Israël et du Likoud« , le parti sioniste et nationaliste de Netanyahou, en faisant allusion à la montée d’un certain extrémisme au sein du gouvernement mais aussi de la population. Le gouvernement actuel est en effet sûrement l’un des plus à droite qu’ait connu Israël. D’ailleurs, dans la foulée, un autre membre du parti de Lieberman, Sofa Landve,r a été nommé ministre de l’Intégration. 

Si la nomination d’Avigdor Lieberman inquiète, c’est particulièrement le cas de l’armée israélienne. Le nouveau ministre de la Défense n’est pas un fin connaisseur du monde militaire. Quand son prédécesseur était le plus haut gradé de l’armée israélienne, lui n’était que caporal lors de son service militaire. Les généraux craignent par ailleurs de voir leur société « sombrer dans la brutalisation » avec « la perte possible de la maîtrise dans l’usage de la violence, au profit de groupes d’extrême droite dont ils savent combien ils sont déterminés et difficilement contrôlables, et qui vivraient désormais sous la protection tacite du ministre de la Défense« . A l’annonce de cette nomination, les autorités palestiniennes se sont également émues d’un gouvernement qui « représente une vraie menace d’instabilité et d’extrémisme dans la région« .

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