Robert Ménard vs Marion Le Pen : à Béziers, la désunion des droites

Mécontente de la tonalité donnée par les organisateurs, Marion Maréchal-Le Pen a claqué la porte ce samedi 28 mai du colloque organisé par le maire de Béziers dans sa ville. Un signe de plus que « l’alliance des droites » prônée par Robert Ménard se fracasse en réalité sur les divergences stratégiques des uns et des autres.

Ce devait être le week-end qui jetterait les bases de l’union de « la vraie droite ». Mais il a tourné au psychodrame politique. Marion Maréchal-Le Pen a quitté plus tôt que prévu, ce samedi après-midi, le « Rendez-vous de Béziers » organisé par Robert Ménard dans sa ville de l’Hérault. La députée du Vaucluse dit s’être sentie « mal à l’aise » après des déclarations de plusieurs intervenants jugées hostiles au Front national. Seule tête d’affiche de son parti présente à Béziers – avec l’eurodéputé Louis Aliot – elle a quitté la ville avec armes et bagages peu après le déjeuner.

Il est vrai que pour les frontistes, le week-end n’avait pas débuté sous les meilleurs auspices. Dès l’ouverture des festivités vendredi soir, Yves de Kerdrel, le patron de Valeurs actuelles – partenaire de l’évènement – parle sur scène d’une « extrême extrême droite » au programme économique « sectaire ». A la sortie, si Marion Maréchal-Le Pen se prête de bonne grâce au jeu des selfies, elle n’en tire pas moins une mine contrariée. Le soir, elle boude le dîner privé organisé par Robert Ménard avec les responsables politiques. Mais la goutte d’eau viendra du maire de Béziers lui-même le lendemain matin. Devant la presse, l’édile se défend de vouloir servir « de marchepied » au FN. « Gagner avec seulement Marine Le Pen, c’est impossible », ajoute-t-il pour défendre « l’alliance des droites » qu’il appelle de ses vœux et le lancement d’un « mouvement citoyen » improbablement intitulé « Oz ta droite ! »

« Hyper malhonnête »

C’en est trop pour Marion Maréchal-Le Pen qui, en fin de matinée, fait savoir qu’elle lève le camp. « Ils ont changé les règles du jeu en cours de route », déplore l’un de ses proches auprès de Marianne. « On était là pour s’écouter et débattre, pas pour être mis devant un fait accompli. » A ses côtés, le député Gilbert Collard, du Rassemblement bleu marine, ne décolère pas : « Ménard dit qu’il ne veut pas être le marchepied du Front national, mais nous, on a été son marchepied quand il a été élu ! »

Yves de Kerdrel tente bien de rattraper le coup. Alors que Marion Maréchal-Le Pen déjeune en terrasse d’un restaurant biterrois, le patron de Valeurs actuelles s’engage dans une longue discussion avec elle pour plaider le malentendu. Mais rien n’y fait, la jeune élue trouve « hyper malhonnête » l’attitude des organisateurs. A ses yeux, les tenants de la droite « hors les murs » n’admettent pas que « le Front national est incontournable », comme elle l’affirme ensuite dans une interview au Figaro : « On peut avoir des alliés critiques mais compte tenu de l’urgence de la situation, accordons-nous au moins sur le fait que le FN est le seul parti capable de changer les choses. »

Guerre des egos

« Elle fait ce qu’elle veut, mais c’est toujours dommage que les gens n’acceptent pas la contradiction », observe Emmanuelle Duverger, épouse de Robert Ménard et elle aussi organisatrice du « Rendez-vous de Béziers ». Son mari, lui, tente en fin d’après-midi de dédramatiser l’affaire, saluant le « courage » de Marion Maréchal-Le Pen d’être venue à son colloque. C’est alors que Florian Philippot décide de s’inviter dans la polémique. Sur Twitter, le vice-président du Front national saute sur l’occasion pour qualifier de « flop » le week-end de Ménard, fustigeant « une petite mouvance d’extrême droite (…) instrumentalisée contre le FN ». Et s’attire en retour une salve de tweets rageurs de l’intéressé…

Si @f_philippot veut la défaite de @MLP_officiel, qu’il ne change pas de méthode !

— Robert Ménard (@RobertMenardFR) May 28, 2016

Ces querelles confirment que derrière l’affichage d’une volonté de rapprochement, chacun dans ce petit monde de la droite dure cherche en réalité à avancer ses propres pions. Robert Ménard aura réussi à faire parler de lui, malgré une participation peu massive – un peu plus d’un millier de personnes à Béziers – et l’absence des véritables idoles de la droite identitaire, comme Philippe de Villiers ou Eric Zemmour. Marion Maréchal-Le Pen marche sur sa ligne de crête : elle continue à faire les yeux doux aux électeurs de droite, tout en réaffirmant sa loyauté à sa tante. Quant au FN, l’épisode lui permet de se démarquer à peu de frais de la frange droitière la plus radicale, présente en force à Béziers : on a entendu, lors de la conférence sur l’immigration, des intervenants dénoncer devant une salle chauffée à blanc « le grand remplacement » et prôner « la remigration », des concepts que Marine Le Pen réfute.

Aux quelques désaccords de fond s’ajoute donc une guerre des egos. « On ne peut pas continuer à passer chacun son temps à dire du mal du voisin », plaidait pourtant Robert Ménard samedi matin. Pas gagné…

 


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