Panama Papers : le patron de la Société générale ne sera pas poursuivi pour parjure grâce au Sénat

Il aurait pu être poursuivi pour parjure mais le bureau du Sénat en a décidé autrement. Frédéric Oudéa, le patron de la Société générale, vient d’être blanchi par la chambre haute, qui a décidé de ne pas renvoyer son (faux ?) témoignage devant la justice. Il avait affirmé en 2012 devant une commission d’enquête que sa banque n’avait plus aucune activité dans les paradis fiscaux… Les Panama Papers ont révélé le contraire.

Il ne sera finalement pas poursuivi pour parjure. Le patron de la Société générale, Frédéric Oudéa, avait pourtant cru bon d’assurer les yeux dans les yeux, sous serment, devant une commission d’enquête sénatoriale sur l’évasion des capitaux en 2012, que sa banque n’avait plus rien à voir avec les paradis fiscaux. Une information démentie par la suite par les révélations des Panama Papers.

Frédéric Oudéa avait précisément affirmé que la Société générale avait fermé toutes ses implantations dans les paradis fiscaux non coopératifs, dont notamment le Panama, et qu’elle n’y exerçait plus aucune activité. En réalité, les documents révélés par Le Monde et le Consortium international des journalistes d’investigation ont mis au jour environ mille sociétés offshores créées par la banque entre 1977 et 2015, dont 415 encore actives en 2012, au moment de la déclaration de Frédéric Oudéa sous serment.

Des parlementaires communistes avaient donc saisi le Sénat pour réclamer des poursuites judiciaires pour « faux témoignage » contre Frédéric Oudéa. La chambre haute en a décidé autrement ce 26 mai. Le bureau du Sénat a estimé « qu’il n’y avait pas lieu de saisir la justice » :

« Au vu des nouvelles auditions organisées par Messieurs Philippe Dominati et Éric Bocquet, respectivement président et rapporteur de l’ancienne commission d’enquête, le Bureau a estimé que si les propos en cause ont pu comporter une part d’ambiguïté, ils n’étaient pas susceptibles d’être qualifiés de faux témoignage au sens du droit pénal. »

Il est rarissime que le bureau du Sénat décide de saisir le parquet pour poursuivre un témoin pour faux témoignage. C’est cependant arrivé il y a un mois, le 28 avril dernier : le bureau a alors remis dans les mains du procureur de la République le cas du professeur Aubier, chef du service pneumologie de l’hôpital Bichat, qui avait quelque peu oublié de préciser devant une commission d’enquête sénatoriale qu’il était également rémunéré par Total…
 
La non poursuite de Frédéric Oudéa a en tout cas été vivement dénoncée par le groupe communiste au Sénat :
« Comment ce vote (du bureau) sera-t-il interprété par la part croissante de nos concitoyennes et concitoyens qui demande justice, équité et transparence dans la vie publique ? Les sénatrices et sénateurs du groupe CRC refusent en tout état de cause une justice à deux vitesses, l’une pour les puissants, l’autre pour ceux qui le sont moins. Cette décision du Bureau du Sénat est un choix politique, un choix de classe, qui marquera l’histoire de cette institution. »
L’ex-rapporteur communiste de la commission d’enquête qui avait interrogé Oudéa en 2012, Eric Bocquet, est pour sa part très perplexe. Il détaille auprès de Public Sénat
« Il y a quand même eu pas mal d’initiatives qui me laissent un peu perplexe : la rencontre de Monsieur Sapin et Monsieur Oudéa ; la rencontre ici de la présidente de la commission des finances qui a reçu Monsieur Oudéa en amont pour préparer les auditions. Ça me laisse un peu pantois ; le déroulement de l’audition du 11 mai (par la commission des finances, ndlr) ; mes questions qui n’ont pas eu de réponses de la part de Frédéric Oudéa qui s’est tout de suite tourné vers la présidente et Monsieur Dominati (sénateur LR) pour éviter d’y répondre en partie. Tout ça me laisse un peu perplexe. Je ne suis pas convaincu qu’on ait mis tout en œuvre pour que la vérité soit faite. »
 

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