Euro de football : "La France se soumet à l'UEFA !"

Des stades en partie financés par nos impôts, la diffusion des matches en partie payante, l’UEFA qui bénéficie d’exonérations fiscales… Le député du Val-de-Marne et président du MRC Jean-Luc Laurent s’indigne auprès de « Marianne » de l’organisation de l’Euro de football qui se jouera en France du 10 juin au 10 juillet.

Alors que le sélectionneur de l’équipe de France Didier Deschamps dévoile ce jeudi 12 mai sa liste des 23 joueurs qui participeront à l’Euro de football, l’attente autour de l’événement ne cesse de grandir en France. Et pour cause, la compétition s’y jouera dans moins d’un mois, du 10 juin au 10 juillet. Pour accueillir les 24 sélections nationales qui disputeront le tournoi, ainsi que leurs millions de supporters, l’Etat et l’UEFA ont engagé de grands moyens. Une organisation qui ne fait pas l’unanimité… Jean-Luc Laurent, député du Val-de-Marne et président du MRC (Mouvement républicain et citoyen) explique à Marianne comment la France a cédé trop de terrain à l’UEFA.

 

Marianne : Pourquoi dénoncez-vous les conditions d’organisation de l’Euro 2016 ?

Jean-Luc Laurent : Les Français paient trois fois l’accueil de l’Euro en France. Ils paient d’abord le coût de l’organisation et des installations sportives, qu’elles soient nouvellement construites ou rénovées. Ensuite, pour suivre l’intégralité de la compétition, les Français devront souscrire à l’abonnement d’une chaîne à péage (BEIN Sports, ndlr). Je pense que le pays qui accueille un tel événement et qui en supporte des coûts est en droit de décider, comme la Belgique et l’Angleterre l’ont fait, d’imposer l’accès libre de tous les matches sur une chaîne de télévision. Nous payons donc trois fois cet Euro, et c’est scandaleux ! Enfin, le gouvernement abandonne les recettes fiscales à l’UEFA.

 

Pourquoi considérez-vous l’exonération fiscale obtenue par l’UEFA comme un abandon de la part du gouvernement ?

Exonérer fiscalement l’organisateur d’une grande manifestation sportive est une décision scandaleuse. L’Etat se prive ainsi de recettes fiscales dans un contexte de redressement des finances publiques, et où les Français sont appelés à faire des efforts. Je considère que cette exonération va à l’encontre de la démocratie et de la citoyenneté, qui suppose un consentement à l’impôt de la part des citoyens. L’exonération fiscale est également anachronique : L’UEFA est une société qui réalise des bénéfices, et qui empoche toutes les recettes de l’Euro. Or, la mesure d’exonération vise notamment l’impôt sur les sociétés et sur les salaires. L’Etat accompagne ainsi une forme de dumping sur la base d’un modèle économique qui fonctionne pourtant très bien.

 

 

A quel montant s’élève l’exonération ? Quel est le manque à gagner pour l’Etat ?

Les lois font toujours l’objet d’une étude d’impact, qui permet de mesurer leurs effets attendus. Aucune donnée chiffrée n’y a pourtant été renseignée sur l’exonération fiscale de l’UEFA. Mais au cours d’un débat en séance, la rapporteure générale au budget Valérie Rabault a indiqué que l’exonération entraînerait un manque à gagner pour l’Etat d’au moins 300 millions d’euros. Il s’agit d’une estimation basse, puisque les recettes fiscales en question dépendent du chiffre d’affaires de la manifestation.

 

Iriez-vous jusqu’à dire que la France n’est pas le véritable organisateur de l’Euro de football ?

Tout à fait ! La France accueille mais n’organise pas l’Euro. La France se soumet à ce que lui demande l’UEFA : il y a en quelque sorte une perte de souveraineté. Même si je suis heureux que la France accueille cette belle fête qu’est l’Euro, je regrette les conditions dans lesquelles cela se fait. Mon objectif est que le football soit pratiqué par le plus grand nombre et qu’il soit accessible. Et quand il y a une manifestation comme l’Euro cette année, il faut qu’elle soit aussi accessible par une billetterie aux tarifs non exorbitants et une transmission des matches ouverte à tous.

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