Considéré comme un des meilleurs spécialistes du djihadisme, Romain Caillet était consultant pour la chaîne BFMTV. « Télé-Obs » a révélé ce mercredi que ce musulman converti à l’âge de 20 ans est fiché S depuis plusieurs années par les services antiterroristes pour ses liens avec certains islamistes. Malgré des repentirs publics il y a déjà plusieurs années, il a été remercié par BFMTV ce 6 mai.
Comment connaître et parler aussi bien de l’islamisme ? Peut-être en ayant été soi-même un ancien pro-djihad proche de milieux pas très fréquentables … C’est le cas de Romain Caillet. Sollicité et interrogé par de nombreux médias sur les question du djihadisme depuis plus de deux ans, il est devenu la coqueluche des plateaux télés.
Pour David Thomson, journaliste et expert reconnu sur les réseaux djihadistes, Romain Caillet est « le meilleur connaisseur de l’Etat islamique« . La reconnaissance dont il bénéficie est incontestable. Mercredi 4 mai, Télé-Obs révèle dans un dossier sur « la face cachée des consultants« , que le spécialiste du djihadisme est fiché S depuis de nombreuses années. Ce qui a provoqué la fin de sa collaboration avec BFMTV, annoncée ce 6 mai, qui déplore que « Romain Caillet n’a pas jugé utile de préciser un certain nombre d’éléments importants de son passé, liés directement aux questions qu’il devait évoquer à l’antenne« .
Sa fiche S, il la doit à ses fréquentations douteuses avec les milieux radicalisés du Caire dans les années 2000.
Un BEP dans la vente en poche, il se convertit à 20 ans, en 1997, à l’islam. En 2005, il obtient brillamment un DEA en histoire médiévale. C’est après cet ultime diplôme qu’il se plonge dans l’étude du djihadisme. Pour l’occasion, il part vivre en Egypte où il suit des cours à l’institut Qortoba, fermé par la suite à la demande des services de renseignements occidentaux qui y voyaient une officine de recrutement djihadiste.
Mais c’est surtout son quartier qui attire l’attention des services de renseignements. Il vit alors à Nasr City, un quartier du Caire qui a vu défiler les islamistes les plus radicaux, notamment les frères Clain. Fabien, un des frères, est aujourd’hui connu pour avoir revendiqué, dans une vidéo, les attentats du 13 novembre à Paris. Romain Caillet l’assure, « j’ai dû les croiser jusqu’au début 2007« , mais il ne les a pas fréquentés.
Le désormais ex-consultant de BFMTV reconnaît tout de même avoir eu « une aventure intellectuelle, par curiosité« durant cette période égyptienne. Il intervenait régulièrement sur les forums islamistes sous le pseudonyme « Colonel salafi« , ne cachant pas ses positions en faveur du djihad, selon Télé-Obs. Mais il n’aura « jamais une activité militante« , assure-t-il aujourd’hui au Figaro : « Je n’ai jamais adhéré pleinement au courant djihadiste, même si j’avais de la sympathie pour certaines de ses thèses« .
Il le reconnaîtra au cours d’une garde à vue dans les locaux de la Sous-Direction anti-terroriste (SDAT) en janvier 2008 au cours de laquelle il précisera :
« Sur le djihad, je ne suis plus d’accord avec les Clain. Depuis mars 2007, je ne suis plus pour le djihad parce que je m’oppose au fait d’entraîner des jeunes pour se sacrifier à mourir sans avoir acquis au préalable les bases de l’islam. »
On a connu refus du djihad plus convaincu. Romain Caillet dément cette version des faits auprès du Figaro : « J’étais contre le djihad tout court, et pas seulement pour ces raisons« .
Lors de cette garde à vue, il affirme qu’il a essayé de réparer ses erreurs « en postant des repentirs publics« , affirmant qu’il « dormait mal la nuit en pensant aux attentats« . Romain Caillet savait-il qu’il était fiché ? « Je me doutais que je l’avais été. Mais depuis j’ai rencontré des hommes politiques, des responsables influents. Je ne pensais pas que j’étais encore fiché», confie-t-il toujours au Figaro.
Pour le journaliste de RFI David Thomson, invité de La Nouvelle édition de Canal + ce vendredi et auteur du livre Les djihadistes Français, « on ne peut questionner Romain Caillet sur sa neutralité. Aujourd’hui il a rompu avec ces milieux là, il est contre le djihadisme tout court« .
« Le public doit savoir ce passé, c’est important, mais certains vont l’utiliser pour discréditer ses interventions. Moi, au contraire, à mes yeux ça renforce sa crédibilité«
La chaîne d’information en continu, BFMTV, a avoué qu’elle connaissait ce passé mais ne savait pas pour la fiche S. Aujourd’hui en France, 20.000 personnes sont fichées S et 10.500 d’entre elles le sont pour « appartenance ou lien avec la mouvance islamique« . Mais ce fichier concerne aussi bien des personnes condamnées que des personnes présumées innocentes. Ironie de l’histoire, en février 2015, réagissant à un tweet sur la fusillade au Danemark dont les auteurs étaient connus des services de renseignement, Romain Caillet disait: « En même temps, vu le nombre de gens fichés par les services de renseignements, ça ne veut plus rien dire« .
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