Le docteur Aubier, pneumologue dans un hôpital parisien a, de son propre aveu, dissimulé au Sénat (où il était interrogé dans le cadre d’une Commission d’enquête sur la pollution de l’air) ses liens avec le groupe Total, dont il a été le médecin-conseil pendant vingt ans. Selon le Canard enchaîné, son cas n’a suscité aucune sanction au sein de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), et ce malgré le combat médiatique de la direction contre ce genre de conflits d’intérêts. Le Conseil de l’ordre des médecins a bien l’intention pour sa part de lui demander des comptes… mais uniquement pour avoir menti au Sénat, pas pour le potentiel conflit d’intérêts.
Officiellement, la direction de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) lutte par tous les moyens contre les conflits d’intérêts qui éclaboussent certains de ses praticiens. Une enquête interne sur le sujet a d’ailleurs été diligentée pas plus tard qu’au mois de mars dernier, à l’issue de laquelle plusieurs « situations à risque » ont été mises au jour. Situations auxquelles le directeur général du groupe, Martin Hirsch, promettait de remédier. « Toute activité rémunérée au profit d’un industriel « , prévenait en effet ce dernier dans Le Monde, devra désormais être déclarée par les médecins et sera soumise « à une autorisation préalable ».
Une fermeté volontiers affichée dans les médias qui ne correspond pas tout à fait à la gestion par l’AP-HP du cas Aubier, du nom de ce pneumologue de l’hôpital Bichat, à Paris, qui vantait dans la presse ou devant une Commission d’enquête au Sénat le maigre impact des pics de pollution sur la santé « des sujets bien portants » alors même qu’il était – sans l’avoir déclaré -, le médecin-conseil du… groupe Total depuis vingt ans. Détail qu’il avait, disait-il, « naïvement » omis de préciser.
Si le Sénat a décidé de saisir la justice pour l’éventuel parjure, le docteur Aubier n’a pas été inquiété par sa hiérarchie selon le Canard Enchaîné de ce 4 mai. L’intéressé est même toujours en poste et ne ferait l’objet d’aucune procédure disciplinaire. L’Ordre des médecins n’a pas été alerté. Explication du porte-parole de l’AP-HP au nom de Martin Hirsch : « Le directeur général de l’AP-HP ne peut que porter une information à la connaissance de l’Ordre des médecins. En l’occurrence, il n’était pas nécessaire de porter à la connaissance de l’Ordre des médecins un fait qui était sur la place publique »… Logique !
Un argument que réfute l’hebdomadaire satirique. « Pour un manquement sérieux à ses obligations déontologiques », lit-on, « un praticien hospitalier peut encourir » des sanctions « dans son hosto » comme un « abaissement d’échelon », une « réduction d’ancienneté de service », ou encore une « suppression totale ou partielle d’émoluments » voire une « mutation d’office. »
De son côté, le Conseil de l’ordre des médecins s’est décidé à agir. Le docteur Aubier va être « convoqué devant la chambre disciplinaire ». Mais pas pour ses liens avec Total en tant que tels, uniquement à cause du parjure présumé devant la commission d’enquête de l’Assemblée nationale ! « Ces liens n’avaient pas à être déclarés au Conseil de l’ordre car nos règles de transparence ne visent que les laboratoires pharmaceutiques et industries du médical« , explique-t-on. Il s’agirait donc peut-être de repenser ces « règles de transparence« …
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