Primaire "des gauches et de l'écologie" : même les initiateurs n'y croient plus !

L’idée d’une primaire réunissant les gauches et les écolos vit-elle ses dernières heures ? A écouter ses principaux initiateurs, elle est en tout cas en très mauvaise posture. Eux-même ne semblent plus y croire…

Ils voulaient « débloquer » le « système politique » français. Réveiller les bonnes consciences de gauche et écologistes en vue de 2017. « Trop souvent, nous nous contentons de voter « contre », pour éliminer « l’autre » candidat. Pire, nous ne votons pas, atterrés par la médiocrité de l’offre politique et son incapacité à se renouveler », écrivaient-ils dans une tribune publiée le 11 janvier dans les colonnes de Libération. Pour eux, la solution passait nécessairement par une primaire des gauches et des écologistes, « condition sine qua non pour qu’un candidat représente ces forces à l’élection présidentielle en incarnant le projet porteur et bienveillant dont la France a besoin. » Sauf que depuis cet appel « la primaire a du plomb dans l’aile« , selon les mots du premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis. Et il n’est pas le seul à le penser. Les initiateurs de l’appel eux-mêmes semblent ne plus y croire.

Yannick Jadot, ce matin sur LCI, a joué la carte de la franchise : « Elle est en mauvaise posture, il ne faut pas se raconter d’histoires ». Malgré les réunions publiques, les nombreux débats organisés et une réelle appétence des Français pour cet exercice, la primaire des gauches et des écologistes est mal barrée. La faute aux partis politiques, selon l’eurodéputé EELV, qui « préfèrent travailler dans leur coin, préfèrent leur zone de confort, préfèrent des combats identitaires quitte à créer la catastrophe en 2017. » En guise d’ultime argument, le responsable politique annonce le bruit et la fureur si la primaire n’avait pas lieu : « La catastrophe, ce ne sera pas simplement l’absence d’un candidat de gauche et écologiste au second tour, ce sera l’explosion durable de la gauche et des écologistes à l’échelle nationale pour des années. »

« Mon intime conviction est que la primaire à gauche n’est plus possible »

Une analyse qu’avait déjà tirée avant lui, Daniel Cohn-Bendit, initiateur lui aussi de l’appel. Dans un entretien accordé au Monde et publié le 5 avril dernier, il ne mâche pas ses mots : « Je suis personnellement très pessimiste (…) J’observe que le fossé entre toutes les composantes de la gauche et des écologistes ne cesse de grandir. Pour faire une primaire, il faut un minimum de confiance et de respect entre toutes les forces ou personnes politiques prêtes à participer à un dispositif commun. » Relancé sur la faisabilité de cette primaire, « Dany » lâche le morceau :

« Mon intime conviction – et je tiens à préciser que je ne parle pas au titre des autres initiateurs –, c’est que la primaire à gauche n’est plus possible. Le climat politico-culturel rend infaisable cette bonne idée. C’était une proposition juste, qui aurait pu permettre à la gauche et aux écologistes de sortir par le haut du marasme dans lequel nous nous trouvons ».

Mais jamais à court d’idée, le cofondateur d’EELV a déjà une solution de repli : « La seule surprise possible, s’il n’y a pas de primaire, serait une candidature de Nicolas Hulot. Lui seul aura la capacité de rassembler des écologistes, en partie des socialistes et même des centristes. Il peut représenter une candidature non partidaire », explique-t-il.

La primaire tourne donc à vide. Et pas sûr que « la primaire citoyenne », à l’initiative de Générations Citoyens et Cap 21, formations chapeautées par des écolos centristes, prenne le relai. Côté PS, un vote du conseil national le 9 mars a bien enteriné le soutien à l’organisation d’une primaire à gauche. Mais un vote accompagné d’une condition absolue : que les perdants à ces primaires s’engagent à soutenir quoi qu’il arrive le gagnant. Ce qui revient à dire que si François Hollande y participe et la gagne, tous les candidats qui se poseraient en alternative au président de la République et à sa politique devront se ranger sagement derrière lui, sans moufter et avec le sourire… Un art du jeu de dupes dont Jean-Christophe Cambadélis est passé maître.  

La primaire des gauches et des écologistes avait-elle pour autant une chance de marcher ou portait-elle, dès le début, l’annonce de son échec ? David Cormand, le nouveau secrétaire national d’EELV, estime dans un entretien accordé à Marianne que « dès le début, il y a eu une incompréhension autour de la primaire. Il y a ceux qui y voyaient un moyen de remettre François Hollande sur les rails et les autres de porter justement une candidature alternative. Et tant que cette ambiguïté n’est pas réglée, il sera difficile d’organiser une primaire. » Deux positions irréconciliables qui auront eu raison des bonnes intentions…

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